Juifs et chrétiens. Repères pour dix-neuf siècles d'histoire
Béatrice de VarineReligioni - reviewer : Alban Massie s.j.
Il est dommage de n'avoir pas tenu compte des développements récents de la recherche sur ce point, ne serait-ce que dans l'ouvrage de P. Fredriksen (2005) qui voit dans la pensée augustinienne «a christian defense of Jews and judaism» et non une «dangereuse théologie», comme l'écrit B. de V. À dire vrai, il conviendrait de moins mettre en cause l'héritage augustinien que les héritiers eux-mêmes, qui choisirent au Moyen-Âge de lire les interprétations allégoriques de leur maître sans tenir compte de sa théologie de l'histoire et passèrent de la critique théologique - souvent directement tirée des mots mêmes des Écritures - au rejet social des juifs réels. Il nous paraît vraiment dommage que ce chapitre n'ait pas été traité avec plus de soin, dans la mesure où Augustin est considéré encore souvent comme le père de l'antisémitisme chrétien: l'A. rappelle la Cité de Dieu, mais en cite un extrait faussement, à partir d'un résumé (et la réf. biblique,p. 121, n'est pas Rm 11,11 mais Ps 58,12). L'A. reconnaît que ce qu'il y a de déplaisant chez Augustin se trouve chez ses devanciers. Il ne faut pas oublier que la théorie augustinienne du «témoignage» a servi de base à saint Bernard pour protéger les juifs des exactions des croisés, comme l'écrit l'A. (cf. p. 203-204). Il reste que cet ouvrage, dont la préface est de J. Dujardin et la postface deR. Marciano, sera très utile pour ceux qui veulent suivre cette difficile histoire qui a connu heureusement un renouvellement complet à Vatican II. - A. Massie sj