Rayonnement de la paternité. Théâtre, trad. Y. Semen.
Karol WojtyłaArte e letteratura - reviewer : Christophe Cossement
Devenu prêtre, le futur pape se consacrera au fil des années à trois pièces majeures qui forment comme un triptyque : Frère de notre Dieu, rédigée entre 1944 et 1950 ; La boutique de l'Orfèvre, parue en 1960 ; Rayonnement de la paternité, publiée en 1964, au moment où il devient archevêque de Cracovie. La 1re pièce explore laquestion de la vocation humaine, la 2e se penche sur le sacrement de mariage et ses péripéties, tandis que la 3e fait culminer ces réflexions dans une méditation sur le mystère de la paternité, « dont l'acceptation ou le refus constitue l'enjeu fondamental de toute vie humaine et engage l'avenir du monde » (préf. Y. Semen).
Dans une 1re partie, le personnage principal, Adam, prend la mesure de la mission donnée par Dieu de « porter la paternité » à son image, alors qu'il aurait préféré se contenter de la fertilité. Il faut choisir d'être père, et cela expose à la souffrance que porte avec lui tout amour vrai. Le père devient dépendant à l'égard de Dieu et aussi à l'égard de l'enfant.
La 2e partie approfondit le thème de la paternité assumée sous cet angle du « donner naissance par choix ». L'enfant interpelle son père et le conduit à accepter l'ampleur de sa paternité. S'ensuit une méditation impressionnante au sujet du terme « mien » : accepter qu'un enfant soit « mien », être responsable de sa vie, tout en respectant le sanctuaire de son univers intérieur. Et aussi entrer dans le don véritable de soi-même.
La 3e partie de la pièce met en scène la mère, dont l'amour fait advenir - à travers bien des incompréhensions - l'époux et le père. Une question demeure en suspens : « l'homme choisira-t-il la paternité dans la reconnaissance de la paternité universelle de Dieu ou la construction d'un monde à l'image de sa solitude » ? La lecture de Rayonnement de la paternité nous plonge dans un univers inédit et interpellant, où le sens des mots s'amplifie et renouvelle le regard. Une expérience à tenter avec cette première trad. que nous devons à Yves Semen, spécialiste de la « théologie du corps » de Jean-Paul ii. - C. Cossement