Cela fait partie des revers de l'histoire: S. Augustin, passionné
par l'unité de l'Église, spécialement pendant la crise donatiste
(«Il n'a pas la charité du Christ celui qui n'aime pas l'unité de
l'Église») serait le signe, encore aujourd'hui, de la division
entre les deux grandes traditions chrétiennes, orientale et
occidentale! Les accusations qu'on lui porte sont connues: pour les
uns, il aurait transformé la théologie en métaphysique, pour
d'autres, il l'aurait réduite à l'anthropologie, entraînant ainsi
l'Occident dans l'individualisme subjectiviste. Il serait à
l'origine du filioque; sa doctrine du péché originel, non
formulée en ces termes en Orient, est trop pessimiste; sa doctrine
de la grâce et de la prédestination aurait enfermé la liberté
humaine dans un étroit carcan; et il aurait encore fâcheusement
rompu l'unité entre intelligence et volonté ou réduit la
compréhension du mot «catholique» à la seule «universalité»! Dans
ce contexte, la publication des Actes du XIe Symposium
interchrétien, tenu à Rome en sept. 2009, à l'initiative de l'Inst.
franciscain de spiritualité de Rome (Antonianum) et de la
Fac. de théologie de l'Univ. Aristoteles de Thessalonique,
est une avancée dans le rapprochement oecuménique. La préf., signée
par L. Bianchi, trace judicieusement un chemin en 3 étapes parmi
ces quatorze études augustiniennes. Une fois les difficultés
judicieusement posées par l'archevêque de Corfou, un premier pas
consiste à étudier la réception des oeuvres augustiniennes.
Ensuite, des études comparées entre Augustin et l'un ou l'autre
Père grec permettent de prendre la mesure, de manière plus précise,
de ce qui peut rapprocher ou tenir à distance les deux grandes
traditions. On en arrive alors aux interventions majeures, celles
qui formulent les différences ou tentent de répondre aux
accusations, tant au niveau de l'anthropologie théologique que de
la doctrine trinitaire. Mentionnons ici les précieuses
contributions des prof. de l'Augustinianum. Du point de
vue méthodologique, ce colloque rappelle une fois de plus que l'on
gagnera toujours à lire un Père directement dans le texte, en
situant sa pensée en évolution dans son contexte (souvent
polémique) et en accordant une attention toute particulière à ses
références scripturaires. -S. Dehorter