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Henri de Lubac (1896-1991). Une vue panoramique

Georges Chantraine s.j.
Lecteur infatigable, doué d’une vive sensibilité, anti-maurrassien, Henri de Lubac a un sens très vif de la dimension sociale et intérieure de la vie : Catholicisme (1938) l’atteste. S’étant donné à Dieu dans la Compagnie de Jésus (1913), ayant pratiqué ce don aux armées (1915-1919), il est en philosophie thomiste et blondélien. Scruté depuis 1924 au plus tard, le Surnaturel considère la relation immédiate de Dieu et de l’homme ; tel est aussi l’objet de Sur les chemins de Dieu (1956) et des trois écrits sur le bouddhisme. Histoire et Esprit (1950) et Exégèse médiévale. Les quatre sens de l’Écriture (1959-1964) rappellent comment se constitue l’herméneutique chrétienne. Notre auteur, proscrit par l’encyclique Humani generis (1950), fut réhabilité par Jean XXIII. Sa participation au Concile amène sa réaction contre une dérive de l’enseignement conciliaire, présente dès 1964.

L’horizon de l’histoire de l’Église

Henri de Lubac est connu comme un des grands théologiens du XXe siècle. Il est né à Cambrai le 20 février 1896 et mort à Paris le 4 septembre 1991. Il a participé au Concile Vatican II, s’y est lié d’amitié avec Karol Wojtyła (1920-2004), qui devenu pape l’a créé cardinal en 1983. Il est célèbre surtout par son livre Surnaturel, paru en 1946, qui lui a valu d’être privé de son enseignement à Lyon de 1950 à 1959 et d’être visé par l’encyclique Humani generis de Pie XII en 1950. Sa participation au Concile fut dès lors considérée comme une réhabilitation. Voilà ce qu’on pourrait trouver dans la partie biographique du Larousse.

Comme la biographie que je suis en train de rédiger, mon exposé se divisera en quatre parties : de la naissance à la démobilisation (1919) ; la formation jésuite de 1919 à 1929 ; l’enseignement et le désert de 1929 à 1960 ; le Concile et l’après-Concile de 1960 à 1991. Les deux premières périodes sont presque ignorées ; elles sont pourtant riches, comme nous allons le voir. La troisième est bien connue par le Mémoire sur l’occasion de mes écrits. La dernière fait connaître la participation au Concile et les combats postconciliaires.

Nous avons de la peine à nous représenter la vie catholique de 1880 à 1960. En France et en Allemagne, moins en Italie et en Angleterre, le catholicisme est aussi glorieux que les IVe et Ve siècles, les siècles de la grande patristique grecque et latine. Vatican II marque l’apogée d’une telle renaissance du XXe siècle. Nous n’en avons pas ordinairement conscience. Une des raisons est que les historiens sont attentifs à un autre phénomène concomitant : l’intégrisme sévissant en France. Mais ce phénomène est sans proportion avec la puissance du renouveau qui a triomphé lors du Concile. Ce renouveau guide l’Église. Tel est l’horizon de notre histoire et de celle du P. de Lubac. C’est l’horizon propre à l’histoire de l’Église qui n’est pas mortelle comme les sociétés humaines. Car elle est menée par l’Esprit Saint qui fait surgir des renouveaux au milieu même des déclins.

I De la naissance à la démobilisation (1896-1919)

