Étienne Grenet, prêtre parisien, enseignant à la fac. Notre-Dame et au Collège des Bernardins, reprend « sous une forme simplifiée » (p. 674) sa thèse de doctorat soutenue à l’Univ. de Fribourg (Suisse), et nous livre un véritable trésor. Une première approche, fort instructive, rassemble les formes lexicales du « je », s’interroge sur l’identification spontanée au « je » psalmique, expose la méthode prosopologique, et enfin rapproche l’unité du « je » et l’unité du psautier. Une deuxième partie nous propose alors la traversée du livre à la recherche de l’unité du « je » ; tout d’abord en découvrant la cohérence du « je » à l’épreuve du mal : de l’innocence revendiquée à la dénonciation de l’injustice en passant par l’aveu du péché ; ensuite en relevant l’union et la distinction des personnes, et par suite l’élaboration relationnelle de la riche figure du « je ». Ce sont surtout les livres i et ii du psautier qui sont scrutés, mais la conclusion qui affirme l’unification du « je » comme une fonction du psautier et qui présente les prières de David comme une double expérience messianique, s’ouvre à la suite du psautier (livres iii-v), et s’achève avec la question christologique : et si un « je » innocent prie les psaumes ?

La lecture de l’ouvrage est quelque peu ardue, notamment en raison du recours à l’hébreu, traduit en note pour les versets psalmiques, mais venant parfois directement dans le texte ; et aussi en raison d’une recherche très fouillée et d’une pensée complexe comme peut l’être celle d’une « tête chercheuse ». Le plus étonnant est d’avoir réussi, grâce à la méthode prosopologique, à unir les trois grandes dimensions du psautier qui parfois restent juxtaposées les unes aux autres, ou même séparées les unes des autres selon les exégètes. Le promoteur de la thèse, le fr. Philippe Lefevre o.p., explique dans sa préface : « Notre auteur donne à la méthode qu’il utilise une portée nouvelle. Il essaie de penser l’interaction de ces deux unités que sont celle du « je » et celle du recueil où il apparaît. Tout en respectant le foisonnement du texte des psaumes, il nous aide à discerner trois dimensions anthropologiques du “je” qui permettent de rassembler le livre autour de ce centre irradiant du « je » : 1) “la voie affective : entrer dans la louange” ; 2) “la voie sapientielle : entrer dans l’intelligence spirituelle” ; 3) “la méditation historique : entre dépassement et accomplissement de la médiation davidique” […] Dans la fluidité des textes et la discontinuité des psaumes un « je » enraciné nous apparaît qui devient instance de compréhension d’une histoire allant vers sa fin » (p. v). Ainsi sommes-nous renvoyés au chemin de la prière psalmique, lorsque, tout à la fois, notre propre personne, le peuple de Dieu – Israël – symbolisé dans la figure du roi, et l’Église en tant que Corps du Christ, se trouvent unifiés par la prière du psautier – Parole de Dieu. Non pas chemin de progression narrative à notre propre mesure, mais cheminement d’ouverture à la simplicité de Dieu, selon les paroles de l’A. lors de sa lumineuse présentation de soutenance de thèse : « En “verticalisant”, dans le présent de la prière, “l’horizontalité” inhérente à la chronologie, le psaume se révèle tout entier au service de ce dévoilement d’une action divine salvifique au cœur de la vie de David – et du fidèle. En ce sens, le présent du psaume confine à l’éternité. Il donne à voir que Dieu « est à l’œuvre », maintenant et toujours. Que son œuvre est unifiée. Que son action est une » (cf. <https://www.paris.catholique.fr/l-unite-du-je-psalmique-lecture.html>). — V. Fabre

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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