En reparcourant « l'itinéraire d'une conversion » (chap. 1),
que Bouyer avait raconté dans Du Protestantisme à
l'Église, Le Métier de théologien et
ses Mémoires, Bertrand Lesoing, prêtre de la
communauté St-Martin, fait de manière heureuse du neuf et de
l'ancien : il met au jour pour la première fois plusieurs lettres
très éclairantes de Bouyer à Congar et à Clément Lialine, ainsi que
de nombreux extraits du Journal tenu à l'époque
par le jeune étudiant en théologie protestante, intérieurement
tourmenté par la question de l'Église indivise. Les
2e et 3e chap., « Principes
catholiques de l'oecuménisme » et « Du protestantisme à l'Église »,
mettent en place tous les fondements de la belle intuition de l'A.,
confirmée là encore par l'exploitation de gisements bouyériens
nouveaux (lettres, agendas, notes préparatoires au concile
conservées aux archives secrètes du Vatican) : il s'agit en effet,
dans cette thèse défendue à l'Univ. du Latran, de puiser d'une
manière innovante dans la pensée de Bouyer pour donner une nouvelle
impulsion au mouvement oecuménique menacé aujourd'hui par la
stagnation. « Sur les chantiers oecuméniques » (chap. 4), des
plus visibles aux plus humbles, l'oratorien contribue en effet à
écrire pendant plus d'un demi-siècle « certaines des pages les plus
décisives de l'histoire du mouvement oecuménique », en mettant en
oeuvre ses « principes catholiques de l'oecuménisme », qu'il sait
approfondir et corriger au besoin, « préparant ainsi leur plein
épanouissement et réception dans sa grande oeuvre théologique »
(p. 190). Le chap. final, « Une théologie pour
l'oecuménisme », recueille brillamment les fruits d'un travail de
recherche aussi minutieux qu'agréable à lire, et dont le but est
ambitieux : découvrir dans les grandes trilogies de Bouyer « une
nouvelle clé oecuménique » (p. 310). D'une vision
ecclésiologique trop étroite et parcellaire, le champ de vision
s'élargit alors aux dimensions mêmes du dessein de Dieu et de
l'orientation essentiellement eschatologique de l'Église : « Dans
un oecuménisme de plénitude déployé sur un horizon sapientiel,
Bouyer met en lumière de nouveaux champs de recherches pour
restaurer l'unité chrétienne ». Parmi ces nouveaux « lieux
oecuméniques » mis en lumière par Bouyer et heureusement présentés
par l'A. : « la vie spirituelle, l'humanisme, la question du cosmos
et l'eucharistie » (p. 312). - M.-D. Weill c.s.j.