Henri de Lubac est le troisième enfant de Maurice de Lubac (1860-1936) et de Gabrielle de Beaurepaire (1867-1963). Il est ardéchois par son père et bressan par sa mère. Deux sœurs le précèdent, Louise, qui deviendra carmélite, et Marie, qui se mariera. Il est suivi par Paul, Marguerite, qui se marieront l’un et l’autre, et par Xavier, qui mourra en 1930. Agent à la Banque de France, Maurice de Lubac fut éduqué à Mongré, collège jésuite ; il est fidèle aux papes et aux évêques ; il prie avec sa famille le soir et la prière comprend un examen de conscience et le Souvenez-vous. Gabrielle de Beaurepaire, tôt orpheline et éduquée par les Sœurs de la Visitation, est bonne, pauvre et attachée à Dieu par le fond du cœur. Maurice de Lubac et sa femme n’eurent jamais de désaccord entre eux. Les deux familles sont légitimistes. Mais Maurice de Lubac se rallia à la République, comme Léon XIII l’avait demandé en 1892. Aussi ne mêle-t-il pas politique et religion. Il n’est pas disciple de Charles Maurras. C’est un fait rare dans un tel milieu. Il est décisif pour Henri, son fils : celui-ci est anti-maurrassien. Maurice de Lubac est politiquement proche d’Albert de Mun et de Hyacinthe de Gailhard-Bancel, deux députés attentifs à la dimension sociale. Albert de Mun est à l’initiative de l’Association catholique de la jeunesse française (ACJF), qui forma la jeunesse à la vie chrétienne et à l’action politique. Le cardinal Gerlier, archevêque de Lyon, en fut un président. Suivant son père, Henri perçut dès l’âge de 10 ans les engagements divers des catholiques ; il fut attentif à la dimension sociale. Il vivait dans une famille aux revenus modestes, entouré par ses parents de tendresse et de sévérité. La confiance régnait entre les parents, les frères et sœurs.

Formé à Bourg en Bresse par un frère des Écoles chrétiennes, Henri eut le goût et « le désir d’écrire des phrases bien équilibrées, bien charpentées, avec des articulations exactes »1. Le souvenir unique, instantané, « sans avant ni après », qu’il garda de sa maison de Cambrai, laisse deviner une sensibilité pure dans laquelle les choses s’impriment. Henri de Lubac perçoit les choses avec pudeur. Une telle langue, une telle sensibilité est celle d’un poète. Henri de Lubac écrivit vers 14-16 ans des poèmes. Ceux-ci disent surtout l’abîme entre la créature et le Créateur ; seul l’abandon au Dieu incarné, donné dans son eucharistie, permet de franchir cet abîme. La Vierge Marie et le Cœur du Christ aident aussi le jeune homme à trouver Dieu et sa vocation qu’il découvrit grâce à l’aide du P. Eugène Hains, un marseillais, londonien par son humour, très attaché à son fils spirituel pour lequel il récita jusqu’à la fin de sa vie le Veni Creator Spiritus (MOÉ 398). Élève du collège de Mongré, comme son père, collège destiné aux familles patriciennes que fréquenta aussi Pierre Teilhard de Chardin, Henri de Lubac réussit tout juste son baccalauréat à seize ans en 1912. Son professeur de poésie, M. Bernardini, dit Pilon, lui « a révélé Lamartine. […] Lamartine, pour moi, c’était la poésie, la poésie pure ; c’était la musique, et c’était la religion » (MOÉ 414). Son professeur de rhétorique, Claude Mondésert, qui excellait en grec, lui inculqua la méthode et la rigueur.

Après le baccalauréat, Henri de Lubac décida d’entrer dans la Compagnie de Jésus en 1912. Il avait 16 ans. Son père lui demanda d’attendre un an. Il le passa à la faculté de droit de l’Institut catholique de Lyon, faculté conservatrice dirigée par un doyen, Joseph Rambaud, directeur du Nouvelliste : il fut un étudiant vigilant. Ne trouvant pas à son goût l’Association catholique de la Jeunesse française ni la Chronique sociale, repoussant l’Action française, il fonda avec des camarades de Mongré la Société Brunetière. Fernand Brunetière (1849-1906) était alors apprécié, car ce critique littéraire était passé du positivisme à la foi catholique et il rendait aux chrétiens, persécutés par le laïcisme, leur fierté. Ce petit groupe d’amis voulait incarner les idées dans des pratiques, suivant une pratique proche de la Compagnie de Jésus, que le P. Hains approuvait et dirigeait depuis Alexandrie. Il publiait un petit Bulletin. C’est là que Henri publia ses premiers articles. Ils sont inspirés de ses lectures, car Henri est un lecteur infatigable. Il s’intéresse surtout à l’histoire et à la religion. Il perçoit le drame de la vie. Âgé de dix ans, il a lu Crime et châtiment de Dostoïevski. Il se représenta le roman comme s’il s’était passé dans le quartier de Brotteaux à Lyon où il habitait. « Tout cela s’est imprimé si fort en moi qu’il m’est impossible maintenant encore d’imaginer les choses autrement » (MOÉ 413). Henri de Lubac fut marqué par un autre livre, livre de prix, offert par le P. Hains : Christus, livre remarquable, souvent réimprimé, qui montrait l’originalité du christianisme parmi les autres religions et combattait ainsi le livre Orpheus de Reinach. Dans ses articles du Bulletin de la Société Brunetière, Henri de Lubac critique le laïcisme, soutient la politique de réarmement de la France, expose la « question sociale » et étudie l’œuvre d’un historien chrétien et homme politique, Étienne Lamy.

