La 1e partie de cette Correspondance présentait le
courrier d'E. S. avant son entrée au Carmel de Cologne, le 14 oct.
1933 (cf. NRT 133 [2011], p. 328). Ce 2e tome a une
tonalité tout autre: il court en effet jusqu'à la déportation et la
mort par gazage d'E. à Auschwitz-Birkenau, le 9 août 1942. Il porte
ainsi les stigmates de la Shoah au creux de chacun des mots - les
plus simples comme les plus élevés - de ces textes circulant en ces
années dans l'Allemagne nazie. Le dossier contient aussi des
lettres de et sur sa famille ainsi que quelques billets tirés des
archives la concernant. Sr Cécile Rastoin a traduit et annoté cette
correspondance avec beaucoup de simplicité et de rigueur (pas
d'encyclopédisme mal venu mais des notes concises, bien traduites
et actualisées), permettant au lecteur d'entrer avec émotion dans
l'apocalypse d'un coeur si singulier: Thérèse Bénédicte de la Croix
(elle préfère cette appellation à son nom dans le monde,
écrit-elle) est missionnaire au Carmel et y accueille de jeunes
Juives arrivant au christianisme comme elle, nouant des amitiés
jusqu'au camp de Westerbork et la mort (cf. dans l'index, R.
Kantorowicz ou A. Reis). Attentive aux inquiétudes de son pays,
elle est proche des siens tout en restant le docteur qu'elle est,
qui discute sur Jean de la Croix (apprenant même l'espagnol pour le
traduire) ou correspond avec tel jésuite (J. Hirschmann) au sujet
du Pseudo-Denys, de Grégoire de Nysse ou du jeune H. U. von
Balthasar, alors que la ville de Cologne est sous les bombes. Les
dernières pages sont poignantes qui, dans les échanges, décrivent
la tentative inaboutie de partir en Suisse: tout est souvent écrit
en sous-entendus, l'espoir ne s'y confond jamais avec l'espérance
de la lumière brillant dans les ténèbres. - A. Massie sj