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L'amour de Dieu ne meurt jamais. La sainteté des divorcés remariés dans l'Église

La sainteté des divorcés remariés dans l’Église

Alain Mattheeuws s.j.
L'amour peut-il être sauvé? Les questions relatives au statut des divorcés remariés dans l'Église (remariage, communion eucharistique) ne pourront être résolues si on fait abstraction, comme c'est le cas trop souvent, de l'économie sacramentelle et spécialement du lien du Christ avec son corps, sacrement du salut pour le monde. L'art. relit les déterminations magistérielles et les débats récents sous cet angle. Il présente alors le chemin de sainteté possible des divorcés remariés: l'amour de Dieu ne meurt jamais.

Peine et révolte pèsent lors des rencontres pastorales avec des divorcés remariés. De fait, des ambiguïtés existent souvent dans la relation entre ces couples et les prêtres qui les accueillent, face à la demande explicite de l’Église catholique de ne pas célébrer un second mariage liturgique et sacramentel. De part et d’autre, tous souffrent. Comme chrétiens et comme pasteurs, osons-nous regarder l’ampleur de cette souffrance et nous interroger sur son sens ? Si la problématique se réduit à une discipline et à des normes, nous ne pouvons que rester dans une impasse. Or il ne s’agit pas d’abord d’une question morale ou juridique, mais d’une épreuve de l’amour. Comment éviter d’être dans un camp ou dans un autre quand il faut donner un avis sur ces points ? Comment sortir des dialectiques d’opposition, du tout ou rien, ou d’un consensus purement formel ou disciplinaire ? L’amour humain peut-il être sauvé ? Comment doit-il être sauvé ? Comment pratiquer la miséricorde attendue ? Plus précisément, la réflexion pastorale sur l’accueil des divorcés remariés exige une meilleure compréhension de l’économie sacramentelle et de l’ordre des vertus théologales : foi, espérance et charité.

D’autre part, nombreux sont les divorcés remariés qui refusent de ne plus pouvoir communier lors des eucharisties auxquelles ils participent, souvent fidèlement. Les explications données ici et là ne sont pas entendues1. On voudrait surmonter les contradictions que le lien conjugal nouveau pose objectivement avec la promesse du premier et unique sacrement de mariage et avec le signe réel du corps et du sang du Christ présent dans l’eucharistie et se donnant à son peuple2. Alors que les divorcés remariés appartiennent, de fait et de droit, à la communauté chrétienne — elle compte sur eux pour la prière, les sacrements, le témoignage et le service de la charité dans l’Église et dans le monde —, la demande qui leur est faite de ne pas communier est traduite, le plus souvent, comme « ne plus être dans la communion de l’Église » (excommunication) : ce qui est faux. On dira alors que la participation à la messe, l’écoute de la Parole, la prière commune et les services qui signifient le don de soi par amour, comme la communion spirituelle durant l’eucharistie, leur sont à la fois accessibles et même demandés. Mais au cœur des souffrances, les mots n’ont pas la même résonnance et surtout n’atteignent plus ni le cœur ni la raison. L’Église paraît bien infidèle à la miséricorde proclamée par son Seigneur et son Sauveur !

Par ailleurs, qu’il s’agisse des partisans des secondes noces, des couples fidèles ou des époux qui restent fidèles, à travers tout, à leur conjoint qui est parti3, tous nous interpellent sur le bonheur de ces nouvelles unions. Certains demanderont : les secondes noces ne permettraient-elles pas aux nouveaux conjoints de vivre de manière plus mûre la vie conjugale et familiale ? On reconnaîtra que l’expérience de l’échec peut conduire à une vraie prise de conscience de ce qu’est la relation conjugale. Les nouveaux mariés peuvent en tirer un heureux bénéfice pour leur engagement : c’est le bon, disent-ils ! Certes, ils ont acquis expérience et humilité4. Tout le monde a droit à l’erreur. Il est normal qu’ils réussissent leur couple et qu’ils soient heureux. Encourageons-les, disent parfois certains agents pastoraux.

D’autres chrétiens s’exprimeront ainsi : puisqu’ils sont heureux, réjouissons-nous et accueillons la vérité de leur union tant au point de vue spirituel que sacramentel. Reconnaissons ainsi la qualité de ce deuxième mariage et donnons-lui le statut de témoignage et, peut-être aussi, de sacrement dans l’Église. Le sacrement « nouveau » consacrerait alors un vrai bonheur et en témoignerait dans le corps ecclésial.

À l’opposé, des esprits bien formés ou des personnes bien intentionnées ne comprendront pas qu’à la suite d’une séparation juste ou injuste, mais, objectivement, d’une infidélité au premier conjoint, celui qui se remarie puisse être heureux. On dira alors : ce qu’il a fait antérieurement et l’état d’infidélité dans lequel il vit actuellement conduisent immanquablement à ce qu’il vive « loin de Dieu », « loin de la grâce » du sacrement. Comment les divorcés remariés peuvent-ils être en paix dans leur situation ? Comment leur conscience ne leur rappelle-t-elle pas leurs responsabilités et l’injustice commise et confirmée par le nouveau lien ? Et comment, paradoxalement, le conjoint qui reste fidèle peut-il parfois être si malheureux et souffrir autant ?

Il est difficile de donner des réponses générales à toutes les questions sensibles que nous venons d’évoquer. Les situations sont le plus souvent particulières5. En premier lieu, il s’agit d’avoir l’assurance ou de vérifier la validité du « premier » mariage. Si cette validité n’est pas vérifiée, nous ne parlons pas de la même réalité ! Mais encore, l’enjeu de ces questions ne concerne pas seulement les sentiments subjectifs, les intentions des personnes dans ces situations, les conditions morales, spirituelles ou juridiques des diverses alliances. Le débat sur les divorcés remariés exige de réfléchir et d’approfondir la condition sacramentelle des baptisés et, avant tout, le mode d’agir sacramentel du Christ dans l’histoire des hommes et dans son Église. En effet, si le mariage considéré est invalide, s’il n’a pas existé en vérité, on comprend mieux combien la miséricorde de Dieu peut s’exercer dans l’histoire et permettre à quelqu’un, malgré toutes les difficultés et les péchés éventuels de sa première relation, de vivre enfin heureux dans une autre relation — un vrai mariage — que l’Église pourra d’ailleurs reconnaître comme sacramentel à un moment donné. La vérité de l’unique mariage avec ses exigences et le contenu de la promesse qui le constitue devraient, selon nous, être mieux mis en évidence pour illuminer ces diverses situations et leurs conséquences.

Procédons par étapes et voyons comment se placent les défis exposés plus haut dans le paysage que nous nommons l’économie sacramentelle. C’est là que peut être retrouvée la source de tout amour : elle jaillit en toutes les conditions du lien matrimonial, sans nier le lien sacramentel. Pour cela, nous recueillerons d’abord la mémoire de la fidélité pascale du Christ à son Église exprimée dans la cohérence de la vie sacramentelle (I). Nous prendrons ainsi mieux conscience des enjeux ecclésiaux et sacramentels des débats récents sur les divorcés remariés (II). Nous essaierons ensuite de souligner la puissance du lien entre les époux en considérant l’engagement du Christ et l’œuvre de l’Esprit (III). Pour conclure, nous soulignerons le statut spirituel et le chemin de sainteté dans l’Église pour ceux et celles qui se sont remariés (IV).

