Montrer aux hommes le chemin qui mène au Christ. Mélanges offerts à Mgr André Léonard à l’occasion de son 80e anniversaire

(éd.) Éric Iborra (éd.) Isabelle Isebaert
Théologie - Recenseur : Xavier Dijon s.j.

Il fallait bien un volumineux ouvrage pour couvrir les divers centres d’intérêt du professeur de philosophie, du pasteur et du théologien qu’est l’archevêque octogénaire André Léonard auquel, en liminaire de ces Mélanges, le pape Benoît xvi adresse un bel hommage, indiquant que, en ses différentes missions, le jubilaire a voulu Den Menschen den Weg zu Christus als den Weg des Lebens zu zeigen. Sans pouvoir évoquer ici chacune des 37 contributions – regroupées en 7 sections – de ce recueil, épinglons tout de même dans la première section (« Sacerdoce, Liturgie, Prédication »), la belle méditation du p. Jacques de Longeaux sur St Joseph qui sut trouver envers Jésus et Marie sa juste place, inspiratrice aussi de la paternité propre au prêtre. Moins convaincant sans doute est le témoignage du Modérateur de la Fraternité Saint-Thomas-Beckett à propos de candidats au sacerdoce « ne souhaitant pas s’insérer dans une structure en dissidence avec l’Église » (p. 75) de même que le plaidoyer du p. Stefan Würges pour le retour de la célébration eucharistique dos au peuple afin de mieux marquer le caractère sacrificiel de la messe.

La deuxième section (« Hegel et l’idéalisme allemand ») intéressera surtout les philosophes de haut vol, à commencer, bien sûr, par le destinataire de ces Mélanges qui consacra ses deux thèses de philosophie (doctorat et habilitation) au philosophe de Iéna. Dans la section suivante (« Vérité, don, amour »), le lecteur se laissera emporter par tout ce courant philosophique qui entend mettre en évidence l’analogie de l’être pour corriger l’excès rationaliste de la Modernité. Ainsi conduit de Éric Przywara à Gustav Siewerth et Ferdinand Ulrich, il verra défiler les noms d’Aimé Forest, Louis Lavelle, Claude Bruaire, Hans Urs von Balthasar, Adrienne von Speyer, Henri de Lubac, Albert Chapelle, en particulier dans la contribution originale de Bernard Pottier sur l’homme, symbole de l’humanité dans l’AT (Adam), et la femme, dans le NT (Marie).

Sous le titre « Dignité et vocation de l’homme », la cinquième section aborde la morale (fondamentale et bioéthique, mais aussi socioéconomique et politique) où le jubilaire fut également un maître pédagogue. Notons-y, d’abord l’analyse perspicace de Rémi Brague sur la liberté moderne qui s’avère servile lorsqu’elle ne vise plus le Bien, puis la différence que pose Michel Ghins entre l’approche scientifique et l’approche sapientielle dans la recherche du fondement de la dignité humaine ou encore la faveur donnée par Herman De Dijn à la sensibilité morale par rapport à l’approche principialiste dans la bioéthique contemporaine. Tandis que Carine Brochier entame l’analyse critique de l’euthanasie en Belgique, Michel Schooyans opère celle du positivisme juridique ; à noter à ce sujet une erreur à propos de Hans Kelsen : contrairement à ce que dit l’A (p. 479), la norme suprême de la pyramide normative n’est pas « posée par un homme ou un groupe d’hommes », mais seulement « supposée » pour justifier la validité d’un ordre juridique déjà efficace en gros. Quant à la contribution de Drieu Godefridi, elle étonne en laissant peser sur l’encyclique Laudato si’ du pape François le soupçon de complicité à l’idéologie écologiste malthusienne, soupçon heureusement lavé 130 pages plus loin par la contribution de Brice de Malherbe montrant à quel point la référence au Créateur s’écarte radicalement de l’écologisme.

Après une brève cinquième section (« Art et littérature ») analysant en particulier dix beaux tableaux (reproduits en couleurs) de Philippe de Champaigne « montrant le chemin qui mène au Christ », les deux dernières sections abordent la fin d’un monde et l’avènement du nouveau : dans la sixième (« un monde déchu – destruction de l’harmonie originelle »), Florent Urfels entend donner crédit à l’hypothèse formulée par André Léonard sur le péché originel : l’homme qui veut garder le choix de refuser Dieu obtient en retour celui de se comprendre comme le pur fruit de l’évolution darwinienne ; dans la septième (intitulée du nom de la devise de l’évêque jubilaire « Veni Domine Jesu »), Joël Rochette mobilise les diverses béatitudes néotestamentaires (en Mt, Lc, Ap) pour faire échapper le jugement dernier au jeu de la carotte et du bâton. Au total, voici donc un ouvrage collectif bien construit prouvant, si besoin était, que Mgr Léonard compte beaucoup d’amis : par la diversité de leurs contributions, ils ont su dresser, qui de leur confrère, qui de leur maître, un portrait intellectuel dont la ressemblance est au moins aussi avérée que la photographie du jubilaire en 2e page de couverture. — X. Dijon s.j.

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