Le 13 octobre 1913, il entre au noviciat de la province de Lyon, réfugié à Saint Leonards on Sea (Sussex) depuis les mesures antireligieuses prises par la République française. Il y fut accueilli par l’austère et bon Père François Vulliez-Sermet (1860-1942). Henri éprouva vivement la rupture entre sa famille, à laquelle il resta très attaché, et la vie religieuse où l’on sert Dieu seul. Les grands Exercices le confirmèrent dans sa vocation. Avec ses conovices et selon l’esprit du Maître des novices, il a une profonde dévotion au Cœur du Christ. Il fut profondément marqué par trois événements qui le sortirent de la monotonie du noviciat : les derniers vœux du P. Roiron et du P. Joseph Huby (1878-1948), professeurs de théologie à Ore Place, le théologat situé proche du noviciat, deux conférences du P. Auguste Valensin sur les universitaires, et l’article d’août 1914, paru dans les Études sur l’intégrisme. Impression durable, car en philosophie, il fut dirigé par le P. Auguste Valensin, en théologie par le P. Huby, et toute sa vie il mena grâce à une pensée équilibrée un combat contre l’intégrisme.

Il quitta le 8 avril 1915 le noviciat pour s’engager dans l’armée. En 1916, après un entraînement fait à Antibes et à Cagnes, il fut versé dans le 85e R.I., qui venait d’être décimé à Verdun lors de l’offensive de février 1916. Il combattit durement au Sud-est de Verdun, notamment sur les côtes des Éparges. Il participa à l’offensive de 1917 commandée par le général Nivelles ; malgré les grands espoirs que les préparatifs avaient suscités, espoirs que partagea Henri, l’offensive échoua à percer le front ennemi. Le 1er novembre 1917, Henri de Lubac fut blessé sévèrement à la jambe gauche et à l’oreille gauche. Il fut envoyé après sa convalescence, en mai 1918, à l’École de Saint-Maixent ; il devint aspirant et en septembre 1919, sous-lieutenant. De l’armée, Henri de Lubac apprécia surtout le front et cette école. Le front, parce qu’il partageait la vie des hommes et combattait ; l’école, à cause de la camaraderie et des réunions ayant du souffle entre les étudiants. Malgré la tourmente des combats, il a gardé la paix, abandonné à Dieu. Le 25 septembre 1919, il est démobilisé.

II La formation jésuite (1919-1929)

