«La perfection c'est la charité». Vie chrétienne et vie religieuse dans l'Église du Christ, intro., trad. et annot. J.-P. Torrel op

Thomas d'Aquin
Vida consagrada - reviewer : Alban Massie s.j.
À l'occasion du huitième centenaire de la fondation de l'Ordre des frères prêcheurs, J.-P. Torrell offre un vrai cadeau aux dominicains et à tous les consacrés en publiant ensemble les trois traités qu'écrivit Thomas sur la vie spirituelle et religieuse: Contre les ennemis du culte de Dieu et de l'état religieux, Sur la perfection de la vie spirituelle, Contre l'enseignement de ceux qui détournent de l'état religieux. Le contexte de leur rédaction est connu: la polémique entre les séculiers de l'Université de Paris, représentés par Guillaume de Saint-Amour, et les ordres mendiants, franciscains et dominicains, qui revendiquaient le droit d'enseigner au nom de la pauvreté évangélique. La lutte fut chaude et l'introduction de l'ouvrage en rappelle les étapes. Le premier traité fut publié vers 1257, le second lors du retour de Thomas à Paris en 1270, le troisième en 1271. Ces livres ne sont pas d'une lecture confortable, car la doctrine thomasienne s'y exprime à partir de l'argumentation polémique de ses adversaires: ceux-ci reconnaissent que les religieux tendent vers la perfection, ce qui impliquerait qu'ils ne peuvent y conduire d'autres qu'eux-mêmes, selon une ecclésiologie que Torrell qualifie de «fixiste». On peut résumer la position de Thomas ainsi: ce qui fonde l'état religieux dans l'Église, c'est la charité comprise comme la perfection de la vie spirituelle (cf. 1 Co 13,2; 1 Jn 3,14). Contre les séculiers, Thomas refuse d'opposer conseils et préceptes: la perfection consiste en effet dans la suite du Christ et les conseils ne sont que des moyens - instrumenta - de parvenir à cette fin. La pauvreté apparaît alors comme le moindre des trois voeux. L'état de perfection n'est pas réservé aux religieux: l'épiscopat est même plus parfait que celui des religieux (cf. surtout le De perfectione). Ces derniers peuvent légitimement offrir des enseignements dans la mesure où leur condition est régie par la vertu de latrie où la charité envers le prochain a sa place. L'enseignement est alors perçu comme une oeuvre de miséricorde. L'édition bilingue reprend le texte de la Léonine (Dondaine, 1970). En appendice, on trouvera 4 textes choisis judicieusement pour leur lien avec notre sujet: une question quodlibétique sur «Perfection et imperfection» datée de 1269 (Quodlibet I, 7, 2); un extrait du Commentaire sur l'évangile de Matthieu (éd. Marietti, n. 820-826) sur les conseils adressés par Jésus aux Douze (cf. Mt 10,9-10); une homélie sur la parabole du semeur (cf. Mt 13; Lc 8), datée de 1270 (éd. Käpelli, Archivum fratrum praed. 13, 1943, p. 76-85); ce que dit la Somme sur la pauvreté, le moindre des trois voeux (S.T.2a 2ae, 188, 7). - A. Massie sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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