Zen et physique quantique. Quand un moine rencontre le boson de Higgs

Vincent Keisen Vuillemin
Spiritualité - Recenseur : Jacques Scheuer s.j.

Suisse d’origine calviniste, Vincent ‘Keisen’ Vuillemin pratique (depuis 35 ans) et enseigne la méditation bouddhique dans la tradition de l’école Zen. Professionnellement il a travaillé comme physicien au CERN, le centre européen de recherches situé sur la frontière franco-suisse. Il n’a cessé en outre de nourrir un intérêt pour les questionnements philosophiques et la cosmologie. À la fois personnel et rédigé avec grande clarté à l’intention d’un public assez large, ce livre aborde de front les rapports entre les conceptions du cosmos et de l’être humain fondées sur les sciences (physique des particules, astrophysique) et celles inspirées par une observation de soi et une quête plus intuitive nourrie par la méditation. Se gardant de tout concordisme hâtif, l’A. suggère prudemment des connexions subtiles et des complémentarités.

Les notions d’impermanence, d’interdépendance et de vacuité (śûnyatâ ; bien distinguée du néant) jouent ici un rôle central : « Les concepts liés à śûnyatâ dans le bouddhisme et le Zen me permettent d’approcher plus facilement de façon intuitive les concepts et observations liés à la théorie du big-bang (…), des idées des Univers multiples et cycliques, ainsi que du mécanisme de Higgs donnant naissance à la masse (…). D’autre part, les observations en physique des particules (…) me permettent de mettre des images mentales sur des concepts [bouddhiques] qui autrement resteraient difficiles d’approche. L’un aide la compréhension de l’autre, et vice versa » (p. 17). Le parcours proposé est éclairant et suggestif. On peut toutefois s’interroger : même si le vide est présent de manière prépondérante aussi bien en physique des particules qu’en astrophysique (référence notamment aux 76% d’« énergie noire » composant notre univers), y a-t-il des raisons de penser que la vacuité bouddhique (celle de Nâgârjuna ? ou plutôt celle de Dôgen ?) soit davantage liée au « vide » qu’à la « matière » ? L’A. le rappelle opportunément : « Ce que nous pouvons appeler la vacuité dépasse très largement le dualisme du vide et du plein » (p. 91).

Chemin faisant, l’A. développe notamment, au carrefour des sciences, de la philosophie et de la pratique méditative, des réflexions sur le temps, l’instant et la durée. Signalons aussi de fort belles pages sur le bodhisattva et les vertus qui balisent sa progression vers l’Éveil : c’est l’occasion de souligner en toute cohérence l’importance de relations sociales non égocentriques, inspirées par la compassion, et de préoccupations écologiques. Mgr Lamotte n’était pas jésuite mais prêtre diocésain (p. 126). Au lieu de Majna Paramita (passim) ne faut-il pas lire (Maha) Prajña Paramita ? — J.S.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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