I Dans la mémoire de l’Église

En 1981, après le synode sur la famille, Jean-Paul II invitait à bien « discerner les diverses situations ». Il exhortait « chaleureusement les pasteurs et la communauté des fidèles dans son ensemble à aider les divorcés remariés. Avec une grande charité, tous feront en sorte qu’ils ne se sentent pas séparés de l’Église, car ils peuvent et même ils doivent, comme baptisés, participer à sa vie6 ». Les divorcés remariés ne sont pas excommuniés. Ils sont toujours membres de l’Église. Il est vrai qu’ils « sont blessés dans leur lien au Corps du Christ7 ». Ils n’ont pas accès au pardon sacramentel ni à la communion eucharistique. Cela ne signifie pas qu’ils ne sont plus aimés de Dieu ni que la miséricorde ne leur est plus accordée au cœur : le rituel du sacrement et la théologie de la grâce n’ignorent pas cet aspect de la relation du chrétien avec Dieu8.

1 Dureté d’une « loi » du Christ et « cheminement de tout chrétien »

Après des souffrances insupportables, de nombreux chrétiens séparés et ensuite divorcés en viennent à contracter une nouvelle union. Certains le font avec prudence, parfois sans oser le mariage civil. Ils prennent la mesure des difficultés déjà rencontrées, mais ils pensent et désirent refaire leur vie, trouver à nouveau la paix et le bonheur dans une relation nouvelle et forte. C’est ainsi qu’ils pensent continuer à suivre le Christ, à cheminer comme tout chrétien avec Celui qui est « le chemin, la vérité, la vie » (Jn 14,6). Certains sont restés proches de l’Église et de la vie sacramentelle. D’autres sont blessés et, tout en connaissant la « pratique » de l’Église, ne la comprennent pas ni ne l’acceptent. Ils souffrent de cette « loi » qui n’est pas du Christ, mais de l’Église, disent-ils. Comment mesurer le prix de la fidélité dans ce contexte ? Que veut dire « cheminer » dans la voie du Christ ? Si nous écoutons ce dernier dialoguer avec les pharisiens sur le respect du dessein de Dieu à l’origine et énoncer fermement l’interdit du guet, de la répudiation (Mt 19)9, que pouvons-nous encore espérer ? Que signifie cette loi de charité si dure et si rude ?

a De l’observance de la loi à l’accomplissement pascal

Toute loi apparaît communément comme une limite, comme un principe de frustration, comme une négation de notre liberté et de notre autonomie. Au premier abord, une telle loi dans l’Église peut difficilement apparaître comme un « chemin de lumière » : en tout cas, d’emblée, elle en appelle à un « temps » de deuil, d’apprentissage de significations, d’ouverture d’une conscience peu habituée à poser un jugement dans un tel contexte de souffrances. La loi est un fardeau. Mais n’est-ce pas le propre du pharisien de faire porter des fardeaux insurmontables aux autres ? Pourquoi ne pas vivre, non pas sous la loi, mais comme un simple baptisé ?

Après la vérification de la validité du mariage, les baptisés sont affrontés à un choix qui leur parait impossible et qui dépasse leurs forces personnelles.

Rester fidèle à quelqu’un qui vous a déserté ? Rester fidèle à un engagement que ni le conjoint ni même Dieu ne semblent avoir tenu ? L’acte de la foi dans la présence fidèle du Christ qui a lui-même noué l’alliance sacramentelle à vues humaines détruite, demande toute la grâce de Dieu : elle est offerte au chrétien, même si elle est inaccessible à la nature humaine. Il ne s’agit pas de respecter un idéal théorique ou une disposition juridique. Le fidèle est appelé à reconnaître dans la foi la persistance, en son âme et en sa mémoire de baptisé, de l’engagement de Dieu, toujours et mystérieusement fidèle. Cet acte de foi est, dans les circonstances dites, assimilé à l’obéissance du Christ jusqu’à la mort de la croix. Le renoncement demandé à une nouvelle union prometteuse a quelque chose d’un martyre. L’Église sait d’expérience que beaucoup de ses enfants ont préféré assumer une nouvelle vie (des liens et des engagements nouveaux pour leur vie) plutôt que la fidélité du martyre. Ses trésors d’indulgence sont inépuisables10.

Mais comment l’Église pourrait-elle renier la parole donnée par le Christ dans le sacrement du mariage ? Celui-ci — un jour consommé — ne peut être dissous que par la mort ; il ne peut pas être effacé. Impossible donc de célébrer comme un mariage la nouvelle union qui se cherche. C’est par respect pour les personnes divorcées, c’est par respect pour la présence du Christ inscrite en leur destinée comme un lien indestructible, que l’Église ne peut reconnaître en ces nouvelles unions un mariage véritable et sacramentel. Sans juger la conscience de personne, Jean-Paul II rappelait dans Familiaris Consortio :

Le respect dû au sacrement du mariage, aux conjoints eux-mêmes et à leurs paroles, et aussi à la communauté des fidèles, interdit à tous les pasteurs, pour quelque motif ou sous quelque prétexte que ce soit, même d’ordre pastoral, de célébrer, en faveur de divorcés qui se remarient, des cérémonies d’aucune sorte. Elles donneraient en effet l’impression d’une célébration sacramentelle de nouvelles noces valides, et induiraient donc en erreur à propos de l’indissolubilité du mariage contracté validement11.

Cet avis est fort et se veut prudentiel12. Comme l’exprimait récemment le cardinal G. Müller :

Ce furent surtout les controverses avec les pharisiens qui donnèrent à Jésus l’occasion de se confronter à ce thème. Il prit expressément ses distances d’avec une pratique vétérotestamentaire du divorce, que Moïse avait permise à cause de la « dureté de cœur » des hommes, et renvoya à la volonté originaire de Dieu (Mc 10,5-9 ; Mt 19,4-9 ; Lc 16,18). L’Église catholique, dans son enseignement et dans sa pratique, s’est constamment référée à ces paroles de Jésus sur l’indissolubilité du mariage. Le pacte qui unit intérieurement les deux conjoints est institué par Dieu lui-même. Il désigne une réalité qui vient de Dieu et n’est donc plus à la disposition des hommes13.

Une telle position n’est pas uniquement pratique14. Elle exprime aussi, sans doute de manière abrupte, l’assurance du corps ecclésial que Dieu aime tous ses enfants, qu’il n’en abandonne aucun et qu’il reste présent à chacun même dans les gestes, les réflexions personnelles qui opposent un enfant de Dieu à son Père. Ces situations et les significations profondes qu’elles ont dans les cœurs appartiennent à la relation immédiate que chaque créature a avec son Dieu, créateur et Père. Dans cet élan qui respecte l’intimité personnelle de la foi, l’Église s’accorde avec la disposition divine révélée dans le dialogue de Jésus avec les pharisiens (Mt 19) et invite les chrétiens pris dans ces situations à « garder la foi » et à « élever chrétiennement leurs enfants », comme le précise le Catéchisme de l’Église catholique 15. Les chrétiens engagés dans de nouvelles unions peuvent y trouver des joies, des dévouements, une affection : l’expérience le montre. L’Église voit, observe, connaît et rend grâce pour les surcroîts de la libéralité divine. Comme baptisés remariés, comme pécheurs, comme tous les enfants d’Adam, ils demeurent appelés à la sainteté 16.

b Sur la route du ciel, l’amour de Dieu n’est pas mort

Ces défis pastoraux sont si douloureux que nous sommes tentés de faire abstraction de la puissance de l’Esprit présent à ces situations. Nous en arrivons à sectoriser le problème pour mieux le résoudre, nous le formalisons, nous cherchons à le résoudre par de nouvelles normes pratiques et ecclésiales. En réalité, nous l’enkystons. Nous risquons, alors, soit de dramatiser la situation, soit de ne plus observer les chemins d’ouverture que Dieu lui-même, les événements et les personnes sont en train de dessiner dans l’histoire sainte du peuple de Dieu. Nous faisons souvent d’une question délicate un problème insoluble et sans lien désormais avec la condition commune du baptisé et la situation ordinaire de l’Église. Nous sommes alors tentés d’instaurer des pastorales particulières pour tel ou tel groupe humain ou de fidèles en situation difficile. Cette option est-elle si heureuse ? Car, sans établir de comparaisons trop strictes, le cheminement des « fidèles divorcés » n’est-il pas semblable à celui de tous les chrétiens, dans leurs combats pour la fidélité et leur amour de la vérité et de la justice ? Sur le chemin de sainteté, l’Esprit reste présent au cœur de tous les baptisés.

