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La vraie spiritualité de Saint Grignion de Montfort. De l'inauthenticité d'un traité de Besnard attribué à  Grignion de Montfort

De l’inauthenticité d’un traité de Besnard attribué à Grignion de Montfort

Bernard Guitteny
La dernière édition des OEuvres complètes de Grignion de Montfort (1966) rend manifeste qu'un traité lui a été attribué d'une manière erronée; il est d'un auteur postérieur à lui. Cette erreur a été divulguée depuis le milieu du XIXe siècle. Elle a compliqué la reconnaissance de Grignion de Montfort comme docteur de l'Église, dont la cause a été suspendue en 2001, et elle déséquilibre la cohérence de sa doctrine spirituelle.

I Les œuvres

Au début du XIXe siècle, furent versés au dossier en vue de la canonisation de Grignion de Montfort, des manuscrits dont il n’est pas l’auteur. La déclaration de sa sainteté eut lieu beaucoup plus tard, le 20 juillet 1947. Parmi les manuscrits faussement considérés comme siens, il y a des compilations anonymes de textes assemblés par des missionnaires en vue de leurs prédications paroissiales ou pour aider à promouvoir la dévotion du rosaire1. Louis-Marie Grignion avait été l’initiateur de ces assemblages de textes. Il a largement participé à la constitution de ces recueils. Pendant les missions qu’il organisait dans les paroisses, il engageait des collaborateurs à participer à l’élaboration de ces compilations qu’ils utilisaient en commun.

Une autre attribution lui a été faite, celle d’un livre écrit plus de quarante ans après sa mort, au milieu du XVIIIe siècle, par Charles Besnard : L’Amour de la Sagesse éternelle2. Cet auteur fut en 1755 supérieur religieux des missionnaires et des Filles de la Sagesse qui étaient venus s’installer au bord de la Sèvre nantaise, près du tombeau de Grignion de Montfort. Charles Besnard est un homme du XVIIIe siècle, non seulement par les dates (17171788) mais aussi par une certaine perception des courants de son temps, le siècle des « Philosophes » ou « siècle des Lumières ». Les philosophes de l’époque militaient en faveur d’une philosophie naturaliste et de la religion naturelle. Diderot a bien situé la problématique d’alors : « La raison est à l’égard du philosophe ce que la grâce est à l’égard des chrétiens. La grâce détermine le chrétien à agir ; la raison détermine le philosophe »3. Besnard s’oppose catégoriquement à leur rationalisme et à leur naturalisme : « Jésus-Christ est l’abîme de toute la science, écrit-il, afin que vous ne vous laissiez point tromper aux belles et magnifiques paroles des orateurs et aux subtilités si trompeuses des philosophes » (L’Amour 12).

Lorsque fut lancée, aux alentours de 1980, l’idée de faire proclamer Grignion de Montfort docteur de l’Église, le contenu du dossier de canonisation ne fut pas révisé. Ce qui avait étayé sa déclaration de sainteté n’était pas suffisant pour justifier un titre de docteur de l’Église. C’est ce que la Congrégation pour les Causes des Saints, après consultation de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, a fait savoir en 2001, en soulignant que la présentation actuelle des écrits de saint Louis-Marie Grignion de Montfort n’offre pas une synthèse doctrinale équilibrée.

Les œuvres faussement attribuées à Grignion de Montfort étant exclues, comme il se doit, il existe des documents dont les preuves d’authenticité sont suffisantes pour les lui attribuer. Ils révèlent la cohérence de ses écrits. À défaut d’une étude historique et critique d’ensemble, toujours à faire, il est possible d’ores et déjà d’affirmer que le manuscrit du Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge est un autographe de Grignion de Montfort, hormis quelques rares corrections introduites sur le manuscrit même au XIXe siècle. Le Secret de Marie, lettre rédigée vers 1715, est connue par deux copies d’écritures différentes qui livrent le même texte, soit que l’un des copistes ait copié l’autre ou qu’ils aient eu une source commune. La Lettre aux Amis de la Croix, qui, selon un biographe, a été écrite de Rennes par Grignion de Montfort à des membres d’une confrérie à Nantes, est connue par un autre biographe qui l’a publiée en 1839 en affirmant qu’il a eu le manuscrit en main et le transmet « presque en entier ». Cette source paraît fiable. Quatrième source : le Testament de Grignion de Montfort dicté à l’un de ses proches le 27 avril 1716, la veille de sa mort, est connu par le manuscrit original bien que l’on ne sache pas qui a pu l’écrire d’une orthographe aussi incorrecte. Il est signé « Louis-Marie de Montfort Grignion ». Les Lettres, ou extraits de lettres, au nombre de trente-quatre, ont fait l’objet d’une étude assez attentive pour qu’on puisse retenir que l’ensemble de leur présentation est un travail sérieux. Il faut y ajouter la « Lettre aux habitants de Montbernage, de Saint-Saturnin, de Saint-Simplicien, de la [paroisse de la] Résurrection et autres [lieux de Poitiers] qui ont profité de la mission », que deux biographes rapportent de la même manière à quelques mots près. Il ne sera pas retenu ici d’autres écrits que ceux qui viennent d’être indiqués.

