L'A. nous convie à la rencontre d'une personnalité aux facettes
pour le moins contrastées (indépendamment des derniers
rebondissements survenus dans le cadre de son éventuelle
béatification du fait de ses positions à l'égard des Juifs).
L'opposition de son père lui interdit d'entrer au séminaire au
sortir de l'enseignement secondaire, ce qui l'amena à étudier
préalablement le droit jusqu'au doctorat. Formé au séminaire
français de Rome, où il est ordonné prêtre en 1868, et après avoir
eu l'occasion de participer au Concile Vatican I comme sténographe,
le voilà nommé vicaire à Soissons, ville industrielle. Ultramontain
sans excès, refusant le gallicanisme «habituel» de la France, grand
voyageur, il s'intéressera à diverses grandes questions se posant
alors à l'Église, spécialement tout ce qui touche ses rapports avec
la société moderne. Il se fera un ardent défenseur de la doctrine
sociale de l'Église élaborée alors sous l'impulsion de Léon XIII,
soutiendra la Démocratie chrétienne, tout comme il collaborera au
dossier qui devait aboutir à la condamnation de l'Action française.
Cet intellectuel - soucieux d'une formation sérieuse pour le clergé
- avait aussi son côté mystique. Encore que dans ce domaine, les
choses connaîtront un cours plutôt cahotique.
Attiré très tôt par la vie religieuse sans trouver un Ordre qui
corresponde à ses aspirations, il sera rapidement fasciné par la
dévotion au Sacré-Coeur, plus particulièrement dans son aspect
victimal qu'il voudra inscrire comme priorité dans sa future
congrégation des Prêtres du Sacré-Coeur. Cela lui vaudra bien des
tracasseries, tant de la part de ses évêques successifs que du côté
de Rome, y compris au Saint-Office. Et les difficultés seront
renforcées par ce que l'on pourrait appeler un manque de jugement
sur les personnes auxquelles il accordait sa confiance et qui
n'étaient peut-être pas toutes les plus aptes à le seconder.
À travers ce portrait tracé avec toute la sympathie requise mais
sans complaisance, l'A. nous permet d'approcher plus d'un
demi-siècle de l'histoire de l'Église de France - et bien sûr celle
de l'Église universelle - marquées par tant de contrastes. - B.J.