Il achève son noviciat à Sainte-Foy-lès-Lyon avec le P. Mouterde, fait un bout de juvénat à Cantorbéry de janvier à septembre 1920. Il y est ravi par Pascal et par les paradoxes de sa pensée ; c’est l’origine de ses propres paradoxes. Il fait sa philosophie pendant trois ans à Jersey. Les deux principaux professeurs, le célèbre P. Pedro Descoqs (1877-1946) et le P. Gabriel Picard (1876-1959), recteur, sont l’un et l’autre suaréziens. Avec Gaston Fessard (1897-1978), Robert Hamel (1897-1974), son ami de cœur, René d’Ouince (1896-1973) et Yves de Montcheuil (1900-1944), Henri de Lubac est un thomiste qui, aidé par le Thomisme d’Étienne Gilson, étudie S. Thomas dans le texte, non dans les commentateurs du XVIe ou du XVIIe siècle, comme le fait Maritain. Lui et ses amis sont aidés par un autre groupe de jésuites de la génération précédente, eux aussi rénovateurs : Pierre Rousselot (1878-1915) tué en 1915 aux Éparges, Auguste Valensin (1879-1953) qui leur fait connaître les inédits de Rousselot, Pierre Teilhard dont ils liront les écrits à partir de 1922, Pierre Charles (1883-1954), Jules Lebreton (1873-1956) et Léonce de Grandmaison (1868-1927) qui fut un guide pour tant de jésuites. Henri de Lubac est un thomiste blondélien. Son guide, le P. Auguste Valensin, est un élève et un disciple fidèle de Maurice Blondel. L’Action (1893) vise à restaurer une philosophie ouverte au Surnaturel sur une base critique, en partant du nihilisme et en construisant la réalité par le mouvement de la volonté voulante et de la volonté voulue.

Inspiré par Blondel et Thomas d’Aquin, Henri de Lubac construit une philosophie grâce à de nombreuses et courtes études. C’est une philosophie de haute valeur, jusqu’ici inconnue. Le centre en est le lien entre Être et Liberté. On ne peut penser l’être que dans le mouvement de la liberté vers sa fin, qui par le moyen de l’être est l’Être absolu. Mais ce mouvement n’est ni celui de Plotin, ni celui de Spinoza, ni celui des idéalistes allemands ou d’un idéaliste modéré comme Hamelin. Il n’est pas celui de Plotin, parce que, philosophe et mystique, Plotin reste prisonnier de la réminiscence platonicienne et n’a pas connu la regio egestatis d’Augustin, c’est-à-dire la pauvreté de l’âme devant l’abaissement du Verbe incarné. Ce mouvement de l’esprit n’est non plus celui de Spinoza, parce qu’il n’est pas panthéiste. Il n’est pas davantage celui des idéalistes, parce que le Savoir absolu ignore le mystère. S’il démasque avec Blondel l’illusion idéaliste, Henri de Lubac ne repousse pas pour autant tout idéalisme : celui-ci est en effet le mouvement même de l’esprit, mais, fidèle à lui-même, il se trouve dans l’Être qui à la fois le rassasie et le rend insatiable. Sans développer techniquement cette philosophie, Henri de Lubac s’en inspirera dans toutes ses œuvres.