II La vie. Les débuts

« Louis Grignion » (1673-1716) est le nom au registre de baptême de saint Louis-Marie Grignion de Montfort4. Il était prêtre depuis cinq mois, en 1700, quand il écrivit de Nantes au supérieur du séminaire de Saint-Sulpice de Paris : « Je ressens d’un côté un amour secret de la retraite et de la vie cachée pour anéantir ma nature corrompue [par le péché d’Adam] qui aime à paraître [dans le monde]. De l’autre [côté], je sens de grands désirs de faire aimer Notre Seigneur et sa sainte Mère, d’aller d’une manière pauvre et simple faire le catéchisme aux pauvres de la campagne et exciter les pécheurs à la dévotion à la Sainte Vierge » (Lettre 5)5. La retraite n’était pas pour lui la vie monastique ou la vie d’ermite mais un retrait dans un service sans relief tel qu’un « hôpital général » où étaient « enfermés » des gens incapables d’assurer par eux-mêmes leur survie. Pour mettre à exécution ce désir, il pensait concrètement, écrit-il, « aller à Rennes me retirer dans l’hôpital général auprès d’un bon prêtre que je connais » (Lettre 5). L’autre désir l’exposait au milieu du monde comme l’était un autre « bon prêtre » connu dans le diocèse de Nantes et décédé depuis peu de temps : « Il allait de paroisse en paroisse faire le catéchisme aux paysans aux dépens de la seule Providence [sans ressources assurées] » (ibid.). Aux yeux de M. Grignion, cette activité était bien nécessaire à l’Église au point qu’il n’y pourrait suffire seul : « Je ne puis m’empêcher, vu les nécessités de l’Église [en catéchistes du peuple], de demander continuellement avec gémissement une petite et pauvre compagnie de bons prêtres qui l’exercent [le ministère de catéchistes] sous l’étendard et la protection de la très Sainte Vierge » (ibid.). Des groupes équivalents de prêtres existaient déjà : « Il me vient… des désirs de m’unir à M. Leuduger… de Saint-Brieuc, grand missionnaire » et chef de missions. Il se joignit aux missionnaires de M. Leuduger plus tard, fin 1706 -début 1707, mais ils se séparèrent parce qu’ils divergeaient de vues sur la pauvreté dans les missions : le premier voulait que les frais engagés fussent couverts par de riches particuliers ou des fondations pieuses, tandis que Grignion de Mont-fort, en marge des affaires du monde, voulait, en dehors de tout revenu, un échange mutuel entre ceux qui pourvoyaient à la prédication de la parole de Dieu et tous les paroissiens, riches ou pauvres, qui pourvoiraient, eux, au jour le jour, à la table des missionnaires.

Une succession d’événements amena M. Grignion à être aumônier d’un hôpital général, non pas à Rennes, mais cette fois à Poi-tiers où il signa, le 2 décembre 1701, un contrat avec les administrateurs pour être chapelain des pauvres de cet hôpital6. Ils étaient quatre cents « pauvres enfermés », gens de tous âges, des vieillards, des familles avec leurs enfants, des hébétés et d’anciens vagabonds. Il s’immisça dans l’organisation de la maison et il eut beaucoup d’influence parmi les gens de la ville qui se pressaient à son confessionnal, à la chapelle, autant de choses qui suscitèrent rejets, contrariétés, outrances envers sa personne. Ce petit monde de la misère et des gueux concentrait tous les éléments délétères du monde : volonté de posséder, mise en valeur de soi, aspiration à la notoriété, plaisirs passagers, goût des apparences qui sont le lot de la vanité du monde et de la mondaine sagesse. Dans cette société réduite, depuis les administrateurs, gens bien étiquetés en ville, en passant par l’économe qui résidait dans l’établissement jusqu’au plus démuni des pauvres, tous partageaient, avec plus ou moins de distinction, le même esprit du monde. Au milieu d’eux, trois femmes de la bourgeoisie de la ville se mirent au diapason de l’aumônier et adhéraient à son mépris de la vie mondaine au point que la plus jeune des trois, Marie-Louise Trichet, délaissa, le 2 février 1703, les effets qui convenaient à son milieu social pour un habit d’étoffe commune et vulgaire des paysannes de la province du Poitou. En ce lieu, ces personnes faisaient l’expérience de la vérité de Dieu et de la sagesse de la foi et de la charité.

III La sagesse, connaissance expérimentale des mystères de Dieu, selon Grignion de Montfort

Le 9 mars 1703, M. Grignion se vit reprocher par le bureau du conseil d’administration d’avoir mis du désordre dans l’hôpital général de Poitiers7. Il revint à Paris. Marie-Louise Trichet lui écrivit à l’adresse du séminaire de Saint-Sulpice, se plaignant des épreuves qu’elle subissait dans sa situation à Poitiers : « Que votre lettre est divine, reprit-il, puisqu’elle est remplie des nouvelles de la croix… Car la meilleure marque que l’on est aimé de Dieu, c’est quand on est haï du monde et assailli de croix, c’est-à-dire de privations des choses les plus légitimes, d’oppositions à nos volontés les plus saintes, d’injures [injustices] les plus atroces et les plus touchantes [blessantes], de persécutions et de mauvaises interprétations de la part des personnes les mieux intentionnées et de nos meilleurs amis, des maladies les moins à notre goût [les plus répugnantes]. C’est en cette aimable croix qu’est renfermée la sagesse véritable [opposée à la fausse sagesse du monde] que je cherche jour et nuit avec plus d’ardeur que jamais » (Lettre 13). « Oh ! Quelle richesse, oh ! Quelle gloire si tout cela [pauvreté, croix, abjections, humiliations] m’obtient la divine sagesse après laquelle je soupire nuit et jour » (Lettre 15).

