L'ouvrage de l'ancien prof. à la Fac. de philosophie de l'Inst.
cath. de Toulouse porte sur la matière qu'il y a enseignée, la
métaphysique, et sur un thème qui lui est cher, l'analogie de
l'être. Il part d'une question technique interne à l'École :
l'analogie de l'être est-elle d'abord une
analogie de proportionnalité, à quatre termes (Cajetan, Maritain,
etc.) ou une analogie d'attribution (ou de proportion, à trois
termes : Montagnes, Gilson, etc.) ? Il reprend le dossier
historico-doctrinal instruit par Bernard Montagnes, dans sa thèse
décisive de 1963 (rééditée en 2008), et en épouse pleinement la
proposition : après avoir adhéré au primat de l'analogie de
proportionnalité, Thomas l'abandonne, à cause du péril d'univocité
qu'elle fait courir à la relation entre Dieu et la créature (la
saisie de la proportionnalité suppose un concept englobant qui fait
franchir la différence du fini à l'infini), et lui préfère
l'analogie d'attribution qui maximise la distance sans pour autant
la rendre équivoque. L'originalité d'Yves Floucat est, après une
prise de position sur l'onto-théologie heideggérienne
(1re partie), de convoquer l'enseignement du père
Courtès relatif à la primauté du principe de
non-contradiction versus celle du principe
d'identité (2e partie). Il peut alors proposer sa
démarche qui fonde doublement l'analogie d'attribution, au plan
prédicamental, sur la relation substance-accident, et au plan
transcendantal, sur l'aliquid, c.-à-d. sur la différence
entre l'un et l'autre (3e partie).
Composé de trois articles et d'une préface, l'ouvrage, entièrement
refondu, n'en est pas moins assez unifié. L'on retrouve les maîtres
qui inspirent la pensée d'Yves Floucat - Jacques Maritain, à
l'égard de qui il prend une heureuse distance sur la question de
l'analogie, et les trop méconnus André de Muralt et Heinz R.
Schmitz -, et les thèmes qui lui importent - la mystique
d'immanence, comme clé de lecture notamment de la modernité,
l'importance du transcendantal aliquid, etc. La
lecture de ce dense ouvrage de métaphysique est roborative, la
thèse salutaire. Un (petit) regret : que ne soit pas convoquée
la référence à la « major dissimilitudo »
affirmée par le concile de Latran IV (DZ 804), qui résume
si bien la doctrine de Thomas et qu'il n'a pu ignorer. À quand une
étude sur la place de cette parole magistérielle dans la
métaphysique thomiste ? - P. Ide