Pasteur luthérien (1936) devenu catholique (1939) et prêtre de
l'Oratoire (1944), Louis Bouyer (1914-2004) est professeur à
l'Institut Catholique de Paris jusqu'à sa démission en 1962 suite à
une mésentente avec J. Daniélou. Grand théologien reconnu par ses
pairs (de Lubac, Congar, Ratzinger, Balthasar…), écrivain
polyvalent, grand érudit, il a publié une cinquantaine de livres
concernant: l'Écriture, la patristique, la liturgie, les trois
états de vie (monastique, sacerdotal, baptismal), l'Eucharistie, la
Mère de Dieu… Thomas More, Erasme, Philippe de Neri, Newman, Dom
Lambert Beauduin, les femmes d'Église… et quatre romans parus sous
divers pseudonymes. Enseignant régulièrement aux États-Unis depuis
1952 et jusque dans les années nonante, il a rédigé plusieurs de
ses oeuvres en anglais. Dans deux de ses ouvrages il marque sa
distance vis-à-vis de l'Église de France: La Décomposition du
catholicisme (1968); Religieux et clercs contre Dieu (1975).
Ostracisé à partir des années soixante, il n'a pas participé au
Concile, aucun évêque n'osant l'y emmener. Il pourfend la
pseudo-liturgie et le faux oecuménisme, l'action catholique
spécialisée, l'eschatologie rose de Teilhard. Il regrette que le
judéo-christianisme n'existe plus qu'à l'état de traces: le
judaïsme toujours vivant est important pour la liturgie, la
spiritualité, la théologie et la vie chrétienne. Son oeuvre est
aujourd'hui un peu datée, mais ses intuitions gardent leur
pertinence. Parmi les sujets manquant à sa grande fresque relevons:
le mariage et la famille, le travail et le politique, la musique,
le cinéma… Notons, pour la petite histoire, que Julien Green le
mentionne une trentaine de fois dans son journal et que Philippe
Noiret, qui a été son élève, affirme lui devoir sa vocation
d'acteur. Un ouvrage court, clair, concis, enrichi d'une précieuse
bibliographie, rédigé par un vieil ami d'un maître dont on nous
promet la publication des Mémoires posthumes. - P. Detienne sj