Cet essai, réactif à la vague médiatique sur Jésus le Juif comme à
une certaine métaphysique, entend mettre en évidence un acte de
naissance gréco-romain du christianisme. Le Christ des Évangiles
serait une construction du génie hellénistique; son succès
viendrait d'un tour rhétorique, tragique, romanesque; de
l'imitation du mythe et des anciens, en vogue dans l'antiquité.
L'A. ne cache pas son fonctionnalisme: il parle d'une propagation
de croyance. En qui? En quoi? Là n'est pas la question, mais que la
fiction évangélique soit performante; persuasive, cathartique,
universelle. Les qualificatifs antiévangéliques (piège, captation,
prise d'otage…) dévolus à ce que l'A. définit comme le «coeur de la
foi», oblitèrent sa proposition. Le chapitre 5 affirme une dette du
christianisme envers rite et sacré du droit romain, et la
légitimation, par héritage des attributs impériaux, du messie juif
crucifié. La pointe de notre critique porte sur le propos historien
de l'A. Il est expéditif sur les traditions, sources et rédactions
du NT; tranché sur une réalité linguistique et culturelle complexe
(ex: impasse sur le judaïsme hellénistique); incohérent dans son
traitement du judaïsme et de la Bible (tour à tour écartés, puis
utilisés). Sa conception de l'histoire est parfois un brin
positiviste. On note des anachronismes (sur la liturgie
eucharistique, le péché originel)… Cela ne contribue pas à faire
reconnaître les ressorts de la culture grecque mobilisée dans la
rédaction du NT. On regrette aussi les pages peu convaincantes où
l'A. veut caractériser les grandes logiques religieuses anciennes.
Le ton outrancier peut plaire au public non croyant. Le théologien
ou le catéchète ne peuvent s'y rendre. - M.O. Gruson, Univ. Cath.
Lille