C’est pourquoi Jean-Paul II, sans nier les difficultés des situations, encourageait à réfléchir sur la présence de ces frères et sœurs au sein d’une même communauté ecclésiale, faite pour tous17. Certains se considèrent innocents, parce qu’abandonnés injustement par leur légitime époux(se). L’économie sacramentelle de leur vie en est troublée, mais elle n’est pas transformée en désert mortifère18. La souffrance ne les a pas éloignés du cœur de la vie ecclésiale. L’Alliance indéfectible que le Christ et son Église avaient inscrite en eux par le mariage demeure, comme un mémorial. Cette Alliance produit encore son fruit, de manière douce ou tranchée : elle dénonce objectivement la rupture opérée dans les destinées que le Christ lui-même a scellées. Dénoncer n’est pas juger les cœurs : c’est dire la vérité d’une situation et le plus souvent décrire un fait. Cette dénonciation dit, de manière lointaine, inconsciente parfois ou archaïque du point de vue des réactions psychologiques, que le Seigneur demeure en toute alliance l’unique gage de la grâce toujours offerte par sa miséricorde inscrite dans l’histoire humaine qui est toujours particulière.

La condition des divorcés remariés ne rejoint pas l’ordre sacramentel de manière cohérente19. Bien sûr, la plupart du temps, elle n’est pas « irrégulière » du point de vue de la loi civile qui, dans beaucoup d’États, reconnaît et facilite les séparations et les divorces. Par ailleurs, la question de l’engagement interpersonnel et de sa symbolique, ainsi que le rapport aux enfants de toute union, atteste la complexité de ces nouvelles unions. Dans le plan de Dieu, la question de la permanence du seul sacrement demeure : quand les époux disent que l’amour est mort, parlent-ils au nom de Dieu ? Quand ils disent que leur nouvel amour témoigne de la fidélité divine dans leur vie, jusqu’où disent-ils une vérité théologique et spirituelle ? Être divorcé remarié représente comme le « changement de bobine » du film du bonheur familial, marqué par un « échec » irréversible pour certains et donc pour Dieu et son Église. Et pourtant, l’amour de Dieu n’est pas mort. Cette condition de vie nouvelle (remariage) constitue objectivement une transgression manifeste de la loi sacramentelle du mariage — qui n’est pas une loi civile ou coutumière, mais une loi personnelle du don de soi exclusif à un autre au sein du mystère sacramentel de l’Église ; elle est ainsi une distorsion de la vie sacramentelle et ecclésiale de ces baptisés.

C’est pourquoi l’Église catholique ne peut s’accommoder de telles blessures sans être blessée elle-même et porter avec le Christ les conséquences de ces actes de liberté de ses membres. S’il y a violence dans l’amour, il n’y a que l’amour qui puisse porter personnellement, historiquement, sacramentellement ces situations pétries de violence. Ainsi, ne chercher que des solutions juridiques ou à court terme, ou bien s’accommoder de ces ruptures d’alliance matrimoniale, pourrait être un apaisement temporaire d’une souffrance mais difficilement un chemin de grâce. Encore et toujours, il nous faut chercher le sens « spirituel » de telle blessure du lien conjugal sans nier la « lettre » de la relation corporelle entre un homme et une femme scellée par un vrai consentement. Comment trouver une signification à de telles options de liberté ? Comment chaque baptisé peut-il faire un pas vers le mystère du Christ et de son Église dans la puissance de l’Esprit ?

2 Une cohérence sacramentelle de la charité

a Le don intime, perfection dans l’amour

C’est dans cette lumière que l’Église interpelle ces fidèles. Revenir à leur premier mariage est souvent impraticable. Convient-il pour autant de demeurer engagés dans ces nouveaux liens ? Les raisons peuvent être humainement décisives d’y rester. Des enfants ont été conçus : ils sont nés et doivent être éduqués. Il ne serait pas convenable de ne pas en être responsable dans la vie de tous les jours. Leur bonheur est inscrit dans la nouvelle relation conjugale ; la croissance de leur foi et la connaissance de l’Église également. Comment, sinon, les regarder, encore et toujours, avec le regard de Dieu lui-même ? Si la séparation des nouveaux époux est impossible, il est souvent dit qu’ils devraient renoncer à l’acte spécifique du mariage. On comprend la portée morale et symbolique d’un tel renoncement, mais ne faut-il pas rappeler que la nouvelle vie des époux est « conjugale » de par soi puisqu’ils vivent sous le même toit et cherchent à communier d’un seul cœur ?

On peut parler de vivre comme frères et sœurs, mais cette vie intime appartient aux nouveaux « époux » et l’on aurait tort de ne se fixer que sur l’acte sexuel de cette nouvelle union20. Il ne dit pas le tout de ce nouveau « don de soi », de cette nouvelle vie à deux ou en famille recomposée. Des ambiguïtés demeurent et, pastoralement, il n’est pas bon de fixer un tel critère intime pour l’accession, par exemple, aux sacrements. Cette exigence paraît, à plus d’un, incompréhensible, et dépourvue de sens pratique. Comme pour le martyre et la virginité, faudrait-il d’autres yeux — les yeux d’une foi qui s’élargit à l’ensemble du corps du Christ — pour découvrir ce mystère d’une charité qui s’exerce dans un état matrimonial nouveau et en contradiction apparente avec les traits du corps eucharistique ?

Car l’Église n’en appelle pas moins ces hommes et ces femmes à la perfection de la charité : les voies de la grâce sont multiformes et Dieu peut offrir son pardon au fond des cœurs. Dieu a un regard particulier et une attente gracieuse pour les cœurs blessés et humiliés avant même que des pécheurs illuminés et pardonnés par ce regard n’aient pu conformer toute leur vie dans la chair à la nouveauté de l’Esprit21. Cette assurance peut être découverte et discernée paisiblement.