Au cours du second trimestre de 1703, M. Grignion logeait dans une soupente qui lui paraissait une cellule de prison : « Qu’on me calomnie, qu’on me raille, qu’on déchire ma réputation, qu’on me mette en prison, que ces dons sont précieux, que ces mets sont délicats, que ces grandeurs sont charmantes ! » (Lettre 15). Comme pour la venue d’un hôte honorable accompagné de son équipage (provisions pour son entretien) et de sa suite (serviteurs qui l’entourent), les croix, dit Grignion de Montfort, « sont les équipages et les suites nécessaires de la divine Sagesse, qu’elle fait venir dans la maison de ceux où elle veut habiter » (Lettre 16). Dans ce Paris mondain qui n’accueille pas la sagesse divine : « Quand serai-je assez bien orné pour lui servir de retraite, dans un lieu où elle est sur le pavé et méprisée ! » (ibid.).

La sagesse est pour la vertu théologale de foi une nourriture et pour la vertu de charité un breuvage qui désaltère l’âme assoiffée d’amour : « Oh ! qui me donnera à manger de ce pain [nourriture] de l’entendement dont elle nourrit les grandes âmes ? Qui me donnera à boire de ce calice [coupe] dont elle désaltère ses serviteurs ? » (ibid). La sagesse de Dieu fera de Grignion un crucifié comme Jésus-Christ, un vrai exclu des mondains de Paris : « Oh ! Quand serai-je crucifié et perdu au monde ? » (ibid.).

Cette expérience de la sagesse de Dieu est dans la ligne de la formation de M. Grignion au séminaire de Saint-Sulpice de Paris (1693-1700). Il y avait rencontré un maître spirituel, M. Joseph Brenier, qui lui communiqua le sens de la grandeur de Dieu et de l’adoration qui lui est due, une haute idée du sacré et son sens presque dramatique du mépris du monde8.

Louis Grignion est désintéressé de toute possession des biens matériels. Il écrit à son père et à sa mère, le 28 août 1704, qu’il renonce à tout droit de succession : « Je ne prétends [je ne revendique] rien voir ni [rien] toucher [de l’héritage] de la famille dont Jésus-Christ m’a fait naître. Je renonce à tout [ce que le droit pourrait m’attribuer], hormis [à] mon titre [clérical] parce que [le droit de] l’Église me le défend » (Lettre 20)9. C’est un choix de vie, leur explique-t-il. Tandis que ses parents se sont mariés, ont fondé une famille, ont possédé des biens, maisons, terres, revenus et les ont fait fructifier, il a choisi un autre mode de vie familiale et d’autres biens : « Dans la nouvelle famille dont je suis, j’ai épousé la sagesse de la croix où sont tous mes trésors temporels et éternels, de la terre et des cieux, mais si grands que, si on les connaissait, mon sort ferait envie aux riches et plus puissants rois de la terre » (Lettre 20). À l’une de ses sœurs qui était moniale, il écrivait, trois mois avant la lettre à son père et à sa mère, qu’il faut être désintéressé dans la piété même : « Je vous prie, ma sœur, de n’aimer que Jésus seul en Marie, et par Marie Dieu seul, et en [Marie] lui seul » (Lettre 19). Être désintéressé est le motif qui l’engage à écrire le Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge, en 1712 : « La dévotion à la Sainte Vierge est désintéressée, c’est-à-dire qu’elle inspire à une âme de ne se point rechercher mais Dieu seul dans sa sainte Mère. Un vrai dévot de Marie [la] sert… uniquement parce qu’elle mérite d’être servie et Dieu seul en elle… Oh ! Qu’un tel dévot de la Sainte Vierge… est rare maintenant ! C’est afin qu’il ne soit plus si rare que j’ai mis la plume à la main pour écrire » (Traité 10).

Le Traité de la vraie dévotion est du domaine de la sagesse divine qui échappe à l’intelligence du monde. Quand Grignion parle des grandes choses que Dieu a faites pour Marie, il souligne : « Le monde ne les comprend pas parce qu’il en est incapable et indigne » (Traité 6). Et les « grands saints » (Traité 35) « seront une odeur de mort aux grands, aux riches et orgueilleux mondains » (Traité 56).

IV Rédaction du Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge

Au temps du carême 1711, M. Grignion se dirigea vers La Rochelle où l’évêque le demandait. Il resta la plupart du temps sur ce territoire diocésain qui s’étendait du sud de La Rochelle à la province d’Anjou au nord. C’est là qu’il devait mourir et être enterré à Saint-Laurent-sur-Sèvre. Il continua à prêcher des missions paroissiales avec des prêtres qui se joignaient à lui pour le seconder. Chaque été, la mission s’arrêtait pendant les travaux des champs et la récolte des moissons. C’est dans ce contexte qu’il rédigea en 1712 le manuscrit de ce que l’on appellera cent trente ans plus tard Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge. Il a mis par écrit, dit-il, « ce que j’ai enseigné avec fruit » dans mes missions, en chaire et au confessionnal, pendant bien des années (Traité 110).

