Stromates. Stromate VI, éd. Mgr P. Descourtieux

Clément d'Alexandrie
Historia del pensamiento - reviewer : Albert Chapelle s.j.
À l'exception des Stromates III et IV, SC a maintenant publié l'ensemble de l'oeuvre de celui qui n'apparaît plus seulement comme un prédécesseur d'Origène, mais comme son «maître» (p. 8). Le Stromate VI, daté des environs de l'an 200 (p. 11), est une tapisserie au dessin plus ferme qu'il n'y peut paraître. Clément (Cl.) y «façonne» la «statue du gnostique» (168,4) véritable. Celui-ci ne peut se satisfaire de la sagesse grecque. Sous couleur de dénoncer le «larcin des grecs» (II, 4), Cl. décrit avec complaisance la richesse d'une culture étincelante qui vit d'emprunts et d'échanges, et dont le dynamisme s'enracine en dehors d'elle-même, dans la révélation divine. Les Grecs connaissent Dieu sans l'adorer en vérité (pas plus que les juifs, s'empresse d'ajouter Cl.), même si «l'unique ordonnateur des deux Alliances (leur) a lui-même donné la philosophie grecque» (42,1). Cl. va même appliquer aux Grecs païens «le terme d''alliance', caractéristique des rapports d'Israël avec Dieu et de l'Église avec le Christ» (P.Desc. p. 146 n. 4; cf. p. 32). Le refoulement du juif par le grec apparaît, ici, violent.
L'universalité du salut ne s'en étend pas moins à toute chair, elle est dispensatrice de la sagesse éternelle (54,1). La philosophie véritable s'éprend de cette Sagesse créatrice et éducatrice. À cet effet, le gnostique, purifié et juste, studieux, libéré des passions, curieux du savoir, vertueux et parfait, apprend et comprend l'Écriture (115,1 - 148,6). Cl. offre ici une théorie de l'exégèse (115-132) suivant «l'accord à l'unisson de la Loi et des Prophètes avec le Testament transmis lors de la venue (parousia) du Seigneur» (125,3). Finalement le gnostique pratique la philosophie, condition d'accès à la contemplation de la vérité, à la connaissance du Fils de Dieu. Le passage de la philosophie à la foi est décrit comme la greffe d'un olivier sauvage sur un olivier franc (118,2), sur le Christ lui-même. L'olivier franc n'est plus ici la figure d'Israël, si bien que «dans le cas des juifs (119,2), les termes de S. Paul sont inversés: la branche sauvée (gnostique) est greffée sur la branche sauvage (juive)» (P.Desc. p. 294 n. 2). Il ne suffit pas à un païen de devenir chrétien pour cesser de méconnaître le juif!
Le résumé (p. 13) de P.Desc. et plus encore son «plan détaillé… qui correspond aux sous-titres insérés dans la traduction» (p. 20) sont remarquables et éclairants. L'éditeur rappelle la tradition manuscrite (p. 37) ainsi que les éditions (p. 39) et traductions (p. 40) des Stromates depuis 1550. La note sur l'apparat critique (p. 43-44), avec la préférence donnée au manuscrit L sur l'édition Stählin, retient l'attention. La culture de l'Alexandrin était étincelante, l'érudition de son éditeur ne semble pouvoir être prise en défaut. L'abondance et la rigueur des notes en témoignent. Le style du traducteur a gardé l'élégance de son modèle. Mais pourquoi traduire allégoreitai par «symbolise» (131,3) et anagontes par «analogie» (149,4)? Une bibliographie abondante (p. 47-52) et les indices scripturaires, d'auteurs anciens (p. 411) et des autres noms propres cités par Clément (p. 417) donnent son fini à l'édition scientifique d'un texte à ne pas laisser entre les mains des spécialistes. - A. Chapelle, S.J.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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