Diego Laínez s.j. primer biógrafo de S. Ignacio

A. Alburquerque
Biografie - reviewer : Bruno Clarot s.j.
Ce livre est d'abord une biographie de Lainez, laquelle occupe la moitié du volume, puis rapporte en quarante pages ses souvenirs sur Ignace et ses premiers compagnons. Lainez (1512-1565) naquit dans une famille aisée du León. Il avait des ascendants juifs, mais les Espagnols s'opposèrent fermement à ce qu'on le fît savoir dans sa biographie, car cette nouvelle aurait fait trop de tort à la Compagnie en Espagne. Ce pays était alors affronté au drame des «marranes», ces Juifs qui, en 1492, mis devant l'obligation de se convertir ou de partir, ne sachant où aller ou ne voulant pas perdre tous leurs biens, firent semblant de se convertir et devinrent parfois prêtres et même évêques. Cette découverte secoua les Espagnols et jeta la suspicion sur tous les Juifs «convertis». Pour sa part, Lainez ne nia jamais ses origines juives.
Étudiant à Alcalá avec son ami Salmerón, il entendit parler d'Ignace ex-étudiant d'Alcalá passé à Paris et les deux amis décidèrent d'aller le rejoindre en France. Ils firent les Exercices sous sa direction et s'adjoignirent aux cinq premiers compagnons. Diego étudiait avec acharnement et accumula une science considérable qui lui fut très utile dans ses sermons, dans ses discussions avec les protestants, au concile de Trente et au colloque de Poissy. Ignace estimait Lainez et voyait en lui son successeur, ce qui ne l'empêcha pas de le traiter rudement. Envoyé à Trente comme Légat du Pape, Lainez s'opposa à la double justification défendue par l'augustin Séripando et approuvée à Ratisbonne. Ignace ne put le ramener à Rome tellement on avait besoin de ses lumières à Trente.
Lainez fonde un collège à Florence, réforme le diocèse de Monreale en Sicile, fait renvoyer une Abbesse scandaleuse, est aumônier de la marine sicilienne pendant une expédition de quatre mois. Il doit repartir à la deuxième session de Trente. Ses interventions brillantes font une excellente réclame pour la Compagnie. Il devint Provincial d'Italie en 52. À la mort d'Ignace en 1556, les profès de Rome le nomment Vicaire Général. Le Pape Paul IV l'accueille très mal et menace la compagnie. Il veut imposer le choeur monastique aux jésuites et limiter le généralat à trois ans avec possibilité de réélection (notons que Fr. de Borgia et les Espagnols voulaient aussi le choeur). Lainez fut élu Général en 58 et le Pape mourut réconcilié avec la Compagnie. Son successeur Pie IV fut très favorable à la Compagnie. Appuyé par l'avis de canonistes, Lainez jugea que des ordres verbaux du Pape n'obligeaient plus après la mort de celui-ci; il supprima donc le choeur et fit approuver par les profès le Généralat à vie selon les Constitutions. Le Pape l'envoya au Colloque de Poissy, en France, pour affronter les calvinistes, puis à la dernière session de Trente où l'on discuta entre autres du sacrifice de la messe. En 63, à la fin du concile, Lainez rentre malade à Rome et meurt en 56.
Puis vient la seconde partie de l'ouvrage consacrée aux débuts de la Compagnie. En mars 47, Polanco, choisi par Ignace comme secrétaire de la Compagnie, comprend l'importance d'une bonne connaissance des origines de son Ordre. Il écrit donc aux premiers compagnons de lui envoyer le récit de leurs souvenirs sur ce point capital pour l'esprit de la Compagnie. Lainez, alors présent au concile transféré à Bologne, se met aussitôt à l'ouvrage et envoie ses «mémoires» en juin. De son côté, Polanco rassemble en un tout les nouvelles qui lui proviennent d'autres sources. Ce livre met en regard les deux textes disposés en deux colonnes par page. Souvent le texte de Lainez présente des blancs, là où le récit de Polanco est plus complet; puis les trente dernières pages du document ne contiennent plus que le texte de Polanco et relatent les missions des jésuites en Italie et ailleurs, après les voeux solennels prononcés à Saint-Paul-hors-les Murs en 1541. C'est assez intéressant, mais on y retrouve en gros le récit qu'Ignace fera plus en détail en 1555 à Consalve de Camara, à part l'éloge final d'Ignace par Lainez.
On connaît assez parfaitement la vie d'Ignace, mais on parlait peu de Lainez, son successeur. Cet ouvrage comble cette lacune et fait saisir la valeur de cet homme qui dut se plier aux exigences de ses différents «supérieurs» qui avaient besoin de ses éminentes qualités et le firent voyager de tous côtés. - B. Clarot sj

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