La sainteté des époux chrétiens qui ont divorcé et vivent en d’autres unions humaines n’est pas mesurée seulement par la loi sainte qu’ils méconnaissent et qui ne passera pas. La sainteté de Dieu est don de l’Esprit au cœur transpercé où la foi opère par la charité (Ga 5,6) les renoncements demandés au rythme providentiel de la vie et de la mort. La sainteté demeure offerte à ces chrétiens par la miséricorde de Dieu. Elle peut passer par l’humiliation du publicain ; elle est faite de la douceur et de l’humilité du Cœur de Dieu22.

b Rupture d’alliance et communion du Christ et de son Église

L’Église n’admet pas les divorcés remariés à la réconciliation par le sacrement de pénitence et à la communion eucharistique23. Cette disposition ne signifie pas un jugement de la conscience des personnes ; elle ne signifie pas non plus l’absence de la grâce de Dieu dont la miséricorde rejoint les cœurs contrits. Dieu s’exprime certainement dans ses sacrements accueillis librement et avec un cœur ouvert, mais la manifestation de sa grâce et l’expression de ses dons ne sont pas limitées par la pratique du septénaire24. Depuis le Concile Vatican II, particulièrement, nous sommes à même de mieux comprendre combien l’Église tout entière, celle du ciel et de la terre, est signe pour le salut du monde25. Chaque sacrement se situe dans ce nouveau paradigme. Cet ample horizon nous permet de croire à l’action immédiate du Sauveur dans le cœur de tous les baptisés et à la médiation de la communauté ecclésiale qui célèbre les sacrements. Nous sommes donc invités à considérer le déploiement de la grâce des sacrements dans l’Église qui, dès lors, est sacrement de salut pour celles et ceux qui ne peuvent vivre les sacrements. D’où l’importance pour les divorcés remariés de participer à la vie ecclésiale de leur communauté et, pour la communauté, d’être accueillante envers les divorcés remariés. Les sacrements sont pour le salut de tous. L’Église est la matrice spirituelle de ce septénaire, mais Dieu, qui agit ainsi, agit aussi autrement et se communique à qui il veut et quand il le veut, selon le mode qui lui convient et qui est adapté à tel ou tel de ses enfants. Cet énoncé doctrinal devrait renouveler notre confiance dans la miséricorde de Dieu pour chacun qui, comme tous, est pécheur appelé à la sainteté. Cette confiance doit pouvoir accueillir une grande variété des expressions de la miséricorde divine au sein de son Église et dans le monde.

L’« impossibilité » pour les divorcés remariés de communier n’est pas une sanction. Elle n’est pas non plus une mesure disciplinaire et pratique parce que visant à éviter un scandale ou un relâchement de la discipline des sacrements. Doctrine et pastorale se conjuguent dans ce cas précis pour manifester une organicité de la miséricorde divine dans l’Église. Cette organicité est multiforme. Nous peinons à l’imaginer, à l’accepter, à l’expliciter. Et pourtant, il s’agit d’en rendre compte dans la catéchèse et dans l’éducation au pardon et à la véritable communion spirituelle. Cela reste difficile, tant dans le langage que dans les gestes à poser.

C’est de l’économie sacramentelle de l’Église qu’il s’agit. Les baptisés ont part dans la foi à la vie du Christ et à son Alliance avec l’Église ; ils sont confirmés dans les dons de l’Esprit et conviés à la communion eucharistique, à l’Acte du Christ où son Alliance rédemptrice a été scellée en son corps livré et en son sang versé. Le sacrement du mariage a visiblement et réellement inscrit la vie conjugale dans l’admirable échange où l’amour humain devient le gage et le témoin de l’Amour de Dieu pour l’humanité. Comment laisser marquer sa vie par une rupture d’alliance26 et communier au sacrement où s’est nouée cette communion27 ?

L’Église maintient une exigence sacramentelle toute respectueuse du mémorial de l’Alliance divine nouée dans le corps et le sang du Christ. Car qu’est-ce que communier sinon être incorporé à l’amour crucifié du Seigneur et avoir part à son don de vie ?

II Le dialogue doctrinal et pastoral dans et sur le corps de l’Église

Depuis Familiaris consortio, cette doctrine a été publiquement précisée et rappelée. Elle a été l’occasion d’un dialogue qui continue aujourd’hui28.

En 1994, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a réaffirmé cet attachement. Elle faisait écho à des « opinions théologiques et à des directives épiscopales susceptibles d’induire une jurisprudence et une pratique pastorales moins conformes à la doctrine et à la discipline sacramentelle de l’Église29 ». Un an plus tôt, trois évêques allemands de la région du Rhin supérieur avaient en effet publié une Lettre pastorale sur la pastorale des divorcés remariés30.

La Congrégation pour la Doctrine de la Foi soulignait les points saillants des propositions des évêques allemands :

(…) ont été proposées, dans diverses régions, durant les dernières années, différentes pratiques pastorales selon lesquelles une admission globale des divorcés remariés à la Communion eucharistique ne serait certainement pas possible, mais ils pourraient y accéder dans des cas déterminés, quand, en conscience, ils se sentent autorisés à le faire. Ainsi, par exemple, lorsqu’ils ont été abandonnés tout à fait injustement, bien qu’ils se soient efforcés sincèrement de sauver leur précédent mariage, ou quand ils sont convaincus de la nullité du mariage précédent sans pouvoir la démontrer au for externe, ou lorsqu’ils ont déjà parcouru un long chemin de réflexion et de pénitence, ou encore quand, pour des motifs moralement valables, ils ne peuvent satisfaire à l’obligation de se séparer. De diverses parts, il a aussi été proposé que, pour examiner objectivement leur situation effective, les divorcés remariés devraient nouer un colloque avec un prêtre prudent et expert. Ce prêtre, cependant, serait tenu de respecter leur éventuelle décision de conscience d’accéder à l’eucharistie, sans que cela n’implique une autorisation officielle. Dans ces cas et d’autres semblables, il s’agirait d’une pratique pastorale tolérante et bienveillante visant à rendre justice aux différentes situations des divorcés remariés31.

La Congrégation répondait :

La structure de l’Exhortation (Familiaris consortio) et la teneur de ses paroles font comprendre clairement que cette pratique, présentée comme obligatoire, ne peut être changée sur la base des différentes situations. Le fidèle qui vit habituellement « more uxorio » avec une personne qui n’est pas sa femme légitime ou son mari légitime, ne peut accéder à la communion eucharistique. Si ce fidèle jugeait impossible de le faire, les pasteurs et les confesseurs auraient, étant donné la gravité de la matière, ainsi que les exigences du bien spirituel de la personne et du bien commun de l’Église, le grave devoir de l’avertir qu’un tel jugement de conscience est en opposition patente avec la doctrine de l’Église. Ils doivent aussi rappeler cette doctrine dans l’enseignement à tous les fidèles qui leur sont confiés32.

Ainsi la Lettre rappelle-t-elle à tous que l’accès à la communion eucharistique et l’assurance de la validité d’un mariage ne relèvent pas seulement de la conscience individuelle mais doivent pouvoir être considérés comme une question et une situation ecclésiales et sociales33. Il faut toujours viser une cohérence entre le jugement personnel et celui de l’Église comme corps34.

Dans ce débat, les trois évêques concernés par cette déclaration ont poursuivi le dialogue et ont voulu marquer à l’époque leur accord avec le Saint-Siège « sur les principes obligatoires pour toute l’Église35 ». Ils précisaient néanmoins :

La doctrine traditionnelle de l’Église est que la norme générale doit, en chaque cas, être rapportée à la personne concrète et à sa situation individuelle, sans pour cela supprimer cette norme. « Le droit de l’Église ne peut instituer qu’un ordre général, sans pouvoir régler tous les cas particuliers, souvent très complexes » (Catéchisme catholique pour adultes. La confession de foi de l’Église, publié par la Conférence épiscopale allemande, p. 395). La tradition doctrinale de l’Église a développé à cet égard l’« épikie » (équité), la discipline de l’Église, le principe de l’équité canonique (aequitas canonica). Il n’y a pas là une suppression du droit en vigueur ni de la loi à appliquer. Il ne s’agit que de les appliquer, dans des situations difficiles et complexes, « selon le droit et l’équité », de sorte qu’il soit tenu compte du caractère unique de la personne concernée. Ce qui n’a rien à voir avec une « pastorale de situation »36.

