«Que soit! L'expression flamboyante est performative: elle fait
passer à l'être une parole de désir, une parole de volonté» (p. 5).
Désir et volonté ont donc été sollicités pour rassembler 20
auteurs: exégètes, bien sûr, spécialistes du Livre, théologiens
anciens et contemporains aussi, sans oublier la question inverse
posée par l'Extrême-Orient: «l'absence de création donne-t-elle à
penser?» Devaient être encore interrogées les entreprises de
création éminemment humaine que sont les oeuvres d'art et les
recherches des sciences… Ainsi, trois parties équilibrées et se
répondant ou s'interrogeant l'une l'autre donnent une somme aux
entrées multiples. Il n'est malheureusement pas possible de rendre
compte de chacune de ces études. L'excellente introd., très
détaillée, due à Françoise Mies, jalonne une éventuelle lecture
suivie. Il faut reconnaître que «sans toute cette littérature, on
ne pourrait comprendre comment la tradition ultérieure a pu penser
la création par la Sagesse, par le Christ-Logos et par la Trinité,
création ex nihilo et continue, création et recréation,
création et résurrection, réflexion sur le commencement
(próton) à partir de la fin (eskhaton), et les
articles du Credo demeureraient inintelligibles» (p. 5).
C'est sur cet «héritage de fond» que peut se déployer l'enquête sur
l'idée de création. L'éventail est large. En judaïsme, elle a son
site natal. En Extrême-Orient, elle semble s'épuiser «sans l'Un
créant le Second, sans altérité du monde par rapport à un principe
premier personnel» (p. 6). Enfin, il s'agira de nuancer l'usage
analogique de la pensée théologique de «création» que l'on se
permettra pour rendre compte de la créativité artistique et
scientifique des «oeuvres» dues à la fécondité des gestes de
l'humain. Les sciences (de l'astrophysique à la biologie et jusqu'à
l'objet des sciences dites humaines) sont directement confrontées à
la question d'une «création en évolution». La «pensée» de la
création permet-elle de poser une origine et un horizon qui
permettent une meilleure perception, et la vérité propre, de cette
double aventure millénaire qui en écho fait, de l'acte créateur
divin, «entendre les harmoniques et opère une recréation de
l'auditeur par l'Esprit» (p. 6)?
On le pressent, ce vaste ensemble va rencontrer et «faire émerger»
un certain nombre de questions «transversales». Françoise Mies en
relève huit «majeures». Citons-la avec le résumé qu'elle présente:
«création et altérité, création et autonomie; création et
commencement, création entre próton et eschaton,
création ex nihilo et création continue, création et
causalité, création et bonté, réponse du créé au Créateur» (p. 6).
Sans pouvoir développer les attendus historiques de chacune de ces
questions dans l'histoire de la pensée, on aura à mesurer les
enjeux et les défis qu'elles présentent à la raison et à la foi, à
leur dialogue. Nous devinons l'intérêt des textes proposés à notre
réflexion. - J. Burton sj