Vous, lumière du monde… La vie morale des chrétiens: Dieu parmi les hommes

Réal Tremblay
Morale e diritto - reviewer : G. Navez s.j.
Nous sommes habitués à chercher une morale de correction qui mène au bonheur: nous sommes tentés de poursuivre notre propre gloire au lieu de manifester la gloire de Dieu qui, seule, importe. Tremblay nous propose une morale théophanique dans la ligne de saint Irénée et de Léon le Grand: la perfection chrétienne n'est pas le survoltage de nos efforts isolés, mais devient présence active, manifestation du Fils dans le monde. Contre la gnose, on veut mettre en évidence la vérité de Dieu, sans la ramener à notre mesure pleine d'erreurs et d'apparentes contradictions.
D'où l'importance d'une vie reçue au baptême et dans les sacrements, surtout l'Eucharistie (vivra par moi: je vis, non plus moi, mais le Christ en moi; mon frère, ma soeur, ma mère celui qui écoute et pratique la Parole…). Conçue comme épiphanique, la morale ne peut plus se confondre avec nos lumières personnelles forcément étriquées. Elle devient ce que furent et firent les mages, ou plutôt ce que le Seigneur fit en eux, des fils contagieusement rayonnants de Dieu. Prendre ensemble le retour vers le Père du Christ ressuscité, réaliser l'alliance des adoptés avec le Frère accompli. L'agapè de Dieu, perçue vitalement dans la miséricorde et notre transformation sacramentelle, est indispensable parce que, par nous-mêmes, nous sommes radicalement incapables de toute oeuvre surnaturelle.
La gloire de Dieu c'est l'homme vivant, eucharistié. Théologie de la sequela Christi: servir, jusqu'à la mort, le corps entier du Christ; morale eschatologique animée par l'Esprit, au-delà de tous les règlements humains: morale de renoncement radical à soi pour une ouverture au-delà de l'humain aux béatitudes déconcertantes. «Le Royaume de Dieu proche, non accompli mais déjà là». L'Esprit, maître d'oeuvre de l'imprévisible, sans routine ni reprise automatique des performances volontaristes et satisfaites illusoirement («non ma volonté, mais la tienne», ad majorem Dei gloriam).
Marie est le modèle maternel d'une morale de l'Emmanuel, elle nous sauvera du fakirisme durci et des comparaisons et jugements lapidaires qui gâchent tout. La morale naturelle doit être guérie, dilatée divinement, gratuitement, librement; elle est empreinte constitutive de l'être créé et une prédisposition à la filiation divine et au partage de la vie trinitaire. L'humanum doit s'élargir au-delà de tous nos désirs et possibilités terrestres au divinum. Dans cette optique théophanique, notre vocation devient universelle (notre identité reste tronquée si nous ne sommes pas insérés dans le corps unique du Christ par une alliance solidaire de vie divine). - †G. Navez, S.J.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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