Si le sous-titre de l'ouvrage est sans conteste pertinent et ne
peut qu'attirer l'attention en un temps où la « laïcité » est au
centre de bien des débats, il n'en demeure pas moins qu'il ne peut
à lui seul résumer la vie de F. Buisson (1841-1932). Celui-ci
eut en effet un parcours pour le moins foisonnant. Qu'on se reporte
à la table des matières, et l'on n'aura guère de peine à voir que
B. fut, si l'on peut dire, de tous les combats de la France
depuis le Second Empire. Fortement imprégné du protestantisme
libéral et de la société de la Suisse où il vécut pendant plusieurs
années afin de ne pas devoir faire allégeance au régimede
Napoléon III, cet agrégé de philosophie refusa d'abord
d'entrer dans la grande maison de l'Université pour se consacrer à
l'école primaire qu'il entendit, avec un Jules Ferry, laïciser,
avant de devenir prof. de pédagogie à la Sorbonne, et plus tard
encore d'intervenir dans l'organisation de l'enseignement
professionnel. Il s'impliqua dans la rédaction de la loi de 1905,
prit le parti de Dreyfus, lutta pour le droit de vote des femmes,
oeuvra au rapprochement franco-allemand, souhaitant que la Société
des Nations soit une référence incontournable dans la vie du monde,
et une plus grande justice sociale fit partie de ses
préoccupations. À cela s'ajouta une assez importante activité en
fait de publications et de conférences dans le chef de celui qui
reçut le prix Nobel de la paix en 1927.On aimerait, au terme de la
lecture, pouvoir qualifier Buisson, tant ses sources d'inspiration
furent multiples et variées. Sans doute l'A. a-t-il trouvé la
formule juste telle qu'il l'exprime en fin de vol. : « dans
quelques siècles, lorsque tant de dates et de noms seront retombés
en poussière, on peut parier que ceux de presque tous les ministres
qui ont dirigé l'instruction publique dans le dernier quart
du XIXe siècle se seront effacés, mais que
Ferry et Buisson resteront comme deux pierres blanches dans la nuit
de l'oubli, avec un Guizot, un Condorcet, un La Fontaine, un
Port-Royal. C'est aussi que Buisson à lui seul est un pluriel :
celui des écoles pour un peuple qui savait trouver en elles, et
nulle part ailleurs, son « ascension » » (p. 393).
« Pluriel » : Buisson le fut à coup sûr ! -
B. Joassart s.j.