Ces évêques ajoutaient : « Le cas envisagé fait, du reste, qu’il ne pourrait s’agir de l’approbation d’une telle démarche, mais plutôt d’une tolérance, en raison de l’effort d’objectivité37. »

Quel est le sens encore actuel de ce débat sinon de nous inviter à approfondir le rapport juste entre la norme objective générale et la décision personnelle suivant le jugement de la conscience droite ? Dans ce genre de réflexion il convient aussi de mettre en œuvre la distinction entre l’interprétation jurisprudentielle de la loi et la rectitude du jugement particulier de la raison pratique, à savoir de la conscience38.

Ces évêques explicitaient leur position pastorale ainsi :

En fin de compte, il y va dans ces questions du juste rapport entre la norme objective générale et la décision personnelle de conscience. Les hommes de notre temps ont un sens aigu de ce débat. Certes, la norme objective est souvent minimisée et blessée (…), mais on finit par ne pouvoir convaincre de la force de la norme objective si l’on ne tient pas compte de la vie concrète très complexe des hommes et de la dignité personnelle unique de tout individu, telle qu’elle doit s’exprimer dans une conscience éclairée. Le Concile Vatican II relève expressément que « les commandements de la loi divine sont connus et reconnus par l’homme au moyen de la médiation de sa conscience » (Concile Vatican II : Déclaration sur la liberté religieuse Dignitatis humanae 3). Cette formation montre de façon exemplaire le lien indissoluble entre la conscience et la norme. Plus la conscience devient pure et plus elle sera à même de transmettre l’exigence de l’ordre divin et de l’appliquer à la situation concrète sans la fausser39.

Cet échange met finalement aussi en lumière l’insertion des Églises particulières dans l’Église universelle, « dans la communauté mondiale du Collège des évêques avec et sous le Successeur de l’apôtre Pierre40 ». Ce débat a retrouvé une actualité lors du dernier consistoire en janvier 2014 à Rome avec l’exposition inaugurale du cardinal Kasper41.

Ainsi peut être formalisée une problématique morale délicate et fondamentale. Mais suffit-il de poser la question en termes de norme, de morale, de conscience personnelle et ecclésiale ? Ne touche-t-elle pas d’abord la constitution du corps de l’Église et l’acte du Christ qui s’engage d’une manière certaine dans ce corps et par des actes précis ? Les questions posées actuellement encore nous semblent en effet concerner l’articulation de l’Église sacrement avec le septénaire lui-même. Plutôt que de chercher des normes nouvelles et des critères relatifs à l’accession des divorcés remariés à la communion sacramentelle ou à un nouveau mariage, ne faudrait-il pas prendre acte de la cohérence de l’économie sacramentelle et pouvoir situer, de manière adéquate, chaque baptisé dans cette cohérence ? Celle-ci implique les sacrements de l’initiation chrétienne et la grâce unique du consentement interpersonnel des époux dans le sacrement de mariage. Dieu intervient dans l’histoire ; son action est incarnée en son Église. Il nous faut l’assumer chacun et comme corps ecclésial. Dieu est fidèle et il le dit dans des gestes et des paroles consacrés.

Dans cette perspective, la conscience chrétienne apparaît certes comme un sanctuaire, mais elle n’est jamais isolée : elle est toujours intersubjective, particulièrement dans la préparation et l’accession à un geste sacramentel. L’acte du Christ et celui de l’Église dans tout sacrement ne peuvent pas être niés : ils existent dans l’histoire du baptisé et s’inscrivent dans l’histoire de l’Église comme corps. Ainsi doit-on reconnaître que ces questions sont toujours de l’ordre de la conscience personnelle, mais jamais en dehors de la conscience du corps ecclésial et particulièrement de celle du Christ, toujours vivant dans l’histoire.

Dans les situations pastorales, c’est ce que tous les prêtres, par leurs conseils et décisions, font ordinairement dans la variété des questions complexes auxquelles ils sont confrontés. Par amour, en bons bergers, ils posent souvent déjà avec les personnes un jugement prudentiel lié à un acte ou à plusieurs actes particuliers. N’est-ce pas cette attitude et cette vie, dans son organicité ecclésiale, qu’il faudrait promouvoir et éclairer dans la puissance de l’Esprit42 ?

III La puissance du lien

La puissance du lien matrimonial, sacramentel, atteste d’une permanence de la grâce offerte : elle procède de l’acte du Christ dans tout sacrement, mais elle exprime aussi l’action multiforme de l’Esprit d’amour. Les considérations, lues ici et là en régime catholique romain, ne font pas assez mention de ce trait pneumatologique du lien indissoluble du mariage. Si Dieu s’engage dans l’histoire des hommes, il le fait non pas de manière formelle et juridique, mais personnelle : en son Esprit. Gardons mémoire de la profondeur à laquelle la Trinité sainte a marqué les baptisés du signe de la croix et les a sauvés du péché et de la mort. Les sacrements de l’initiation chrétienne conduisent l’adulte aux sacrements du service de la communion et de la mission, mariage et sacerdoce43. La mission demeure la tâche de tout chrétien, au sein d’une Église qui est elle-même, comme un corps et non pas comme une somme d’individus, sacrement pour le monde. Les sacrements de l’initiation chrétienne fondent encore et toujours toute vie chrétienne et sont la source permanente de la grâce de la foi, de l’espérance et de la charité, même au travers d’unions ultérieures. Rappelons-le cependant : en régime catholique, aucune sacramentalisation d’une nouvelle union n’est possible, par respect pour l’engagement du Christ et de l’Église dans l’unique consentement des époux, par respect pour la personne du premier conjoint et parce que demeure la déchirure du Corps mystique de Jésus-Christ (Ep 5)44.

1 « Grâce et bonheur m’accompagnent, tous les jours de ma vie » (Ps 23,6)

Qu’en est-il du bonheur et de la grâce des remariés, si le mariage antérieur est valide et que la nouvelle union ne peut signifier sacramentellement l’union entre le Christ et l’Église ? Il s’agit, là encore, de reconnaître un mode d’agir de Dieu dans l’histoire, au-delà de la responsabilité personnelle des époux dans leurs relations diverses. Est présente encore la grâce sacramentelle de la première relation, surtout s’il y a des enfants. D’autre part, la relation nouvelle, stable, fidèle et féconde, ne pourra pas non plus être dissoute au nom du respect d’une loi morale ou du respect intangible de la première relation. Sommes-nous dans une impasse ?

