Issu de cinq conférences données par Richard Bastien au Québec, l’ouvrage que voici en est une version augmentée de deux chapitres. La problématique « foi-raison » est le fil rouge du livre, à travers cinq apologistes, choisis spécifiquement pour leur parcours de conversion : ils sont tous passés d’une culture et/ou d’une confession protestante anglo-saxonne au catholicisme (ou à l’anglicanisme « High Church » dans le cas de Lewis). Pour l’A., qui développe l’idée que seul le catholicisme présente une doctrine équilibrant véritablement foi et raison, sur la base du thomisme, ce n’est pas un hasard.

Chaque notice sur les auteurs est conçue de façon structurée, avec une synthèse finale, une bibliographie des traductions françaises disponibles et des œuvres importantes en langue anglaise. Les présentations de MacIntyre et Kreeft en particulier nous ont paru fort utiles, ces deux auteurs étant moins connus du public francophone.

Dans son dernier chap., l’A. présente ce débat foi-raison sous la forme d’un tétralemme : la foi seule (fidéisme), la raison seule (modernisme), ni la foi ni la raison (postmodernisme), foi et raison (catholicisme). Chaque proposition est développée sur la base d’exemples : le fidéisme est décrit comme par excellence la position de l’islam contemporain, suivant la doctrine d’al-Ghazâlî, mais aussi de beaucoup de courants protestants. Le modernisme désigne la philosophie issue des penseurs des Temps modernes et contemporains jusqu’aux années septante. R. Bastien décrit ici une double impasse : l’idéalisme cartésien et kantien mène au subjectivisme ; l’empirisme baconien et humien, au positivisme. Le postmodernisme est le « successeur » du modernisme auprès des intellectuels occidentaux, à partir de Foucault : au-delà du relativisme, nous sommes en présence de l’héritage de Nietzsche et de son nihilisme, la raison même étant disqualifiée. Pour MacIntyre, ce dernier mouvement est le plus grand opposant actuel à la dernière position : le catholicisme. Ce dernier réconcilie foi et raison : notre auteur cite essentiellement J. Ratzinger et K. Wojtyla pour le résumer. Il termine en insistant sur les conséquences positives de cette conception : les réalisations concrètes de la civilisation chrétienne en Occident, trop souvent sous-estimée, de nos jours. — G. Kirsch