Le titre suggère une opposition tranchée. Nous craignons le
« totalitaire », notre mémoire n'est pas si courte
qu'elle en oublierait ce qui dans nos discussions évoque le pire…
Avons-nous conscience de ce qui est réaliste ? Le débat
proposé dans cette réflexion par une femme médecin, diplômée en
politiques européennes de santé et universitaire, professeur
d'éthique, est tout sauf simpliste. Sans diaboliser le
« progrès » médical, elle nous aide a réfléchir à la
visée de ces « progrès » qui, en plus de se préoccuper
d'affiner le diagnostic, d'améliorer le soin, de viser le
« care », semblent s'aventurer vers une « santé
augmentée »… L'homme est, dirait-on, agité par des fantasmes
d'immortalité, de « transhumanité » prométhéens. Les
médias soutenus par des puissantes aides publicitaires y font
aujourd'hui écho en vue d'une reconnaissance sérieuse et… de
financements privés ou publics. Le « Human Brain
Project » (<>) en est peut-être, pour la neurobiologie,
un exemple récent et très officiel. Le travail de l'A. est donc
particulièrement ad rem et s'interroge sur les
thèmes cruciaux : les déplacements opérés par la
médicalisation de l'existence humaine, la médecine moderne et son
expérimentation grandeur nature, le monde de
l'« enhancement », la corporéité informée par la médecine
biotechnologique, et d'autres questions qui situent le débat. Le
propos ouvre aussi des pistes plus fondamentales : une
théologie autour d'un Fils crucifié et ressuscité, rêve
« prolongéviste » et salut par le faire, des modèles
anthropologiques, corps vulnérable, corps de grâce… On l'aura
deviné : ce livre clair et documenté (une brève bibliographie
est en place) donnera à la réflexion chrétienne, en plus d'un état
des lieux parfois inquiétant, une aide éclairée et
courageuse. - J. Burton s.j.