Après une année de régence à Mongré où il collabore avec le P. François Charmot (1881-1965) et le P. Victor Fontoynont (1880-1958), et pendant laquelle il poursuit sa recherche philosophique, il fera de 1924 à 1926 sa théologie à Ore Place (Sussex), puis de 1926 à 1928 à Fourvière, où il sera ordonné prêtre le 22 août 1927. En 1928-1929, il fera son troisième an à Parayle-Monial. Il prononcera ses vœux solennels de religion le 2 février 1931. Depuis 1922, sa blessure à l’oreille s’était aggravée. Saignements de nez, bourdonnements, vertiges, foyer infectieux dans l’oreille interne se répandant dans deux autres foyers, gêne du côté gauche le rendirent valétudinaire depuis fin 1922 jusqu’à son opération de 1954. Cette maladie lui valut une convalescence à Aix en Provence et la joie, après bien des hésitations dues à sa timidité, d’être reçu par Maurice Blondel. La maladie s’aggrava durant la théologie et le troisième an. Elle ne lui fit pas abandonner sa réflexion sur le Surnaturel, qu’il avait commencée en philosophie et est présente dans L’Esquisse rédigée par Gaston Fessard avec sa collaboration. Au contraire, encouragé par le P. Huby, Henri la poursuivit et en donna un premier aperçu dans une conférence de l’Académie, appelée « la Pensée », prononcée par un de ses compagnons, de Lacroix-Laval. Il acquit alors trois idées essentielles : la gratuité de la création et la gratuité de la rédemption, le caractère dérivé du concept de « nature pure », et l’opposition entre nature et surnaturel, inventée par des théologiens modernes. La théologie demande, pour être pratiquée, de faire « un saut dans la lumière », de recevoir la gratuité de la création et de la rédemption, le mystère de la Trinité, qui n’est pas fonction du monde, et celui de l’Incarnation, qui est descente de Dieu vers l’humanité. Elle est œuvre de foi. La foi qui fait le saut dans la lumière, est obscure : elle s’enracine dans l’abîme de la créature et du Créateur, que l’adolescent chantait dans ses poèmes. Il est en même temps demandé au P. de Lubac de renoncer à tout projet précis en raison de sa maladie et de s’abandonner à Dieu qui lui fait la grâce de cette épreuve. Il se sent toujours inférieur à un tel abandon. Mais il se réjouit de ce que ses amis et d’autres accompliront la réforme de l’enseignement et le renouveau de la pensée chrétienne qui est indispensable à sa vie et à sa fécondité : il est impossible d’annoncer l’Évangile avec la pensée appauvrie et morte qui leur est enseignée. Cette nécessité apostolique mène Henri de Lubac et ses amis. Elle alimente l’Académie « la Pensée ».

III L’enseignement et le désert (1929-1960)

En 1929, Henri de Lubac est destiné à l’enseignement de la théologie fondamentale, en remplacement du P. Albert Valensin (1873-1944). À cette chaire s’ajouta en 1930 celle de la théologie des religions. Le P. Général lui conféra le titre de docteur, comme il en avait le droit à l’époque. Ainsi, après une théologie peu élaborée, Henri de Lubac ne se prépara pas par un doctorat à son enseignement. C’est autrement qu’il acquerra sa compétence. C’est un autodidacte. Nous l’avons constaté en philosophie : ses premières études sont d’un haut niveau. Il fera de même en théologie. Il continuera à collaborer avec Gaston Fessard. Il s’aidera de beaucoup d’autres rencontres : Lyon est alors une capitale intellectuelle. Y brillent notamment la Chronique sociale et une Société lyonnaise de philosophie. Par-dessus tout, Henri de Lubac aura la chance et la joie de rencontrer un génie, ayant lui-même beaucoup de relations, l’abbé Jules Monchanin (1895-1957), connaissant parfaitement la philosophie moderne et la théologie, et expert en hindouisme et en bouddhisme, se destinant à être apôtre en Inde, sur lequel Henri de Lubac a laissé Images de l’abbé Monchanin, chef-d’œuvre par sa beauté littéraire et par la profondeur de ses vues. Il se liera aussi à Mgr Bruno de Solages (1895-1963), un exégète, ami de Teilhard de Chardin.

De 1929 à 1950, le P. de Lubac enseigne la théologie fondamentale avec ensuite l’histoire des religions en vue de la licence ou du doctorat à un petit groupe d’étudiants, dont plusieurs deviendront évêques, par exemple le cardinal Robert-Joseph Coffy (1920-1995), archevêque de Marseille. Il appréciait l’équipe de ses collègues.

Dans les années 1930, on permettra au P. de Lubac de monter de la rue d’Auvergne à Fourvière pour y disposer de la bibliothèque et on lui donnera à cet effet comme titulus coloratus un cours sur le bouddhisme. C’est à Fourvière qu’il put rencontrer Jean Daniélou (1905-1974) et surtout Hans Urs von Balthasar de 1933 à 1937, qui le vénérait et le traitait comme un ami très cher et pour lequel le P. de Lubac avait lui aussi de la vénération : il voyait en lui un théologien hors mesure par sa connaissance des langues (allemand, français, italien, anglais, latin, grec, sanscrit), des littératures européennes anciennes et modernes, de la tradition philosophique et théologique. C’est avec le concours du Père Henri de Lubac que furent créées en 1941, la collection des « Sources chrétiennes », co-dirigée par Jean Daniélou et par lui-même (1941-1950), qui en est aujourd’hui à son 500e volume, et en 1944 la collection de Fourvière « Théologie », dont le P. Henri Bouillard (1908-1981) fut secrétaire. C’est le P. Fontoynont qui est à l’origine de ces deux collections. Elles devaient créer le mythe de l’École de Fourvière en raison d’une théologie qui était vivante et d’un retour aux Pères de l’Église. C’est dans la collection « Théologie » que Lubac publia beaucoup de ses livres, notamment Surnaturel et Corpus mysticum, dont nous allons parler bientôt.

