P. Coda est un spécialiste de Hegel, mais poursuit le thème de la
théologie de Boulgakov (1871-1944) depuis de longues années (cf. la
p. 176 de la courte bibliographie des p. 173-178, qui signale la
bibliographie exhaustive établie par K. Naumov). Il présente de
manière vivante et richement informée la carrière étrange de cet
économiste marxiste, intéressé par le droit (ces deux disciplines
sont comme la matière et la forme de toute société), qui retrouve
la foi vers les 30 ans suite à ses tentatives de critiquer Marx par
Kant, et suite surtout à ses contemplations mystico-esthétiques de
la nature ou de l'art, alliées à un profond sens spéculatif et
religieux. L'A. attribue à la perte d'un enfant de 4 ans en 1909,
le début de la réflexion de Boulgakov sur la sagesse de la croix
(p. 21). Lors de la révolution de 1917, il est quasi au faîte de sa
carrière à l'Université de Moscou, et l'année suivante, il est
ordonné prêtre orthodoxe (p. 23). Mais il est déçu par la tournure
des événements et malgré ses convictions marxistes, regrette l'ère
tsariste. Bientôt, il prend la route de l'exil pour arriver, via la
Crimée, Constantinople et 7 années d'errance, à Paris en 1925, à
l'âge de 54 ans. C'est là seulement qu'il commence sa carrière de
théologien à l'Institut Saint-Serge, dont il deviendra doyen
jusqu'à sa mort en 1944. Sa prodigieuse production théologique,
fruit d'un génie créateur étonnant, date de cette dernière période
de sa vie. On connaît ses deux trilogies: Le buisson ardent (1927),
L'ami de l'époux (1928) et L'échelle de Jacob (1929), mais surtout
la seconde, beaucoup plus importante, sur la divino-humanité, et
qui s'intitule La Sagesse divine et la Théanthropie: Du Verbe
incarné. L'Agneau de Dieu (1933), Le Paraclet (1936) et L'Épouse de
l'Agneau. La création, l'homme, l'Église et la fin (1945). C.
Andronikov en fut l'infatigable traducteur en français. C'est
Graziano Lingua qui traduit ici l'inédit Capitoli sulla
Trinitarietà (p. 67-171), matrice de la grande triologie. Ce texte
a paru uniquement sous forme de deux articles en russe (1928 et
1932), puis en traduction allemande (1936 et 1945), jamais comme
texte unifié ni en aucune autre langue. Il cherche à interpréter la
théologie trinitaire à partir du problème de l'auto-révélation de
l'Absolu. Voici quelques titres, parmi ces 13 courts chapitres:
Dieu comme sujet absolu, le Je trihypostatique, la Trinité comme
triplicité des corrélations, trihypostaticité et unité de
l'essence. - B. Pottier sj