Dans l'article « La sécularisation en questions »
(Études 359, nov. 1983), l'A. avait déjà montré le
beau souci d'équilibre que l'on retrouve ici : la mise à
l'écart de la tradition biblique, au nom d'une laïcité étroite,
empêche nos démocraties à la fois de comprendre leur origine et de
connaître leur limite. Certes, la racine grecque reste dans la
mémoire de nos régimes, mais la référence biblique, trop souvent
occultée, élargit le peuple souverain jusqu'à y inclure tous les
habitants de la cité et elle approfondit jusqu'au coeur de l'homme
l'ordre jadis cosmique qui régissait le vivre ensemble des
citoyens. C'est que, devant l'étrangeté que constitue l'asymétrie
du pouvoir, la Bible affirme qu'il s'agit là du don d'une Autorité
sous laquelle les responsables politiques exerceront leur sagesse
propre. Donc, pas d'horizontalisme qui évacuerait triomphalement
toute transcendance hors de la Cité, mais pas non plus de
verticalisme qui identifierait dangereusement Dieu et César :
l'hétéronomie chrétienne (originale par rapport à la juive ou à la
musulmane) garantit l'autonomie, tant des
responsables que des citoyens, dans la recherche du bien commun.
Aucune institution du pouvoir n'est sacrée, mais chacune est
bienvenue dans la mesure où elle prépare la Fin de l'histoire qui,
par ailleurs, lui échappe. Il s'agit donc d'une sagesse que ne
remplacent ni les sondages d'opinion (les pythies contemporaines),
ni les diktats scientifiques des « sociologues », ni les
allégations de progrès plaquées sur les nouveautés. Mobilisant tour
à tour St Augustin, H. Arendt, E. Durkheim,
G.W.F. Hegel, T. Hobbes ou S. Weil,
Paul Valadier nous montre comment la sagesse biblique pourrait
encore nous aider à gouverner la société actuelle. -
X. Dijon s.j.