Ce livre de forte doctrine offre en l'année du Père une véritable
lecture spirituelle. «Le mystère de la Personne du Père» (p. 8s)
est invoqué dans la nouveauté de la révélation évangélique (Abba,
Père: Mc 14,36; Rm 8,15; Ga 4,15). La distinction des noms, Dieu et
Père, par le Nouveau Testament est soulignée à l'égard de Rahner
(p. 16 s) et de Glorieux (p. 18), et la doctrine des appropriations
précisée. La génération éternelle du Fils (p. 34) ne se laisse pas
comprendre seulement comme génération du Verbe mais dans son
analogie avec la génération humaine. Des thomistes fervents se
trouveront un peu bousculés mais ils se réjouiront des clartés
données sur le «rôle de l'amour dans la génération» (cf. l'heureuse
mise au point de la théorie de Durrwell, p. 59). L'A. retient le
singulier pour Jn 1,13 (p. 66s) et présente le dossier patristique
(Ignace, Justin, Irénée, Hippolyte et Tertullien) en faveur d'une
variante si expressive du mystère de l'Incarnation, de la maternité
virginale et de la paternité divine. Les doctrines de la Rédemption
(p. 85s) et de la Providence (p. 113) sont revisitées à la lumière
de la paternité personnelle du Dieu et Père de N.S.J.C. L'A.
rappelle sa thèse de la «souffrance divine» qui ne serait pas
contradictoire avec la doctrine de l'impassibilité divine (p. 111).
La distinction entre la personne du Père et les noms divins
pourrait ici être méditée encore; Jn 20,17 peut y aider, à
condition de l'entendre en son entièreté: «mon Père et votre Père»,
certes, mais aussi «mon Dieu et votre Dieu» (p. 114 n. 2). Le
commentaire du Notre Père (p. 141- 205), en référence notamment à
Carmignac, et un vif plaidoyer en faveur d'une fête liturgique déjà
suggérée au XVIIe siècle, le 5e dimanche après Pâques (p. 208s),
donnent à la doctrine sa portée spirituelle et liturgique.
L'invocation «Abba» est au coeur de ces pages (ainsi p. 220-222),
même si le terme, absent de la LXX n'apparaît qu'une fois sur les
lèvres de Jésus (trois fois dans le NT) et bien que le Seigneur
dans sa prière s'adresse personnellement à son Père en des termes
variés (cf. p. ex. Mt 11,35-36; Jn 17,1.11). Les oraisons
doctrinales du temps ordinaire (p. 211) et la Prière eucharistique
s'adressent au Père. L'A. en souhaiterait une expression plus
appuyée pour l'éducation de la conscience filiale des chrétiens.
L'adoration du Père en esprit et en vérité (Jn 4,23) se ravivera au
contact de cet ouvrage de doctrine et de foi. Certains cependant
seront plus sensibles à la discrétion de la liturgie et à la
pédagogie du respect, professée par l'Église. - A. Chapelle, S.J.