Zachée ou l'accueil du salut. Une réflexion biblique sur l'extrême de la miséricorde

Pierre Coulange
Sacra Scrittura - reviewer : François Odinet
« Le personnage de Zachée semble concentrer sur lui tous les obstacles les plus dirimants pour accéder au Royaume prêché par le Christ » (p. 181) : au coeur de cette étude, la rencontre avec le publicain apparaît comme symbole d'un évangile lucanien dans lequel Jésus sauve les « extrêmes ». Pour l'étudier, l'A. a recours à une analyse sémantique de Lc 19,1-10. Le long chap. 1 explore la péricope pas à pas en repérant des éléments que la suite de l'étude approfondira. Retenons la méditation de l'expression « fils d'Abraham » : Jésus semble agir pour Zachée, dans sa maison, comme Dieu pour Abraham au camp de Mambré. Puisque l'évangile est économe en détails, tous apparaissent significatifs. Le chap. 2 découvre en Zachée le probable chef d'une société de publicains, dont les charges étaient achetées au pouvoir romain. Devant rembourser leur achat tout en ayant la faculté de percevoir plus que ce qui leur était demandé par l'autorité, réputés fraudeurs, les publicains sont traités comme des pécheurs publics. Cette mise en contexte éclaire le remboursement par Zachée : il pourrait se rapprocher des lois deutéronomiques mais aussi du droit romain, qui prévoyait de rendre au quadruple ce qui avait été extorqué par la violence.
Le chap. 3 enquête sur Jéricho, ville très romaine du fait des palais hérodiens, où la richesse pouvait s'étaler à côté d'un peuple pauvre que Bartimée représente. Jésus vient dans une ville qui ne devrait théoriquement pas exister du fait de l'anathème de Josué, au lieu du premier péché d'Israël en Terre promise - précisément un péché de convoitise (Jos 7,21). Le chap. 4 identifie le sycomore comme un figuier stérile dont le publicain devient un « bon fruit » par la rencontre avec le Christ. Quant à Zachée lui-même (chap. 5), les notations péjoratives s'accumulent à son sujet, de sa petite taille à sa richesse, qui paraît empêcher l'entrée dans le Royaume. Enfin, le chap. 6 se livre à une comparaison avec d'autres péricopes lucaniennes : il existe d'autres « personnages susceptibles d'être exclus du plan de salut divin et pourtant accueillis dans le Royaume » (p. 145) : la pécheresse de Lc 7,36-50 à qui Jésus fait miséricorde au risque du scandale ; le lépreux samaritain de Lc 17,12-19 ; le crucifié à qui Jésus promet le paradis : c'est ici l'heure de la pure espérance.
La rigueur de l'analyse s'allie à des intuitions théologiques assumées pour faire de ce bel ouvrage un savoureux compagnon de route, afin de méditer l'évangile de la miséricorde. - F. Odinet

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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