Les vues développées dans le Traité de la vraie dévotion sont d’une tout autre envergure que celle du jeune prêtre qui, en 1700, demandait à Dieu des catéchistes pour les missions paroissiales. Il y parle de la connaissance parfaite de Jésus-Christ et de son règne entier qui prend source dans l’événement de l’incarnation pour durer, acquérant toujours une nouvelle croissance, jusqu’à la fin du temps. Le début du manuscrit de Grignion de Montfort est très clair à ce sujet : « C’est par la très Sainte Vierge Marie que Jésus-Christ est venu au monde pour la première fois et c’est aussi par elle qu’il doit y venir pour la seconde. Marie a été très peu connue dans le premier avènement de son fils et elle le doit être beaucoup dans le second. Elle a été cachée dans le premier avènement par une économie admirable afin que son fils Jésus en fût plus connu et elle sera révélée dans le second afin que le règne de son fils, connaissance parfaite et son règne entier, arrive sur la terre » (Début du manuscrit du Traité)10.

L’économie domestique est une manière prudente et prévoyante de bien gérer un domaine. Elle était prédominante dans la société rurale aux XVIIe et XVIIIe siècle. Grignion de Montfort pense que Dieu a agi à la manière de l’économie domestique, d’une manière « admirable », en divisant le temps des chrétiens après l’incarnation en deux « avènements » suivant la plus ou moins grande connaissance de Marie. Le premier avènement est celui de la discrétion de Dieu sur Marie. Il correspond au temps des évangiles et des premiers siècles de l’Église : « Elle n’a presque pas paru dans le premier avènement de Jésus-Christ afin que les hommes, encore peu instruits et éclairés sur la personne de son fils, ne s’éloignassent de la vérité en s’attachant plus fortement et plus grossièrement à elle, ce qui apparemment serait arrivé si elle avait été connue, à cause des charmes admirables que le Très-Haut avait mis dans son extérieur » (Traité 49). Il était conforté dans cette idée d’une Vierge glorieuse par un apocryphe du Ve ou VIe siècle admis à son époque comme s’il avait été rédigé par un contemporain des apôtres, Denys l’Aréopagite. Le Pseudo-Denys a en effet écrit, quelques siècles après le temps des apôtres, qu’il l’aurait prise, quand elle lui fut présentée, « pour une divinité, à cause de ses charmes secrets et de sa beauté incomparable, si la foi dans laquelle il était bien confirmé, ne lui avait appris le contraire » (Traité 49).

En des temps plus avancés de l’histoire, Dieu, toujours par son économie admirable, « veut donc révéler et découvrir Marie, le chef-d’œuvre de ses mains… Il veut en être glorifié et loué sur la terre par les vivants » (Traité 50). À quel moment des premiers siècles aurait commencé le « second avènement », selon Grignion de Montfort ? Il est possible que ce soit vers le quatrième siècle, époque où il place le premier en date des saints qui « ont passé par ce chemin virginal et doux pour aller à Jésus-Christ parce que le Saint-Esprit… le leur a montré par une grâce singulière » (Traité 152). Il s’agit de saint Éphrem, né vers 306 et décédé en 373.Éphrem de Syrie, diacre et moine, a écrit des poésies théologiques riches en images. La prolifération des traductions et des falsifications de ses œuvres montre son influence qui se prolongeait au temps où Grignion de Montfort écrivait. Sa dévotion à Marie était notoire. Au siècle suivant, le concile d’Éphèse (431) attribua à Marie le titre de « Mère de Dieu ».

V Utilisation du Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge

Le premier qui a considéré le Traité de la vraie dévotion comme une œuvre purement mariale (alors qu’il n’était encore qu’à l’état de manuscrit d’un auteur inconnu), est Charles Besnard (1717-1788). Missionnaire de la communauté de Saint-Laurent-sur-Sèvre à partir de 1743, il fut élu supérieur général des missionnaires et des Filles de la Sagesse en 1755. Il avait reçu sa formation ecclésiastique pendant huit ans à Paris avant de venir à Saint-Laurent-sur-Sèvre. Il était alerté sur le courant philosophique qui sapait les bases de la société royale, de l’institution chrétienne et de la culture dominante. Les « Philosophes » de la raison et des « Lumières » imposaient progressivement et insidieusement leurs idées dans les pensées et les mœurs, remettaient en cause la culture chrétienne, prenaient la religion pour une superstition, la révélation pour une chimère, et voulaient substituer la religion naturelle à la religion officielle. Charles Besnard a réagi en opposant à la nouvelle sagesse la Sagesse éternelle, dans un écrit qu’il rédigea d’abord à l’intention des Filles de la Sagesse pour les mettre en garde contre les idées envahissantes : « Les philosophes ont aussi leur sagesse et elle doit être méprisée comme inutile et souvent comme dangereuse au salut » (L’Amour 74). La seule sagesse véritable est Dieu : « C’est le Fils de Dieu, la seconde Personne de la Sainte Trinité, autrement [dit] la Sagesse éternelle dans l’éternité et Jésus-Christ dans le temps » (L’Amour 12). D’où le titre de son livre L’Amour de la Sagesse éternelle11.

