La deuxième partie porte sur la «transmission de la faille». C'est l'idée juive que l'on est toujours «pécheur» (pas nécessairement en faute), par rapport à l'Être mais aussi bien que la Loi elle-même comporte une cassure (pas d'idolâtrie de la Loi). Et c'est l'idée psy de la castration: pour que la vie se transmette, il faut faire le deuil de la complétude.
Relisant le Livre, l'A. avait déjà dégagé certains «effets» déterminants: l'effet Babel, l'effet Job, l'effet Jonas. Ici, il dégage «l'effet Moïse» et il lui paraît que Freud dans son Moïse l'a bien remarqué, même si bon nombre de ses hypothèses sont critiquables. Au fond, Freud dit aux juifs: «votre emblème Moïse n'est pas à vous». «L'effet Moïse», c'est dire qu'on n'est pas identique à son nom, avec l'invitation de fréquenter l'entre-deux.
Cet ouvrage stimulant et alerte tant par la pensée que par son style, n'hésite pas à secouer aussi bien le judaïsme comme religion que «le peuple psy». Il ne manque pas non plus de soulever pas mal de questions (le contraire serait étonnant…). En parlant d'Être, D.S. s'éloigne assurément d'un concept métaphysique abstrait, mais ne risque-t-il pas de réduire la symbolique concrète des images bibliques du divin? Par ailleurs, quel statut faut-il reconnaître aux religions dans la gestion du symbolique (ce n'est tout de même pas un hasard, ce rapprochement entre judaïsme et psychanalyse)? De son côté, le freudisme serait-il un avatar laïque de la pensée juive? Cela se dit. - H. Thomas, O.S.B.