L’avenir du catholicisme dans notre pays (comme en Europe) inquiète. Il n’est pas sûr qu’il reste encore longtemps la première religion du pays. Un déclassement annoncé qui, étrangement, suscite peu de commentaires dans l’Église, comme si les évêques, les prêtres mais aussi souvent les laïcs sonnés par la crise des abus sexuels, ne savaient plus qu’assister, muets et impuissants, à l’effondrement. L’Église catholique est devenue une religion parmi d’autres, une religion « minoritaire ».

Paul Valadier, avec sa vigueur et sa clarté coutumières, s’attache à mettre en lumière ce qu’implique cette situation radicalement nouvelle, même si l’Église garde encore dans les esprits sa réputation de domination alors que l’époque glisse doucement vers l’indifférence religieuse. D’où cette surprenante béatitude que propose Paul Valadier, non sans provocation.

Il s’agit, dans une position certes inconfortable et parfois douloureuse, de tenir debout dans la tempête, pour porter toujours et encore le message de la Bonne Nouvelle. Le statut de minorité peut donc apporter un contexte favorable au témoignage chrétien dans sa portée critique et dans sa plus grande fécondité. Le message biblique fonde l’affirmation selon laquelle l’être humain, doué d’intériorité, est transcendant aux relations familiales, sociales économiques ou politiques. Ce retour aux fondamentaux suppose un inlassable combat contre toute « post-vérité » entretenue par les nouvelles technologies. Le croyant doit et peut être ce veilleur éclairé, s’il est vrai que la contemplation sauve le social et le politique d’eux-mêmes, face à une République trop souvent déboussolée. D’où de nombreuses questions abordées avec courage par l’A. (corruption des élites, euthanasie, exacerbations des mouvements féministes, attitudes devant la présence musulmane, etc.) qui mettent en évidence le rôle décisif (pour ne pas dire indispensable) que les catholiques, comme minorité active et lucide, peuvent jouer désormais. Sans oublier l’acceptation nécessaire de l’« indépassable diversité religieuse » (p. 87) et le rôle positif de l’œcuménisme.

Une audace apostolique est toutefois nécessaire face à l’urgence de transformations profondes supposant de vraies évolutions des mentalités. D’où, dans une Église désormais minoritaire, ce qui n’est pas sans problèmes, un véritable appel à l’Esprit. Ce qui impose à tous une « patience courageuse » (p. 101) qui met à l’épreuve notre hâte de découvrir le dessein de Dieu et celle d’une rencontre avec tous. Un livre nécessaire qui interroge les catholiques et tous les citoyens soucieux d’un avenir vivant et non pas figé sur un passé révolu. — M.-J.C.