Depuis 1752, les Philosophes répandaient leurs idées au travers des articles qu’ils publiaient dans l’Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, sous la direction de Denis Diderot et avec le concours de d’Alembert pour la partie scientifique, et de beaucoup d’autres collaborateurs. Les rédacteurs de l’Encyclopédie en étaient à la lettre « M », en 1758, au moment où Charles Besnard mijotait sa réplique à leur philosophie. En cette année donc, au mot « missionnaire », ils publiaient leur perception de la communauté sise au bord de la Sèvre nantaise : « Les missionnaires de M. Grignion de Montfort sont des prêtres séculiers… qui vont faire des missions dans les paroisses… Ces prêtres forment une petite espèce de communauté… Un d’eux, nommé à la pluralité des voix, est élu supérieur et à vie. Leur résidence particulière, hors le temps des missions, est à Saint-Laurent-sur-Sèvre, en Bas-Poitou ; ils sont habillés comme des prêtres ordinaires… Ils font leurs missions ordinairement dans les diocèses de Bretagne, du Poitou, d’Anjou et d’Aunis, et ailleurs quand ils sont demandés ; ils sont au nombre de dix à douze ; à la fin de chaque mission, ils plantent une croix élevée dans la paroisse, en mémoire de la mission qu’ils ont faite. Cet établissement n’est encore fondé, en 1758, sur aucune bulle [du pape] ni lettres patentes [du roi] »12. Les auteurs de l’Encyclopédie ont écrit quelques années plus tard leur façon de voir les « Sœurs de la Sagesse » : « Ce sont des filles [femmes célibataires] qui se sont mises ensemble pour exercer la charité envers les pauvres, aussi prennent-elles le nom de “Servantes des pauvres”… Leur habillement est fort simple et est fait d’une grosse étoffe grise et les coiffures d’une simple toile… Le sieur de Montfort leur donna des règles et constitutions pour leur façon de vivre, de s’habiller et pour leurs exercices spirituels ; elles sont répandues en différents diocèses où on les a appelées “nonnes” ; elles ont formé des établissements dans plusieurs villes, bourgs et paroisses de Bretagne, Poitou, Saintonge et Aunis où elles remplissent avec beaucoup de zèle et de charité les emplois où leur supérieur les distribue… Elles ont une supérieure générale qui est une d’entre elles et à vie ; elles sont toutes sous les ordres et la conduite d’un prêtre qui a succédé au sieur de Montfort dans le titre de supérieur des missionnaires de ces cantons-là… Ces filles n’ont encore pu jusqu’à présent obtenir ni bulles, ni lettres patentes pour leur établissement ; elles les sollicitent et, si elles les obtiennent, elles seront dans l’Église un corps de religieuses, si non, on ne doit les regarder que comme des filles qui se sont vouées au service des pauvres »13. Les Philosophes de l’Encyclopédie ménageaient l’Église et la royauté dans les articles du genre de ces extraits tandis qu’ils distillaient leurs idées subversives dans des articles de fond.

Charles Besnard orienta la piété des Filles de la Sagesse en leur proposant l’acquisition et la conservation de la Sagesse éternelle comme but de leur vie spirituelle, Sagesse à acquérir et à conserver grâce à quatre moyens : le désir, la prière, la mortification et la dévotion à la Sainte Vierge (L’Amour 181-227). Pour rédiger le dix-septième et dernier chapitre de son œuvre (l’exposé du quatrième moyen), Charles Besnard utilisa un manuscrit d’un auteur alors inconnu (son nom ne sera découvert que quatre-vingts ans plus tard). Il estima le manuscrit qu’il avait en mains comme tout bonnement dédié à la dévotion à la Sainte Vierge et il l’exploita comme tel. Le démarquage qu’il en fit porte ce titre : « Quatrième moyen : Une tendre et véritable dévotion à la Sainte Vierge » (L’Amour 203-227).

Dans ce chapitre, Besnard réduit le contenu du Traité de la vraie dévotion à une dévotion mariale d’appoint. Il a beau dire que cette dévotion est « le plus grand des moyens et le plus merveilleux de tous les secrets pour obtenir et conserver la divine Sagesse » (L’Amour 203), elle reste pour lui un moyen, ni plus ni moins qu’une consécration comme le montre la structure de son chapitre divisé en trois points : 1°) Obtenir la Sagesse éternelle : « Il n’y a jamais eu que Marie qui ait trouvé grâce devant Dieu… et qui ait eu le pouvoir d’incarner et de mettre au monde la Sagesse éternelle… Ce n’est donc que par Marie que l’on peut obtenir la Sagesse éternelle » (L’Amour 203 et 209) ; 2°) Pour conserver la Sagesse éternelle, il faut se consacrer à Marie : « Si on nous fait un si grand don que celui de la Sagesse, où le placerons-nous ?… Notre cœur est souillé, impur, charnel et rempli de milles passions, indigne de posséder une si noble et si sainte hôtesse… Faisons entrer, pour ainsi dire, Marie en notre maison en nous consacrant à elle sans aucune réserve comme ses serviteurs et ses esclaves » (L’Amour 209-210) ; 3°) La formule de consécration : « Afin que je sois plus fidèle que je n’ai été jusqu’ici, je vous choisis aujourd’hui en présence de toute la cour céleste pour ma mère et maîtresse. Je vous livre et consacre en qualité d’esclave mon corps et mon âme, mes biens intérieurs et extérieurs et la valeur même de mes bonnes actions passées, présentes et futures, vous laissant un entier et plein droit de disposer de moi et de tout ce qui m’appartient selon votre bon plaisir à la plus grande gloire de Dieu dans le temps et l’éternité » (L’Amour 223-225).

