La réflexion contemporaine est revenue à plusieurs reprises sur le
thème du 'sacrifice', sans doute à la faveur d'un regain d'intérêt
pour la phénoménologie du don. Mais déjà en 1899, un quart de
siècle avant son célèbre « Essai sur le don », M. Mauss
avait écrit avec H. Huber, l'un et l'autre étant disciples de
Durkheim, une étude sur le sacrifice qui entrait en discussion avec
d'autres études, anglo-saxonnes essentiellement, qui avait tenté à
l'époque d'analyser le sacrifice en prenant le point de vue des
sciences humaines naissantes. Mauss et Huber se distinguent
cependant de ces recherches en montrant la structure formelle et
opératoire du sacrifice plutôt que les grandes étapes de son
évolution à travers les siècles. Leur point de vue est plus
synchronique que diachronique, dirait-on après De Saussure.
Contrairement à certains ethnologues qui voyaient dans le sacrifice
une manière de sécularisation, le sacrifice consiste pour eux «à
établir une communication entre le monde sacré et le monde profane
par l'intermédiaire d'une victime, c'est-à-dire d'une chose que
l'on détruit au cours d'une cérémonie» (86). L'ouvrage analyse
chacun des éléments indiqués là, le sacrifiant, le sacrificateur
(c'est-à-dire celui qui opère le sacrifice au nom du peuple qui
l'offre et qui est le véritable 'sacrifiant'), la victime, le lieu
et les instruments du sacrifice. Les auteurs font aussi varier leur
schéma en fonction des diverses finalités du sacrifice qui
déterminent aussi bien le sacrifié que le sacrifiant. Le dernier
chapitre traite du sacrifice de dieux, concluant brièvement à
propos de l'eucharistie (non sans ramener l'originalité chrétienne
aux structures universelles du sacrifice) qu'elle est le «sacrifice
le plus instructif qu'on puisse trouver dans l'histoire» (83).
L'ouvrage se termine par deux index (thèmes traités et auteurs
cités). - P. Gilbert sj