La voie du Christ, t. II : développements de la christologie dans le contexte religieux de l'Orient ancien. D'Eusèbe de Césarée à Jean Damascène (IVe-VIIIe siècles)
Michel Fédou s.j.Teología - reviewer : Laurent Pidolle
Le tome 3, qui couvre la 2de moitié de l'époque patristique en Occident, achève cette remarquable trilogie d'histoire de la christologie ancienne qui intéressera autant les novices en la matière que les chercheurs, à cause des pistes ouvertes et à explorer. Ce vol., encore davantage que le précédent, présente la double originalité, d'une part, de situer les Pères dans leurs temps, marqués non seulement par les grandes controverses au sujet de l'identité du Christ, mais aussi par la confrontation au judaïsme et au paganisme, par le souci missionnaire vis-à-vis des « barbares » - les migrants de l'époque -, et par le formidable changement de civilisation qui s'opérait ; et, d'autre part, d'en suggérer les conséquences pour la rencontre évangélisatrice du christianisme avec les cultures et la religiosité contemporaines. Confrontés à l'arianisme, Hilaire réfléchit sur l'acte de dépouillement qu'est la kénose du Fils, et Marius Victorinus rend compte philosophiquement du « consubstantiel » de Nicée. L'A. fait droit à l'histoire et à une christologie historique qui nous montre des traits parfois peu développés des Pères latins, comme la christologie des hymnes de Victorin à Rome et de Venance Fortunat en Gaule, la dévotion personnelle de Jérôme pour le Christ, le lieu historico-pastoral, liturgique et expérientiel de la christologie augustinienne montrant que la nouveauté du christianisme réside dans la révélation de la voie de l'unique Médiateur afin d'accéder à la Patrie divine vers laquelle tous tendent ; l'A., en théologien contemporain, révèle combien cette doctrine christologique demeure actuelle, dans les mutations auxquelles nous assistons, tant pour suivre le chemin du Christ que pour témoigner de son sens, dans la rencontre des cultures et des autres traditions religieuses. De fait, Rufin eut le souci de transmettre à l'Occident latin l'héritage de l'Orient grec, et Boèce ou Isidore en Espagne assumèrent le meilleur de la philosophie antique. Un autre exemple : la controverse de l'Autel de la Victoire à Rome où Symmaque, dans sa vision politique des religions, prône la tolérance des anciens cultes romains, ce qui aurait obligé les sénateurs chrétiens à prêterserment auprès d'une ancienne divinité païenne ; Ambroise y répond avec l'exigence de sa foi emmembrée de raison en la Vérité manifestée historiquement aux hommes dans le Christ. Sans oublier Léon ou Grégoire le Grand dont la christologie toute biblique est de montrer la voie de la Parole faite chair dans la lettre des Écritures, afin de ramener les hommes à l'intériorité de Dieu, dans la gravité eschatologique de l'histoire, la sienne, la nôtre. - L. Pidolle