Le style grandiloquent de cette consécration n’est pas celui de Grignion de Montfort. Il y est question de la Sagesse éternelle d’une manière qui est étrangère au Traité. Dans le Traité, il y a tout un programme de vie chrétienne et spirituelle : la « pratique de dévotion que j’enseigne » n’a pas son semblable, dit Grignion de Montfort, « qui exige d’une âme plus de sacrifices pour Dieu, qui la vide plus d’elle-même et de son amour-propre, qui la conserve plus fidèlement dans la grâce et la grâce en elle, qui l’unisse plus parfaitement et plus étroitement à Jésus-Christ et enfin qui soit plus glorieuse à Dieu, sanctifiante pour l’âme et utile au prochain » (Traité 118).

La finalité de la consécration n’est pas la même pour Grignion de Montfort et pour Besnard. Celui-ci se consacre « afin que je sois plus fidèle que je n’ai été jusqu’ici », tandis que la démarche de Grignion de Montfort est en cohérence avec toute la théologie chrétienne : « On se consacre tout ensemble à la très Sainte Vierge… comme à un moyen parfait [ou “voie immaculée de Marie” (Traité 158)] et à Notre Seigneur comme à notre dernière fin, auquel nous devons tout ce que nous sommes comme à notre Rédempteur et à notre Dieu » (Traité 125)14. Besnard n’a vu qu’une dévotion à la Sainte Vierge dans un livre de théologie, dont le pape Jean-Paul II dit de l’auteur : « Sa pensée mariale s’enracine dans le mystère trinitaire et dans la vérité de l’Incarnation »15 ; et quand il parle du livre, le pape dit encore : « Marie apparaît comme l’espace d’amour et d’action des trois Personnes de la Trinité »16.

Le Traité de la vraie dévotion fait partie de l’itinéraire de Grignion de Montfort dans la connaissance expérimentale et savoureuse de la vérité, la sagesse. Deux ans après l’avoir écrit, il passait à Rennes où il rédigea une lettre pour une association pieuse à Nantes : « Vous pouvez, leur écrit-il, et même vous devez demander la sagesse de la croix [les croix précèdent et accompagnent la sagesse, expliquait-il à Marie-Louise Trichet, en 1703] qui est une science savoureuse et expérimentale de la vérité, qui fait voir dans le jour de la foi les mystères les plus cachés, entre autre celui de la croix… trésor infini dont le bon usage rend une âme participante de l’amitié de Dieu… et puis vous verrez clairement par expérience comment il peut se faire qu’on désire, qu’on recherche et qu’on goûte la croix » (Lettre aux Amis 45). Le « jour de la foi » et l’« amitié de Dieu » sont deux des « effets merveilleux » de « la pratique de dévotion » que Grignion de Montfort enseigne, qui développent les vertus théologales de foi (Traité 214), de charité (Traité 215) et d’espérance (Traité 216).

Il faut reconnaître que cette sagesse est tout autre que celle de Besnard, dirigée contre les Philosophes, et que les quatre moyens proposés par celui-ci (cf. supra) sont bien différents des croix, des humiliations, des rejets et de la pauvreté que Grignion de Montfort, en vrai mystique du dénuement et de la pauvreté, a expérimentés sur la voie de la connaissance des mystères de Dieu.

VI Confusion dans les manuscrits

Charles Besnard n’a vu dans le Traité de la vraie dévotion que l’enseignement d’une dévotion à la Sainte Vierge parmi les autres. Une autre confusion se fit jour quand le clergé et le peuple du Bas-Poitou voulurent faire canoniser par l’Église catholique le saint homme local dont ils détenaient le tombeau. Pour constituer, à partir de 1824, un dossier de ses écrits en vue d’introduire le processus de sa canonisation en cour de Rome, les pièces d’archives du XVIIIe siècle étaient variées : règles de communauté, lettres d’édification ou de piété, cantiques, compilations de textes d’emprunts utiles aux missions, voisinant avec des manuscrits qui n’étaient pas de la main de Grignion de Montfort, tel que L’Amour de la Sagesse éternelle de Charles Besnard. Ce dernier manuscrit, bien qu’étranger au dossier de canonisation, y fut joint. Ceux qui assemblaient les pièces d’archives ignorèrent jusqu’en 1842 un manuscrit dont ils identifièrent l’auteur seulement à cette date tardive. L’auteur était Grignion de Montfort. Ils joignirent le document au dossier et décidèrent même de le publier ; ce qu’ils firent en 1843 en choisissant un titre qui convenait au XIXe siècle : Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge. Comme les éditeurs ne trouvaient pas de formule de consécration dans le manuscrit de Grignion, ils livrèrent au public la formule de consécration de Besnard, extraite de L’Amour de la Sagesse éternelle comme si elle avait été à la suite du Traité. Ils répandirent plus largement leur erreur sur l’auteur en publiant L’Amour de la Sagesse éternelle en entier sous le nom de Grignion de Montfort en 1856.

En 1929, le Père Henri Huré (qui allait être élu supérieur général des deux congrégations de Saint-Laurent-sur-Sèvre deux ans plus tard) publia à nouveau l’œuvre de Charles Besnard sous le nom de Grignion de Montfort. Il prolongeait au XXe siècle la confusion faite au siècle précédent, en 1824, 1843 et 1856. Henri Huré va même (inversant l’ordre chronologique des écrits) jusqu’à dire du Traité de la vraie dévotion, qu’il n’est « que le magnifique commentaire du chapitre XVII de L’Amour de la Sagesse éternelle » et, renversant complètement les données, il écrit que l’œuvre de Besnard « peut même donner une idée plus exacte et plus compréhensive de la Vraie dévotion »17.

