Même en situation de pluralité religieuse, la solution de facilité
consiste à étudier les différentes traditions comme des isolats ou
en parallèle plutôt qu'à examiner les interactions voulues ou
subies, réfléchies ou peu conscientes. La société coréenne connaît
depuis fort longtemps une telle pluralité : le pari de la
dizaine de chercheurs (coréens pour la plupart) qui collaborent à
cet ouvrage est de privilégier l'étude des relations mutuelles
(conflit, accommodement, assimilation…) entre bouddhisme,
confucianisme, catholicisme et protestantisme (l'absence des
traditions animistes et du chamanisme est une lacune reconnue par
les auteurs). À vrai dire, seuls 2 chap. sont consacrés aux
rapports de complémentarité mais aussi aux tensions entre
bouddhisme et confucianisme, depuis plus de 15 siècles. L'une
de ces études propose une importante correction de
perspective : durant la période Koryo
(xe-xive s.), généralement considérée
comme imprégnée par le bouddhisme, le confucianisme était déjà,
contrairement à une opinion courante parmi les historiens, fort
influent au plan de l'État, avant même qu'il ne devienne
prépondérant, à partir du xve s., sous la
forme du « néoconfucianisme ».
Les 8 autres chap. concernent la période depuis la fin
du xviiie s. Ils privilégient les interfaces
complexes entre le confucianisme et les deux formes de
christianisme qui s'introduisent successivement dans le pays :
conceptions de l'éthique et du pouvoir, de la liberté et de la
responsabilité ; rapport de l'individuà la société ;
statut de la femme ; conceptions du divin et de
l'au-delà ; jugement théologique et attitude pastorale à
l'égard de la culture traditionnelle et des religions présentes
dans le pays. La dernière contribution souligne l'urgence, pour les
chrétiens en particulier, de repenser leur identité coréenne à la
lumière de cette pluralité religieuse mais aussi des
transformations rapides induites par la globalisation. -
J. Scheuer s.j.