Spécialiste de Bède le Vénérable (672-735) docteur de l'Église, G.
Caputa osb part des 24 textes de cet auteur réunis par P. Dabin sj
dans ses deux volumes classiques sur le sacerdoce des fidèles et
les situe dans le contexte ecclésial, liturgique et théologique des
VIIe-VIIIe siècles pour en unifier et valoriser les données. Il
distingue trois périodes dans la pensée et l'activité littéraire de
Bède, puis analyse chronologiquement les termes bibliques sur le
sacerdoce avant de passer aux termes proches ou synonymes afin de
découvrir l'origine du sacerdoce chrétien des fidèles, ses
conséquences et ses liens avec les rôles prophétiques et royal. Sa
pensée apparaît de façon occasionnelle, au fil des textes, avec
quelques regroupements, ce qui rend malaisée toute synthèse. Après
une longue étude herméneutique menée avec rigueur, Caputa conclut
que le sacerdoce des fidèles, dérivé du baptême, est un thème
important pour Bède, qui en a fait un terme souple avec des
dimensions sociales, initiatiques et missionnaires. Dans les
débuts, Bède s'en tient à la doctrine néotestamentaire des textes,
puis il découvre la nouveauté du sacerdoce chrétien par rapport à
l'A.T. et la construction de l'Église comme temple spirituel en
croissance continue. Sa pensée tourne autour du pilier central
constitué par 1 P 2. Plus tard, Bède élabore sa propre conception
théologique sur le sujet en synthétisant ses découvertes et en
faisant preuve de créativité. Il montre l'interaction entre
christologie et pneumatologie dans le Christ total et il précise le
caractère sacerdotal de toutes les activités de l'Église. Il étend
audacieusement à tous les membres de l'Église certaines fonctions
telles que l'intercession, le pardon des fautes quotidiennes,
l'onction des malades, la prière continue. Loin de renier le clergé
et la hiérarchie, il affirme que le clergé hiérarchique existe en
fonction des fidèles. Il fait une place aux femmes dans le
sacerdoce des laïcs et il met en valeur l'activité de deux grandes
abbesses d'abbayes doubles (hommes-femmes) qui formèrent des
prêtres et jouèrent un rôle actif dans des synodes locaux, ce qui
fait d'elles des «doctrices» (doctoresses).
Le sacerdoce des fidèles, basé sur le baptême est supérieur au
sacerdoce ministériel qui en découle, affirme A.M. Triacca dans sa
présentation. Aujourd'hui encore la théologie de Bède garde sa
valeur pour orienter tous les chrétiens vers une action
missionnaire et la perfection. Travail bien construit qui mérite
des éloges. - B. Clarot, S.J.