Une fois le Traité réduit à n’être que l’enseignement d’une dévotion, il fallait bien justifier comment ce livre avait eu un tel succès depuis sa première édition en 1843. Une explication se fit jour : la dévotion enseignée dans le Traité de la vraie dévotion dépassait dans sa formulation même et dans ses modalités d’application toutes les autres formes de dévotion à la Sainte Vierge. C’est l’explication qui avait cours au moment de la canonisation de Grignion de Montfort en 1947. Le pape Pie XII lui-même fit une mise au point, le 21 juillet 1947, dans son discours aux pèlerins venus à Rome pour la canonisation de Grignion de Montfort : « La vraie dévotion, celle de la tradition, celle de l’Église, celle, dirions-nous, du bon sens chrétien et catholique, tend essentiellement vers l’union à Jésus-Christ sous la conduite de Marie. Forme et pratique de cette dévotion peuvent varier suivant les temps, les lieux, les inclinations personnelles. Dans les limites de la doctrine saine et sûre, de l’orthodoxie et de la dignité du culte, l’Église laisse à ses enfants une juste marge de liberté. Elle a conscience d’ailleurs que la vraie et parfaite dévotion envers la Sainte Vierge n’est pas tellement liée à ces modalités qu’aucune d’elles puisse en revendiquer le monopole »18. Le pape Jean-Paul II a rétabli et remis à sa juste valeur, une quarantaine d’années après l’intervention de Pie XII, le Traité de la vraie dévotion de saint Louis-Marie Grignion de Montfort dans la théologie dogmatique et spirituelle. Il confia à un journaliste en 1982 : « Je me suis aperçu… qu’il s’agissait de quelque chose de fondamental… venu du plus profond de ma foi, comme du cœur même de la réalité trinitaire et christologique… J’ai compris à la lumière du traité de Grignion de Montfort… que notre relation intérieure à la Mère de Dieu résulte organiquement de notre lien au mystère du Christ »19.

L’édition des œuvres dites « complètes » de Grignion de Montfort en 1966 compile toutes les erreurs du passé : elle présente L’Amour de la Sagesse éternelle comme la première dans le temps des œuvres personnelles de Grignion de Montfort (p. 85-216), et la compilation anonyme appelée Le Secret admirable du très saint Rosaire est incluse dans les œuvres rédigées par Grignion de Montfort (p. 263-389).

Cette édition des Œuvres Complètes a fait partie du dossier présenté à Rome à la Congrégation pour les Causes des Saints en vue de faire déclarer par le Pape saint Louis-Marie Grignion de Montfort docteur de l’Église universelle. Le dossier a été soumis pour examen à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Celle-ci a fait suspendre l’instruction de la cause de saint Louis-Marie Grignion de Montfort comme docteur de l’Église. La Congrégation pour les causes des Saints en a publié le motif, où il apparaît que des textes, contraints à entrer dans la synthèse des écrits de saint Louis-Marie, en compromettent l’équilibre doctrinal : « Negli scritti del Santo vi sono unilateralità che compromettono l’equilibrio della sua sintesi di fede e pertanto — almeno nella situazione attuale — non gli può essere riconosciuto il titolo di Dottore della Chiesa »20.

Un dossier insuffisamment préparé n’entrave pas fondamentalement une future déclaration de Grignion de Montfort comme docteur de l’Église. La situation est provisoire : « à tout le moins actuellement », fait remarquer la Congrégation pour la Cause des Saints. Cet avertissement fait rebondir la nécessité d’exploiter d’une manière critique les archives, notamment celles des Montfortains et des Filles de la Sagesse, à Rome. Elles sont ouvertes aux chercheurs. Pour les théologiens et pour les spirituels que Grignion de Montfort a éveillés et conduits, c’est une opportunité sans précédent de mettre en valeur sa vraie spiritualité en ce qu’elle a de spécifique dans son approche théologique des mystères de Dieu et dans la précision avec laquelle il communique son expérience mystique.

Notes de bas de page

  • 1 Archives de la Maison générale des Montfortains à Rome (abréviation pour les notes suivantes : Arch.Montf.R). Trois compilations manuscrites : un cahier de notes mariales, appelé Cahier de notes, une compilation de sermons et une compilation sur la dévotion du rosaire.

  • 2 Arch.Montf.R. Manuscrit de l’œuvre de Besnard. Le relevé des titres des dix-sept chapitres, sous forme de table des matières sur deux pages, est de l’écriture de Charles Besnard. Ce document sert de référence à toutes les éditions de L’Amour de la Sagesse éternelle, depuis la première en 1856.

  • 3 Diderot D., Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, (1751-1772), nouvelle édition, t. XXVe, art. « Philosophes », Paris, 1778, p. 667s.

  • 4 Pièce d’archives conservée à l’Hôtel de ville de Montfort (Île-et-Vilaine).

  • 5 Les trente-quatre lettres, ou extraits de lettres, de Grignion de Montfort, ne sont dans le commerce que par une seule édition : Saint Louis-Marie Grignion de Montfort, Œuvres complètes, éd. M. Gendrot, S.M.M. e.a., Paris, Seuil, 1966, p. 1-83. Leur numéro d’ordre est ici indiqué après Lettre. Les autres références valent pour toutes les éditions : Traité = Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge (la numérotation par paragraphes a été introduite en 1921) ; Secret = Le Secret de Marie ; L’Amour = L’Amour de la Sagesse éternelle ; Lettre aux Amis = Lettre aux Amis de la Croix.