S’il y a eu sacrement de mariage valide, il présupposait à la fois le baptême, la confirmation et l’eucharistie : l’initiation chrétienne. Le mariage est le « oui », prononcé dans le temps, d’un homme et d’une femme qui, en se donnant l’un à l’autre, se sont donnés à Jésus-Christ et ont actualisé ainsi les sacrements de leur initiation chrétienne. Dans ce mariage, le Christ a été présent et agissant en eux d’une double manière. Intérieur à leur libre consentement, il a accompagné librement le « oui » offert dans l’Église par les nouveaux époux. Présent également dans la personne du ministre ordonné, il a invité les époux à s’échanger leur consentement et a ratifié celui-ci à la fin de l’échange. Cette intervention du Christ dans l’histoire des époux n’est pas anodine. Dieu est intérieur à la liberté personnelle des époux et les a inscrits comme époux dans le corps de l’Église pour tout le temps de leur histoire sur la terre. Les témoins du mariage ont vu et entendu le « oui » des époux. Ce « oui » a une gravité certaine : il unit la terre et le ciel tant que les époux sont vivants sur la terre. L’indissolubilité est une exigence du consentement : une exigence que les époux assument non seulement dans le Christ, mais par Lui. Dieu s’engage lui aussi. Il le fait dans son Église avec qui Il fait corps.

2 Par son Esprit, le Christ est présent dans toute histoire humaine

Le Christ reste donc présent dans cette union consommée à un moment de l’histoire. Certains disent que l’amour est mort pour les époux qui se séparent. Il est souvent vrai que l’amour conjugal s’est tari et ensablé dans les refus l’un de l’autre. Ces blessures ont également blessé la relation au Christ qui s’est engagé réellement dans cette union. Mais le Christ blessé prend soin personnellement des époux et continue à les aimer ensemble, comme couple : il est et reste la source intérieure de tout amour personnel pour ces baptisés45. Si le baptisé est infidèle, le Christ lui, ne l’est pas. Il est la source et la fin de toute fidélité : il en est l’alpha et l’oméga. On ne peut donc pas affirmer que le Christ n’est plus lié à l’engagement pris dans le consentement initial du mariage. Il l’a assumé et il continue de l’assumer dans l’histoire des hommes. Le lien défait entre les conjoints est sauvegardé dans le Christ, particulièrement dans la relation sponsale du Christ et de son Église. Cette inscription n’est pas celle d’un registre : elle est inscription d’amour, dans le corps du Christ. C’est pour cela qu’un vrai mariage ne peut être effacé ou oublié : il est dans la mémoire et la puissance d’amour du Christ en son Église. Le sacrement de mariage existe bel et bien, comme désarmé aux yeux des hommes par la séparation des époux et la dissociation de facto de leur union, mais scellé dans l’engagement du Christ, époux de chaque conjoint et engagé une fois pour toutes dans leur union. Cet engagement dit la puissance de l’Esprit d’amour dans l’histoire humaine46.

Toute fidélité est un bien à protéger et à fortifier. Le Christ accomplit cette exigence. Cette œuvre n’est pas virtuelle, ni générique : elle touche les personnes dans leur singularité. C’est un trait du salut qu’il apporte dans leur histoire sainte. Ainsi la fidélité des époux séparés et divorcés passe dans un premier temps, pour être vraie, par le pardon accordé au conjoint dont on s’est séparé et dont on reste séparé. Toute nouvelle rencontre, dans ce contexte, doit être purifiée de l’esprit de revanche. Le chemin spirituel, qui prend parfois le temps d’une vie, est de se remettre à Dieu humblement, de pardonner, de faire pénitence et d’exercer la charité autant que possible : ce chemin est, déjà sur terre, lumière et vie. Il est une expression de l’amour47.

Nous le savons bien : il est des blessures qui ne guérissent que dans la mort. En ce sens, la mort, c’est-à-dire le passage dans la vie éternelle, la Pâque définitive, doit être réfléchie comme un chemin de vie et d’accession définitive à la paix du cœur pour toutes les relations. Cette paix peut être trouvée dans la reconnaissance civile. Si l’engagement est sérieux, cette reconnaissance lui confère une portée morale qu’il convient d’apprécier dès lors qu’il est posé48. La nouvelle union, blessure à la fidélité du Christ mais assumée par Lui, sera aussi inscrite dans le corps de l’Église, mais un sacrement ne peut pas sceller la nouvelle relation par respect pour le Christ qui y reste fidèle, pour la personne du premier conjoint et parce que la déchirure du Corps ecclésial demeure tant qu’il survit sur la terre.

L’objectivité de ces conditions morales et ecclésiales indique cependant, comme par contraste, la possibilité et les conditions de bonheur des divorcés remariés. Parce que baptisés, appelés par le Christ, ils ont encore et toujours à vivre de la sainteté de Dieu. Humiliés par l’échec antérieur de leur première union et marqués d’une impuissance qu’ils ressentent souvent comme un handicap pour la vie chrétienne, ils peuvent observer les commandements de Dieu et se livrer à l’Amour miséricordieux qui leur est offert par les voies que Dieu détermine. Dieu leur donne toujours la grâce d’aller vers Lui, de faire le bien, d’aimer leur prochain. S’ils aiment ce plus proche prochain qu’est leur nouvel époux, c’est bien : et ce bien est une grâce que Dieu leur accorde de vivre encore et toujours. Pourtant Dieu est encore fidèle au seul et unique mariage : il ne peut renoncer à la parole donnée, même si les époux n’y croient plus. Mais — ô paradoxe de la puissance divine — Dieu est fidèle à tout amour et il est aussi présent à ce qui se dit et se vit dans la relation des divorcés remariés : car rien dans la bonté de ce monde n’est en dehors du plan de Dieu. Dieu ne revient pas sur les grâces accordées au baptême et au mariage. Ces grâces prennent une expression détournée dans l’histoire, mais Dieu n’est pas absent de ces détours. Dieu est et reste maître de l’histoire. Il accompagne chaque pas de la liberté humaine. S’il en est glorifié, rendons grâce. S’il en est blessé, nous pouvons encore lui rendre grâce puisque son amour va jusqu’au bout et qu’il assume tous nos refus dans sa Pâque. La vérité du Mystère pascal de tout sacrement se déploie ainsi en dépassant tous nos schémas réducteurs. Forte de cette foi en Dieu infiniment fidèle et toujours présent à ses enfants infidèles, la communauté ecclésiale, quelle qu’en soit la figure concrète, pourvu qu’elle ait son « centre » dans l’eucharistie de son Seigneur et Maître, se doit d’accueillir et d’accompagner ces frères et sœurs, divorcés remariés, pour qu’ils avancent dans l’amour et la vérité sur le chemin de la sainteté.

IV Le statut spirituel de ceux et celles qui se sont remariés

Que des divorcés remariés puissent être heureux, soient bons envers eux-mêmes et leurs proches, envers l’Église et envers le monde appartient au plan du salut ! Cet appel éthique leur est également adressé, que la grâce accompagne. Cette grâce est personnelle : elle surgit à la fois du cœur du Christ, de la puissance de l’Esprit et de la miséricorde du Père. L’Église en est la bienheureuse médiatrice, particulièrement pour ses enfants souffrants. La miséricorde divine est pour tous : elle prend parfois toute une vie pour s’exercer et nous établir dans la vérité. Au ciel, il n’y aura plus ni homme ni femme, ni juif ni païen, ni homme libre ni esclave (Ga 3,28). Mais sur la terre, il faut du temps pour que la vérité d’une alliance se construise ou se bâtisse à nouveau : parfois, la reconstruction « comme avant » est devenue impossible. Cependant l’amour reste promis dans l’aujourd’hui de Dieu et dans son éternité.

