Les réflexions et les décisions du Card. Lustiger ne sont pas
qu'«oeuvres du passé». Nous en vivons encore. Il reste à les
approfondir et à leur donner toute leur amplitude. Deux colloques
ont précédé celui-ci: Le Cardinal républicain (2010) et L'Europe à
venir (2010). Il fallait aussi un (ou plusieurs?) colloques sur
l'une des priorités de sa prière et de son action: Le sacerdoce.
Cette thématique n'est pas périphérique dans sa vie ni dans la vie
de l'Église. Le sacerdoce est au carrefour de la vie sacramentelle
et ecclésiale des chrétiens. Pour ce qui concerne le rapport
Église/Monde, les prêtres ont à se situer de manière différente
dans une société multiculturelle et sécularisée. L'action du Card.
Lustiger eut un caractère «prophétique» qu'il est nécessaire de
mieux comprendre aujourd'hui, alors que les interprétations de
l'identité sacerdotale non seulement sont différentes mais
divergent de plus en plus. Les initiatives (genèse et enjeux) du
Card. Lustiger sont présentées et réfléchies par des témoins
proches et par des auteurs de qualité: Maison Saint-Augustin (Mgr
E. Aumônier), Séminaire de Paris, École Cathédrale, Faculté de
Théologie Notre-Dame (P. Fr. Louzeau), Fraternité Missionnaire des
Prêtres pour la Ville (Mgr J.-Y. Nahmias). Ces fondations et les
«paroles» qui les accompagnaient donnent encore à penser. En ce
sens, ces actes représentent un carrefour incontournable pour ceux
qui désirent prendre la mesure des enjeux du sacerdoce et de la
formation aujourd'hui.Les divers intervenants se sont attachés à
mettre en évidence l'importance de la Parole de Dieu, ordonnée à la
vie et au ministère du prêtre, à la mission de l'Église (P. Fr.
Louzeau et P. R. Tardy). L'itinéraire du Cardinal lui-même fut
marqué par des figures sacerdotales qu'il était bon de présenter
(G. Pelletier). La prédication de Mgr Lustiger n'a jamais laissé
indifférent: l'analyse d'A.-M. Pelletier en souligne des points
décisifs de même que la finesse et l'audace de l'homme en «état de
parole». Ses homélies de «circonstances», en lien avec un don
personnel et un souci culturel évidents, étaient pleines de
richesses spirituelles et humaines. L'analyse de ce qu'il disait
aux prêtres qu'il ordonnait (P. M. Gueguen) n'est pas qu'un
programme, mais comme une parole «performative» liée souvent aux
apôtres (saints Pierre et Paul) fêtés lors des ordinations.
L'évocation de la mission épiscopale (Mgr. P. d'Ornellas) comme
«veilleur» nous place loin d'une fonction administrative ou
d'autorité. Ces enjeux dépassent la personne du Card. Lustiger et
les lecteurs, mais la lecture nous rend participants d'un combat
spirituel étonnant sur l'identité du sacerdoce et, depuis le
dernier Concile, sur le lien entre le peuple sacerdotal et ses
prêtres (Mgr E. de Moulins Beaufort).Nous ne pouvons rendre égale
justice à toutes les interventions qui sont de qualité. N'oublions
cependant pas le lien fraternel et spirituel qui unissait dans le
même sacrement partagé le Pape Jean-Paul II et le Card. Lustiger
(P. V. Guibert). Son attachement au «charisme ignatien» dépasse les
affinités personnelles et spirituelles pour rejoindre la thématique
centrale du Peuple de Dieu: l'élection reste une clé herméneutique
décisive pour comprendre la foi du baptisé et surtout sa manière de
répondre au Seigneur dans l'histoire telle qu'elle est (P. Th.
Lievens sj). En ce sens, la libre dynamique des vertus baptismales
et sacerdotales est d'une actualité historique décisive pour qui
sait voir et dépasser les clichés affectifs, diocésains et
religieux. Les auteurs manifestent leur admiration et leur
compréhension des «enjeux», des «carrefours» où la liberté
chrétienne du Cardinal s'est engagée à sa manière et dans le temps
qui était le sien. Quelques références et textes en annexe sont
offerts comme en surcroît pour ceux et celles qui seront amenés à
approfondir encore cette abondante matière. Les interventions de
Mgr Charles-J. Chaput et du Card. A. Vingt-Trois manifestent le
rayonnement international et national d'une personnalité marquée
par son origine, transformée par l'onction sacerdotale et
épiscopale, désireuse de se mettre au service d'une Église aimée et
servie par toutes les forces de l'intelligence, de la parole, des
sacrements reçus et donnés. Si la matière des actes est abondante,
elle nous indique également qu'elle n'est pas épuisée et que
d'autres recherches et initiatives restent à promouvoir avec les
témoins qui n'ont pas encore pu parler et des générations qui n'ont
pas connu cette personnalité forte. - A. Mattheeuws sj