Correspondance et rencontres, préf. Ph. Barbarin, texte établi, annoté et prés. J.-M. Garrigues, R. Mougel
Henri de Lubac s.j. J. MaritainHistoria del pensamiento - reviewer : Marie-Gabrielle Lemaire
Le 1er, de R. Mougel, est intitulé: «La position de J. Maritain à l'égard de Surnaturel: le péché de l'ange, ou Esprit et liberté» (repris de la Revue thomiste consacrée en 2001 à Surnaturel). Il expose notamment l'accord entre Maritain et Lubac sur la question de la peccabilité des anges (contre une certaine tradition qui se voulait thomiste). Le 2nd, de F. Michel, présente «Jacques Maritain et Henri de Lubac en dialogue sur les traductions liturgiques (1955-1970)», article qui publie le rapport que fit Lubac à Mgr R. Boudon, de la Commission de Liturgie, sur l'essai de traduction du Credo. Cet article est sans doute celui qui nous en apprendra le plus sur Henri de Lubac, et il confirme la position énoncée dans l'introd., d'une entente profonde après le Concile entre les deux penseurs.
Dans l'introd., le dominicain J.-M. Garrigues rend compte en trois temps de la distance, des convergences et du rapprochement qui caractérisent la relation entre les deux hommes. On appréciera les éclairages apportés à la position de Maritain dans le débat sur la philosophie chrétienne, débat où, on le sait, le p. de Lubac soutenait une approche différente. De même, dans le débat autour du surnaturel, l'anthropologie maritainienne est présentée de manière synthétique et positive. On regrettera d'autant plus de ne finalement pas se sentir aussi bien introduit à la pensée de Lubac que dans d'autres volumes des OEuvres Complètes. On sent même la préférence du p. garrigues pour la position de Maritain sur «la méthode du retour aux sources bibliques, patristiques, et liturgiques, (…)», méthode, dit-il, «certes consacrée par Vatican II», mais recélant également un «danger», qu'avait «pressenti» Maritain, et qui s'est avéré réel dans la crise postconciliaire: celui «de relativisation historiciste de la vérité» (p. 27 et 28). Ce sont les termes mêmes de Labourdette (noncité) qui, en 1946, reprochait ce même relativisme historiciste à Lubac et Daniélou, entre autres, parce qu'ils voulaient élargir la notion métaphysique de vérité spéculative à la dimension de l'histoire. On aurait apprécié que le point de vue de Lubac sur cette question précise soit tout autant exposé.
Les dernières pages de l'introd. montrent admirablement la sympathie qui, par-delà les divergences de vue, existait réellement et s'est approfondie en convergence spirituelle dans le temps des épreuves de l'Église postconciliaire. Face à la crise qui convulse l'Église menacée «d'apostasie immanente» (expression de Maritain que Lubac reprend sans réserve à son compte), tous deux s'accordent pour diagnostiquer une crise incomparablement plus grave que ne le fut la crise moderniste, constat que le lecteur retiendra, et qui produisit entre les deux hommes, par ailleurs animés d'une foi commune, un rapprochement «qui fait penser à de la sainteté. C'est leur amour de Dieu qui les a rapprochés, mais aussi leur amour de l'Église» (p. 33). - M.-G. Lemaire