Nous voici plongés dans la vie quotidienne d'un monastère du Nord
de la Thaïlande. Pendant plus d'un an, Joanna Cook y a mené son
enquête d'anthropologue tout en participant pleinement, comme
bouddhiste et comme méditante, à la vie quotidienne et aux tâches
de la communauté. Dans un paysage bouddhique parcouru par des
courants divers, ce monastère de (re)fondation récente se
caractérise par une activité intense d'initiation de laïcs (issus
le plus souvent des classes moyennes urbaines) à la pratique de la
méditation d'une part, par la présence d'un groupe important de mae
chee d'autre part: alors que l'histoire du bouddhisme thaï ne
connaît pas de moniales de plein droit, ces femmes, vêtues de
blanc, ont un statut ambigu. Occupant un échelon intermédiaire
entre les laïcs et l'ordre monastique masculin, elles se consacrent
cependant pleinement à la vie religieuse et, sous la direction des
moines, participent à l'enseignement de la méditation aux laïcs. Ce
statut intermédiaire s'exprime notamment dans le fait qu'elles
peuvent recevoir les aumônes des laïcs tout en faisant elles-mêmes
des aumônes aux moines. Plusieurs chapitres examinent le
fonctionnement et l'évolution de ce statut intermédiaire qui marque
à la fois une avancée et une limite, toutes deux relativisées par
une quête spirituelle qui, en principe, transcende ces enjeux
sociaux mondains. D'autres chapitres décrivent et analysent la
manière dont la transmission et la pratique intensive de la
méditation vipassanâ, importées de Birmanie dans les années 1950,
contribuent à façonner la personnalité du pratiquant tout en
l'inscrivant dans les cadres rituels d'une communauté et dans les
attentes de la société à son égard. Malgré des considérations
théoriques un peu répétitives, cette étude, en s'appuyant sur une
observation participante très vivante et sur des entretiens,
apporte un éclairage concret sur une des facettes des
transformations actuelles de la tradition bouddhique dans l'Asie du
Sud-Est. - J. Scheuer sj