Rosmini et Gioberti, pensatori europei, éd. G. Beschin & L. Cristellon

Col.
Historia - reviewer : Bruno Clarot s.j.
Ce septième congrès international sur Rosmini s'est employé à le comparer à Gioberti, autre penseur italien, son contemporain mais très différent. Antonio Rosmini, prêtre, fondateur de deux Instituts religieux et d'écoles, fut chargé par le roi de Piémont de négocier en 1847 avec Pie IX un projet de confédération italienne. La révolution de 1848 fit sombrer ce projet. Rosmini resta toute sa vie fidèle à l'Église et Pie IX songea même à le créer cardinal. Penseur original, il chercha toujours à mieux comprendre sa foi. Il écrivit beaucoup. Sa philosophie, dans la ligne d'Augustin et de Bonaventure, est une réflexion de l'homme sur l'homme pour le rendre meilleur. Sa théologie veut montrer la rationalité de sa foi et situer le christianisme dans la culture de son temps. Son livre de 1848 sur l'aggiornamento de l'Église est mis à l'index, mais sera réhabilité par Vatican II. Trente ans après sa mort on publie ses oeuvres posthumes dont 40 propositions seront condamnées, ce qui détournera les catholiques de ce grand penseur jusqu'en 1955. Il écrit encore six volumes sur la philosophie du droit pour contrer les théories de Hegel. En politique, il est pour le fédéralisme italien et proche du socialisme, mais opposé à ses méthodes.
Vincenzo Gioberti (1801-1852) est fort dissemblable. Prêtre turinois, chapelain royal, il devint républicain, carbonaro même et démissionna de la cour royale. Interné en 1833 puis exilé, il s'établit à Bruxelles, enseigna la philosophie et écrivit sur la politique italienne. Élu député à Turin en 1848, Il fait un retour triomphal au pays, salué comme «père de la patrie» et parcourt l'Italie en haranguant les foules. Pie IX l'accueille également. Il se consacre à la politique, devient ministre, puis président du conseil; il veut créer une coalition contre l'Autriche, échoue, démissionne et peu après s'exile à Paris où il meurt très tôt. Ses idées ont fort évolué. Avant 1833, il cherche sa voie en philosophie et passe du scepticisme au panthéisme. De 1833 à 1848, il professe le catholicisme, se rapproche de l'ontologie de Rosmini, prône un libéralisme modéré et un fédéralisme italien présidé par le pape et par le roi du Piémont. Après 1848, il veut l'unité italienne sous le seul roi du Piémont, dénonce le pouvoir temporel du pape et l'influence corruptrice du christianisme dont il esquisse une réforme de type «moderniste».
Ce volume rapporte 19 essais d'auteurs italiens et fait alterner autant que possible les articles sur l'un et l'autre penseur à propos des mêmes questions. En philosophie d'abord, on fait dialoguer les deux hommes sur le rationalisme, l'ontologie, l'anthropologie, la morale, la connaissance; en théologie, on trouve philosophie et théologie de la révélation, nature et grâce, réforme de l'Église, la réception théologique des deux penseurs; en politique, les quatre articles sont d'un autre type: Gioberti et la démocratie, Gioberti et le gouvernement, le problème de la guerre chez Rosmini et enfin religion-nation-démocratie chez tous deux.
Les deux hommes ont joué un rôle important dans le risorgimento italien au XIXe s. S'ils sont partis des mêmes idéaux, ils ont rapidement divergé. Rosmini demeura fidèle à sa ligne chrétienne et fut surtout un penseur profond que l'on étudie de plus en plus, tandis que Gioberti se montra un piètre philosophe et fut surtout un théoricien politique et un brillant orateur, qui changea plusieurs fois d'orientation et même du tout au tout. - B. Clarot sj

newsletter


the review


La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

contact


Nouvelle revue théologique
Boulevard Saint-Michel, 24
1040 Bruxelles, Belgique
Tél. +32 (0)2 739 34 80