Il cammino dell'uomo. L'itinerario spirituale di Kahlil Gibran
Edoardo ScognamiglioSpiritualità - reviewer : Bruno Clarot s.j.
Gibran est toujours resté imprégné par son pays, sa culture arabo-chrétienne et sa cohabitation avec des musulmans. Il se considérait comme le porte-parole du Liban à l'étranger et restait ouvert à toutes les religions. Son oeuvre en arabe a fortement influencé et renouvelé la littérature et la poésie arabes. C'est toutefois l'élément religieux qui domine son oeuvre.
Scognamiglio, franciscain et docteur en théologie, note qu'on s'est jusqu'ici limité à l'étude littéraire ou philosophique de cette oeuvre imposante alors que Gibran se sert de la littérature et de la poésie pour exprimer sa vision religieuse personnelle et pour faire émerger des caractéristiques chrétiennes trop oubliées à son époque. Cet ouvrage est donc la première tentative de synthèse religieuse d'une oeuvre importante lue dans le monde entier par des hommes de tout bord. L'A. Présente d'abord le milieu culturel de Gibran, sa biographie, son oeuvre littéraire pour découvrir sa vision de l'homme, de Dieu et de la religion. C'est cet itinéraire spirituel qui l'intéresse d'abord. L'ouvrage comporte cinq parties: le vécu et l'expérience de Kahlil à partir de ses racines libanaises, sociales et religieuses; sa place dans la littérature arabe, les influences subies, son originalité; son anthropologie; son passage de l'anthropologie à la théologie avec la révélation de Dieu et sa venue chez l'homme; l'itinéraire spirituel que tout homme peut et doit effectuer pour rencontrer Dieu et réussir ainsi pleinement sa vie.
Dans ses conclusions, E.Sc. résume cet itinéraire spirituel et théologique où se rencontrent les chemins de Dieu et de l'homme avec le rôle important de l'Esprit Saint; puis il note que Gibran n'affirme pas clairement le primat du Christ et sa divinité pour laisser la porte ouverte au dialogue interreligieux et ne pas réveiller les antagonismes du Liban. Au positif, il souligne que Kahlil a contribué au réveil culturel, social et politique du Moyen-Orient. En effet, il a tenté de libérer le christianisme maronite du corset des dogmes trop étroits pour montrer la présence de Dieu et son action en tout homme, par-delà les divisions religieuses. En le lisant, on sent un homme qui a vraiment fait l'expérience de Dieu et nous pousse à faire très librement cette même expérience. La voie mystique relativise les problèmes dogmatiques et donne la primauté au Saint-Esprit qui souffle où il veut et comme il veut. Sur ce chemin spirituel, nous retrouvons l'essentiel de la foi chrétienne: l'histoire du Fils, nouvel Adam, l'amour du Père et l'action de l'Esprit.
Assurément cette voie est délicate mais très riche de l'expérience religieuse qui seule permet de commencer un vrai dialogue interreligieux. Mais sommes-nous préparés à entamer cette voie exigeante? Par ailleurs, n'oublions pas que Jésus lui-même n'a pu révéler que très lentement sa vraie personnalité. Quand on voit l'audience énorme de ce poète, on peut difficilement récuser sa méthode qui est celle de précurseur et qui appelle des prolongements. - B. Clarot, S.J.