La «boîte à remède», ainsi que la qualifie son auteur, est le plus
important recueil d'hérésies - au sens large du terme - de la
littérature patristique. L'évêque de Chypre (il ne s'agit pas du
Salamine de la bataille) l'écrivit entre 373 et 375. Son travail
n'est pas théorique. Originaire de Palestine, il fut confronté
lui-même au supermarché des religions que représentait l'est
méditerranéen de son temps, entre gnostiques, manichéens, ariens ou
judéo-chrétiens et orthodoxes.L'ouvrage se compose de 3 livres,
divisés en 7 volumes dans lesquels sont présentées et réfutées 80
hérésies et schismes. Le premier livre, qui est ici traduit sous la
direction de G. Pini se fondant sur le travail déjà ancien de C.
Riggi, contient 3 tomes pour 46 hérésies: celles qui ont précédé
l'incarnation - des barbares aux samaritains en passant par
l'hellénisme et le judaïsme - et celles qui ont surgi après
l'incarnation du Christ - de Simon et Ménandre à Tatien. Le
deuxième livre, non encore traduit, va des encratites aux ariens.
Le troisième aboutit à l'hérésie des massaliens (secte d'illuminés
prônant la prière absolue; Augustin les assimilera aux moines
euchites), avant de se conclure par un De fide, synthèse de la
juste foi catholique sur la Trinité, l'incarnation, la
résurrection, le jugement dernier et sur les exigences que comporte
la vie chrétienne authentique. Il faut souligner, outre la riche
bibliographie qui précède le texte bilingue basé sur l'édition
critique de Holl (GCS 25, 31, 37) et la qualité des notes au long
des pages, un long essai de G. Aragione sur le Panarion comme
«histoire» universelle de l'hérésie (p. 5-61). G.A. situe l'oeuvre
dans la vie et le siècle d'Épiphane, temps riche en controverses
doctrinales, mais elle s'intéresse surtout au concept et au genre
littéraire que constitue l'hérésiologie, en tant qu'elle s'enracine
dans les oeuvres des apologètes du iie siècle. Cet ouvrage livre
donc un texte important dont on s'étonne qu'en français n'ont été
traduites, pour le moment, que quelques-unes de ses notices: c'est
grâce au Panarion en effet qu'on connaît la fameuse Lettre à Flora
du valentinien Ptolémée ou la Lettre à Julien de Marcel d'Ancyre
dans la crise arienne. - A. Massie sj