Ainsi nous faut-il affirmer la fidélité du Christ à l’unique consentement des époux. Elle ne se perd pas dans l’histoire des hommes comme l’eau dans le sable, elle n’est pas bloquée par les refus, les infidélités, les nouvelles options. Elle a une fécondité : elle restaure tout homme dans son être profond et le rend prêt à entrer dans l’Amour éternel, au jour choisi. La fidélité du Christ au cœur des séparations est toujours la source de tout bien. Elle peut se dire et s’exercer de diverses manières. Si nous tenons que l’unique mariage des époux demeure en Christ, nous affirmons aussi qu’il reste source de grâce pour les époux, là où ils sont, tels qu’ils sont, même dans leur nouvelle relation. Elle est toujours enracinée dans leur être baptismal.

Nous pouvons relire dans la Bible une litanie d’affirmations concernant la fidélité de Dieu. Fidèle, notre Dieu l’est même à travers nos infidélités. C’est Lui le roc et le salut de tout amour. Il accompagne sans cesse nos histoires là où nous les avons menées. Aucune situation n’est hors de son Amour. Dieu œuvre donc aussi dans toute nouvelle union : il en purifie les traits en respectant les libertés qui se sont données maladroitement ou de manière immorale. Il porte, partout et toujours, le péché du monde et par là, opère son Salut : à sa manière qui nous dépasse toujours ! Comment sa grâce atteint-elle les hommes ? De manière immédiate : Dieu parle au cœur de ses enfants. Mais également de manière médiate : Dieu parle dans les événements et au sein de son Église. Dieu n’oublie pas son engagement dans le sacrement de mariage : ainsi le premier consentement matrimonial reste-t-il un canal de vérité et de grâce par lequel les époux divorcés remariés reçoivent encore et toujours un signe de la présence divine. Il serait bon qu’ils en prennent et en gardent conscience.

Le signe ecclésial du sacrement de mariage demeure, non comme une norme extérieure et formelle, mais comme une stèle — un roc d’où jaillit l’eau vive ! — sur le chemin de la sainteté chrétienne de ceux qui l’ont vécu. Aucune solution pastorale ne peut faire abstraction de cette réalité : elle est incontournable. Dieu y est encore présent, en souffrance et en gloire, et par là rend compte de sa présence également dans les nouvelles déterminations personnelles et institutionnelles des époux. Si nous disons et redisons que Dieu œuvre dans la nouvelle union, c’est pour affirmer qu’il y est miséricordieusement source d’amour et de bonheur. Ce qui est bon dans la nouvelle union, ne peut pas être hors du champ de la grâce, hors de l’action divine. Cette miséricorde s’exerce donc toujours, de manière paradoxale pour ceux et celles qui suivent la ligne linéaire du temps et oublient la mouvance de l’Éternel dans l’histoire humaine. Mais Dieu est présent et appelle toujours à la sainteté dans les conditions libres du corps de chacun. Aux époux est confiée la tâche de répondre, suivant leurs forces, à cet appel. À l’Église, comme corps, est donné le souci d’en manifester tous les aspects et d’accompagner les réponses à cet appel par des conseils et un langage adaptés.

Tout doit être mis en œuvre dans l’action, et par la réflexion ecclésiale, en gardant conscience et en fortifiant cette conscience que ces questions sont personnelles. Elles touchent des frères et des sœurs en Christ qui portent avec nous, et nous avec elles, le joug facile et le fardeau léger de Jésus (Mt 11,30). Cette consolation nous place dans la voie des vertus théologales. Car pour eux et pour l’Église, « leur fardeau n’est pas doux et léger parce que petit et insignifiant, mais il devient léger parce que le Seigneur — et avec lui toute l’Église — y prend part. L’action pastorale qui doit être menée avec un dévouement total se doit de fournir cette aide fondée dans la vérité et aussi dans l’amour49 ».

Notes de bas de page

  • 1 Même le dialogue entre les évêques allemands et la Congrégation pour la doctrine de la foi, en 1994, dont nous rendrons compte plus loin, pour éclairant qu’il soit, ne nous semble pas donner un argumentaire définitif aux uns et aux autres.

  • 2 Nous relirons plus loin l’énoncé précis de cette thèse exposée dans l’exhortation apostolique Familiaris consortio.

  • 3 Il ne faut pas oublier ces derniers, en effet. Nous pensons aussi particulièrement au magnifique témoignage des membres de la Communion Notre Dame d’Alliance.

  • 4 Cela implique que le pardon anime les cœurs et les échanges de ceux et celles qui sont concernés.

  • 5 Dans cette perspective, on lira avec profit X. Lacroix (dir.), Oser dire le mariage indissoluble, Paris, Cerf, 2001, publication francophone importante dans laquelle ces problématiques sont bien exposées.

  • 6 Jean-Paul II, Exhortation postsynodale Familiaris Consortio (FC), « sur les tâches de la famille chrétienne », 84.

  • 7 Commission familiale de l’épiscopat (France), Les divorcés remariés dans la communauté chrétienne, Paris, Centurion, 1992, p. 62.

  • 8 Voir G. Müller, Le pouvoir de la grâce. L’indissolubilité du mariage, les divorcés remariés et les sacrements, Paris, Parole et Silence, 2013, p. 31.

  • 9 L’intention du Christ est claire dans ce dialogue où il se pose comme « nouveau Moïse » face aux pharisiens, interprètes avec Moïse de la loi et promoteurs de la répudiation. Par ailleurs, la recherche exégétique s’est déchirée dans l’interprétation de l’exception matthéenne (pornéia). On aura intérêt à consulter J. Cottiaux, La sacralisation du mariage. De la Genèse aux incises matthéennes, Paris, Cerf, 1982. En ce qui concerne l’énoncé du Christ sur le dessein de Dieu à l’origine, il y a peu de doutes à avoir : l’unité et l’indissolubilité du lien conjugal appartiennent à la bonté du Créateur et le Christ est prêt à sauver ce lien originel par amour et dans l’amour. Pour l’exception de pornéia, il reste à penser non seulement l’interprétation la plus adéquate, mais encore comment une règle disciplinaire peut être élaborée à partir d’un verset si controversé dans l’histoire de la théologie.

  • 10 A. Chapelle, Sexualité et Chasteté, cours ronéotypé de l’IÉT, Bruxelles, 1995, p. 216-217.

  • 11 FC 84.

  • 12 La Lettre de la Congrégation pour la Doctrine de la foi aux évêques, « Sur l’accès à la communion eucharistique de la part des fidèles divorcés remariés » (cité dorénavant ACE), le rappelle : « Celle-ci (l’Église), fidèle à la parole de Jésus-Christ, affirme qu’elle ne peut reconnaitre comme valide une nouvelle union, si le mariage précédent l’était » (Doc. cath. 2013, 6 nov. 1994, p. 930). Cette Lettre apporte, dans un langage précis, des éléments précieux pour l’accueil pastoral des divorcés remariés et pour une meilleure compréhension de la « logique » sacramentelle. Elle est une aide pour commenter FC 84.

  • 13 G. Müller, Le pouvoir de la grâce, cité n. 8, p. 17-18.

  • 14 Selon les pays et les diocèses, des accompagnements et des rituels de prière ont été expérimentés et proposés à des groupes variés. Ils sont parfois encore ad experimentum, mais ils témoignent tous d’un désir ecclésial de manifester le maintien d’une grâce, d’une bienveillance et d’une bénédiction de Dieu pour tous ses enfants. Des groupes se réunissent régulièrement en France avec des théologiens, des évêques, des divorcés remariés et des séparés, pour réfléchir à leur situation et à leur service ecclésial, mais sans ambiguïté quant à la valeur sacramentelle d’une nouvelle union.

