Jean-Paul Morley revisite l’image de Dieu que nous portons en nous, trop souvent écrasante et aujourd’hui en quelque manière indéfendable, car l’existence de Dieu n’est plus désormais une évidence, parfois à peine une question. En relisant d’une manière différente, très méditative et spirituelle, les textes fondateurs de la foi chrétienne (le Credo, le Décalogue, le Notre Père), l’A. les considère comme les « gonds » autour desquels tournent nos questions et nos doutes, selon l’expression de Wittgenstein que reprend dans la préface Olivier Abel.

Né à Bruxelles en 1948 : un peu belge, un peu anglais, un peu normand, J.-P Morley a grandi à Paris mais aussi à la montagne, il n’oubliera jamais ses années passées au Chambon (1957-1959) dans une famille protestante. Il fait ses études de théologie à Genève et New-York. Il commence à travailler comme pasteur-ouvrier à Marseille, mais aussi comme conducteur de car. En 1979, il participe à la création d’une Mission Populaire Évangélique à Trappes, puis commence une thèse soutenue en 1990. Il se retrouve ensuite pasteur dans différentes missions, en région parisienne. En théologie systématique, il est particulièrement intéressé à défendre un Dieu qui « change » (p. 173s), un Dieu revisité au-delà des prêts à penser, un Dieu qui a choisi de lier son destin à celui de ses créatures, un « Dieu vivant ». C’est dire que le livre est parfois déroutant, volontairement.

Le parcours de J.-P. Morley, s’il nous entraîne souvent dans son sillage, ouvre aussi de nombreuses interrogations et comme le dit O. Abel des « points de récalcitrance ». Ainsi l’analyse roborative de la problématique virginité de Marie, laquelle, dans sa disponibilité, tient tout cependant du seul regard de Dieu (p. 40s), ou celle toute spirituelle (sans exclusive pourtant d’un événement mystérieux) de la résurrection de Jésus. Ou encore l’analyse assez classique dans le protestantisme de l’Église communauté !

La deuxième partie concernant l’éthique (à travers l’évocation du Décalogue) apparaît plus convenue, manifeste en faveur de la liberté et de la conscience de chacun.

La troisième partie se présente comme une belle analyse critique et spirituelle du Notre Père. L’essentiel, pour l’A., est de suggérer tout au long de son analyse, l’ampleur de la tendresse de Dieu qui enveloppe, dès le début de la prière, le priant qui fait siens les mots du texte et prononce avec humilité le nom insaisissable du Dieu insaisissable (p. 133) entré dans notre histoire. Et nous sommes tous les fragiles « invités de la promesse » (p. 135), en marche sur le long chemin qui mène au Royaume.

J.-P. Morley nous propose un ouvrage qui esquisse une prédication de l’espérance, appelée à éclairer la liberté d’une conscience enfin responsable de soi-même comme d’autrui. Un ouvrage qui peut se lire dans le cadre d’un œcuménisme ouvert et toujours critique. — M.-J. Coutagne