  • 6 Archives départementales de la Vienne, « Registre de l’Hôpital général » f° 39.

  • 7 Ibid., même registre. Voir Guitteny B., Grignion de Montfort, missionnaire des pauvres, Paris, Cerf, 1993, p. 159-173.

  • 8 Archives de la Compagnie de Saint-Sulpice, Paris. Dossier Leschassier.

  • 9 Les évêchés exigeaient un minimum de revenus fixes, souvent d’origine familiale (80 livres dans le diocèse de Saint-Malo), pour assurer une vie décente aux prêtres qui n’avaient pas de « bénéfices ecclésiastiques », à une époque où le clergé n’était pas pris en charge par les diocèses. C’était le « titre clérical ».

  • 10 Arch.Montf.R. Ce texte encore lisible sous les biffures est présenté ici d’après une photocopie du manuscrit. Il est aussi publié dans Œuvres complètes, p. 488, note de bas de page. Dans l’état actuel de conservation du manuscrit, le titre de l’ouvrage (s’il en a eu un) est inconnu. Un premier sous-titre a peut-être contenu les termes « Règne de Jésus-Christ » (Traité 237) ; un second sous-titre est mis en évidence sur le premier tiers d’une page : « La parfaite consécration à Jésus-Christ » (Traité 120). La première partie est donc sur le règne de Jésus-Christ (Traité 1-117) et, après deux alinéas de transition (Traité 118-119), la seconde sur « La parfaite consécration à Jésus-Christ…, toute notre perfection consistant à être unis, conformes et consacrés à Jésus-Christ » (Traité 120).

  • 11 L’écriture de Charles Besnard n’apparaît que dans deux pages, celles de la « Table des matières » où il reprend les dix-sept titres de chacun des chapitres en ajoutant leurs références dans les pages du manuscrit. Toute la partie qui précède les deux pages de la table est une copie manuscrite. Le Père Marcel Gendrot, dans l’édition des Œuvres complètes (1966, cf. supra, n. 5), a cru voir dans l’écriture du copiste celle de Grignion de Montfort : « L’écriture égale, bien lisible, quoique en petits caractères, révèle immédiatement la main de Montfort lui-même » (Œuvres complètes, p. 88). Mais cette même édition publie (en format réduit) une page de chacun des deux manuscrits (avant la p. 1 et entre les p. 32 et 33) où l’on peut constater que les deux écritures sont différentes, et aussi l’orthographe. Dans tous ses autographes, Grignion de Montfort écrit « Jesus-Christ » et le copiste de Charles Besnard s’en tient à la phonétique : « Jesus Chrit ».

  • 12 Diderot D., Encyclopédie… (cité supra, n. 3), t. XXe, p. 995.

  • 13 Ibid. t. XXIe, p. 251.

  • 14 Le chapitre XVII de L’Amour de la Sagesse éternelle rédigé par Charles Besnard contient des réminiscences et des phrases entières du Traité de Grignion. Cela tient à sa manière de composer. Charles Besnard se fixe lui-même son propre but, puis il adapte les écrits d’un autre au but qu’il s’est fixé. Il a expliqué son mode de travail aux Filles de la Sagesse en leur présentant en 1760 des Constitutions dont il avait eu lui-même l’initiative. Il estime que les sœurs avaient « un corps de règles sans en avoir l’esprit ». Le corps était les règles rédigées par Grignion de Montfort en 1715 auxquelles avaient été ajoutés des détails qui les surchargeaient : « C’est ce qui m’a déterminé, après avoir bien étudié le fond de votre règle depuis bien des années, d’en faire l’application suivant l’esprit de M. de Montfort » (Archives de la Maison générale des Filles de la Sagesse, à Rome). En fait, malgré la source qu’il utilise, son œuvre est reconnaissable au style et à l’inspiration qui est la même que celle de L’Amour de la Sagesse éternelle. (Dervaux J.-Fr., Folie ou Sagesse… ? Marie-Louise Trichet et les premières Filles de M. de Montfort, Paris, 1950, p. 576-577).

  • 15 Jean-Paul II, Ma vocation, don et mystère, Paris, Bayard / Cerf / Fleurus-Mame / Téqui, 1996, p. 12-13.

  • 16 Jean-Paul II, « Saint Louis-Marie Grignion de Montfort m’a illuminé aux moments importants de ma vie », audience à la Chapelle Clémentine, 13 octobre 2000 (texte italien, dans l’Osservatore romano, quotidien, 14 octobre 2000), p. 5.

  • 17 Bienheureux Louis-Marie de Montfort, L’Amour de la Sagesse éternelle, Pont-Château, 1929, préf. H. Huré, p. II.

  • 18 Doc. Cath. 1003 (44, 1947), col. 1429-1430.

  • 19 Frossard A., Dialogues avec Jean-Paul II, Paris, Laffont, 1982, p. 184-185.

  • 20 Arch.Montf.R. Texte communiqué par la Congrégation pour les Causes des Saints en 2001 : « Dans les écrits du Saint, il y a des aspects unilatéraux qui compromettent l’équilibre de sa synthèse de la foi et, pour cette raison — à tout le moins actuellement — le titre de Docteur de l’Église ne peut lui être conféré ».

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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