En cela, l'A. détecte à juste titre « l'influence décisive» de l'intelligence de l'Écriture chez Origène d'Alexandrie, à laquelle le P. de Lubac avait consacré un de ses ouvrages majeurs en 1950. Il a donc pris le parti de considérer le corpus lubacien «dans son unité», en s'inspirant de la doctrine des quatre sens de l'Écriture, que le P. de Lubac avait remise en honneur dans les quatre volumes sur l'Exégèse médiévale, qui lui ont révélé, nous confie-t-il, «la synthèse christologique proprement lubacienne». L'A. nous dit aussi avoir trouvé cette «ouverture au mystère du Christ en la théologie du P. de Lubac» en prenant connaissance d'un article paru en 1941 dans une brochure de la Collection Témoignage chrétien: La Lumière du Christ, repris ensuite, dans Affrontements mystiques. Il constate qu'il s'agit d'un «parcours christologique»: «Dans le Christ, le coïncidence de la plénitude de la révélation, de la connaissance de Dieu et de son dessein, ouvre au coeur de l'histoire (…) l'ère nouvelle, l'ère «dernière», c'est-à-dire l'eschatologie.
Il poursuit au chapitre II, en considérant le fait que, si le mystère du Christ se lit à travers une histoire «comme le geste de la charité», ce geste porte en lui une intelligence qui n'est déjà plus de la pure histoire», comme le suggère le titre de ce chapitre: «La théologie, intelligence du «fait du Christ». L'A. consacre plusieurs pages à la référence privilégiée du P. de Lubac au «paradoxe», dans lequel il voit - comme le suggère M. Blondel - «la forme propre de la recherche du mystère». «Parce que Jésus est divin, tout divin, il peut être humain, tout humain. En dehors de la réalité de ce paradoxe, il n'est qu'humanisme s'érigeant en absolu, ou divinité négatrice de l'homme» (p.120). L'étude du Verbe incarné exige celle du Christ rédempteur», ce que développe le 2e Partie de l'ouvrage: «La sotériologie, intériorisation du mystère». Ainsi que le constate également l'A.: «Pas plus qu'il n'a élaboré de théologie de la création en tant que telle, le P. de Lubac n'a systématisé sa pensée sur la création. Il a pourtant, en s'appuyant sur Jean Scot Érigène, éclairé d'une manière originale en plusieurs de ses oeuvres la création en tant que théophanie (chap. IV). Le chapitre suivant (V) est consacré au Christ Rédempteur. L'A. aborde ensuite (VI) ce qu'il appelle, d'une manière qui lui est plus personnelle, «le Mystère dialogique du Christ, qui, estime-t-il, «convertit la théologie du P. de Lubac en théologie dialogale», laquelle affronte deux défis: l'athéisme occidental et le bouddhisme.
Enfin, au-delà de la sotériologie du Verbe incarné, la 3e partie de cet ouvrage s'ouvre à «la recherche du point focal de la christologie: la révélation de «la gloire qui est promise: celle du Verbe incarné» dans laquelle «la doctrine des quatre sens de l'Écriture s'achève et trouve son unité» (Chap. VIII-IX). «Ainsi, conclut l'A., «le P. de Lubac nous rappelle que l'on ne peut approcher le mystère du Christ qu'en considérant l'ensemble de ses dimensions, comme fait historique, intelligible, qui apporte le salut et la Gloire définitive. Telle est l'apport en théologie de l'oeuvre de cet immense théologien.» On ne peut que se réjouir, ajouterons-nous, qu'il ait trouvé un si fidèle interprète. - P. Lebeau sj