  • 15 CEC 1651.

  • 16 « La repentance, l’humilité et l’abnégation en sont, pour eux comme pour tous, les chemins obligés. L’espérance de la grâce et de la charité demeure en eux et pour eux un gage de la perfection chrétienne. Ils demeurent, comme tous, appelés à la béatitude et à la sainteté du Père des cieux » (A. Chapelle, Sexualité et Chasteté, cité n. 10, p. 216-217).

  • 17 FC 84, cité n. 6.

  • 18 Il est bon de rappeler aussi que la participation à la vie de l’Église ne se réduit ni à la messe ni à la réception de l’eucharistie.

  • 19 Voir Congrégation pour la Doctrine de la foi, ACE, cité n. 12, p. 931 ; A. Léonard, Séparés, divorcés, divorcés remariés, l’Église vous aime, Paris, Emmanuel, 1996, p. 106-107.

  • 20 Voir notamment la Lettre pastorale des évêques du Rhin supérieur, « Divorcés remariés : le respect de la décision prise en conscience » (cité dorénavant DR) : « Depuis longtemps, l’Église a autorisé l’admission à l’Eucharistie des divorcés remariés lorsque, tout en ayant une étroite communauté de vie, ils vivent dans l’abstinence, comme des frères et des sœurs. On appelle aussi cela la “pratique habituelle de l’Église” (probata praxis Ecclesiae). Beaucoup de gens considèrent une telle position comme contraire à la nature et à la foi. En l’occurrence, pour porter un jugement quelconque, il faut faire appel au réalisme et à l’objectivité, mais aussi au tact et à la discrétion » (Doc. cath. 2082, 21 nov. 1993, p. 1991). Les évêques allemands se réfèrent ici à FC 84 et à la Déclaration de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 11 avr. 1973 (Doc. cath. 1637, 5 août 1973, p. 707).

  • 21 C’est une manière d’exprimer du point de vue de Dieu ce que FC 34 évoquait en parlant de la loi de gradualité.

  • 22 A. Chapelle, Sexualité et Chasteté, cité n. 10, p. 216-217.

  • 23 Voir FC 84 ; CEC 1650, 2384 ; Congrégation pour la Doctrine de la foi, ACE, cité n. 12, p. 930-932.

  • 24 « Dieu n’a pas lié sa puissance aux sacrements au point de ne pouvoir sans eux conférer l’effet sacramentel » (Thomas d’Aquin, ST IIIa, q. 64, art. 7, corp.).

  • 25 Parmi les divers titres employés par Vatican II, il y a cette définition de l’Église-sacrement en Lumen Gentium qui donne un nouvel horizon ecclésiologique au septénaire : « L’Église est dans le Christ à la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain » (LG 1) ; l’Église est un signe pour l’humanité : elle est le « sacrement universel du salut » (LG 48). L’amour qui sauve (le Christ) est toujours là et il est toujours accueilli en son corps qu’est l’Église.

  • 26 Le Catéchisme de l’Église catholique parle d’une « situation d’adultère public et permanent » (CEC 2384). Ce vocabulaire de l’objectivité morale ne devrait-il pas être enrichi par un autre vocabulaire qui tienne compte de la présence divine à l’intérieur des cœurs qui vivent un amour de respect et de recherche de Dieu ?

  • 27 A. Chapelle, Sexualité et Chasteté, cité n. 10, p. 216-217.

  • 28 En 1992, le Catéchisme de l’Église catholique a été particulièrement explicite (CEC 1646-1651 et 2382-2386).

  • 29 Congrégation pour la Doctrine de la foi, ACE, cité n. 12, p. 930, § 3.

  • 30 Lettre pastorale des évêques du Rhin supérieur, DR, cité n. 20. Les évêques signataires étaient O. Saier, K. Lehmann et W. Kasper.

  • 31 Congrégation pour la Doctrine de la foi, ACE, cité n. 12, p. 930 (§ 3 et 4).

  • 32 Ibid. (§ 5 et 6) ; cf. CIC 978, 2.

  • 33 Ibid., p. 931 (§ 7 et 8).

  • 34 Ibid., p. 931 (§ 9).

  • 35 « Messages des évêques de la Province ecclésiastique du Rhin supérieur », Doc. cath. 2103 (6 nov. 1994), p. 934 (§ 3).

  • 36 Ibid., p. 934 (§ 4).

  • 37 Ibid. (§ 5).

  • 38 Cf. Jean-Paul II, Veritatis Splendor 54-64.

  • 39 « Messages des évêques de la Province ecclésiastique du Rhin supérieur », cité n. 33, p. 935 (§ 6).

  • 40 Ibid. Cf. H. de Lubac, Les églises particulières dans l’Église universelle, Paris, Aubier, 1971, p. 57-197.

  • 41 Nous n’entrons pas explicitement dans l’analyse ni les discussions de cette exposition : nous désirons simplement donner les éléments qui nous semblent participer à ce débat et en souligner les enjeux.

  • 42 Voir É. Jacquinet et J. Nourrissat, Fidèles jusqu’à l’audace. Divorcés remariés : un chemin nouveau dans l’Église, Paris, Salvator, 2008. On pourra utilement s’approprier le langage employé dans cet essai chargé d’expérience.

  • 43 CEC 1534.

  • 44 « L’Église s’en remet à Dieu. En ces circonstances contraires, ces chrétiens demeurent, comme tout baptisé, appelés à la sainteté. Ils sont peut-être humiliés d’une impuissance, plus ou moins supposée, plus ou moins imputable, à observer dès maintenant et chaque jour tous les commandements de Dieu. Ils se livrent au fur et à mesure à l’Amour miséricordieux qui pardonne, fortifie et restaure leur capacité de faire le bien, d’aimer le Dieu Saint de tout leur cœur et leur prochain plus qu’eux-mêmes » (A. Chapelle, Sexualité et Chasteté, cité n. 10, p. 216-217).

  • 45 La spiritualité du cœur de Jésus pourrait trouver ici encore un point d’application et être source de guérisons pour de nombreux cœurs blessés.

  • 46 Voir A. Mattheeuws, « La permanence du sacrement de mariage au cœur du divorce », dans A. Bandelier (dir.) Séparés, divorcés à cœur ouvert, Paris, Lethielleux, Parole et Silence, 2010, p. 117-140. Nous avons cherché à y montrer ce que recouvre la permanence du sacrement dans des situations de blessures et de ruptures temporaires ou définitives du lien.

  • 47 « Le bien de la fidélité subsiste dans le pardon accordé au conjoint dont on est séparé, la nouvelle rencontre ayant à se purifier de l’esprit de revanche, voire de la haine. Se remettre à Dieu dans l’humilité, pardonner, faire pénitence et exercer la charité, telle est la voie d’une restauration déjà à l’œuvre en cette vie. Mais il est des blessures qui ne guérissent que par la mort » (A. Chapelle, Sexualité et Chasteté, cité n. 10, p. 216-217).

  • 48 S’il ne convient pas d’encourager par principe ceux qui se séparent à se marier civilement avec une autre personne, dès lors qu’ils assument une nouvelle union et se sont engagés, il peut être bon, s’ils nous demandent conseil, de manifester le poids moral « positif » de cet engagement sociétal et de les inviter à en respecter toutes les conséquences.

  • 49 Congrégation pour la Doctrine de la foi, ACE, cité n. 12, p. 932.

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