Le premier de ses livres, Catholicisme, lui fut « arraché » par le P. Yves Congar pour sa collection « Unam Sanctam » qu’il venait d’inaugurer. Il manifeste le caractère social, historique et intérieur du christianisme. Le dogme, qui est la révélation sous son aspect dogmatique, est social en ce que les sept sacrements mettent les hommes en communion avec Dieu et les uns avec les autres dans l’Église. Celle-ci est historique : comment entrer dans l’éternité du Dieu qui se révèle à travers le temps ? Comment le temps est-il remodelé en raison de l’entrée de l’éternité dans l’histoire ? À ces questions répondent l’interprétation de l’Écriture, le salut par l’Église, la prédestination de l’Église et l’universalité propre à l’Église qui est d’être catholique. Enfin, dans ce qui est catholique, comment se situe chaque homme ? C’est la personne, en ce qu’elle a de singulier, qui est corrélative de l’universel qui est catholique en vue d’un transcendant, qui est le Dieu trinitaire. Pour définir ainsi le rôle de la personne dans ce qui est catholique, Henri de Lubac invoque un principe : unir pour distinguer ; il part de l’unité pour voir comment les choses se distinguent. Jacques Maritain, de son côté, distingue pour unir : il part de la distinction des choses pour voir ensuite leur unité. Les deux démarches ne se contredisent pas. Mais, selon la terminologie de Thomas d’Aquin, Henri de Lubac considère la puissance dans l’acte, alors que Maritain passe de la puissance à l’acte. Catholicisme appartient à une redécouverte de l’Église qui se produisit dans la première moitié du XXe siècle. Plus précisément, il est pris par « un même enthousiasme pour la vision moehlérienne de l’Église, un même ardent amour de l’unité catholique et de la tradition catholique » (MOÉ 40).

Cette troisième partie de Catholicisme suppose aussi la considération par Henri de Lubac du nazisme et du communisme, de ces deux totalitarismes qui substituent à l’universel un totalitarisme et dès lors écrasent la personne. Informé par les journaux et par le P. Pierre Chaillet (1900-1972) qui a vécu en Autriche, le P. de Lubac est angoissé par le nazisme, par son anti-sémitisme et son anti-christianisme. En ces années de guerre, puis d’occupation (1942, à Lyon), « la tension était continuelle. On vivait dans une fièvre accrue par la faim, l’horreur continuelle des nouvelles, l’incertitude du lendemain. Et cependant le travail se poursuivait, devenait même plus intense » (MOÉ 49). En 1941, le P. de Lubac montrera à son supérieur la situation spirituelle de la France : sans contester la légitimité du gouvernement de Vichy et du Maréchal, il observe que la conscience est guidée d’abord par le bien suprême de l’homme et que celui-ci est mis en cause et est violé par le nazisme. Avec le P. Chaillet et Fessard, il contribuera au journal clandestin le Témoignage chrétien. Son opposition est d’ordre spirituel, non politique ; c’est pourquoi il refusera de s’affilier à la France libre, comme le lui a proposé un frère du général de Gaulle. C’est en raison de ce rôle et de ses publications théologiques qu’il sera élu membre de la Congrégation générale qui élira en septembre 1946 le nouveau général, le P. Jean-Baptiste Janssens, le provincial de la province belge septentrionale. Une nouvelle étape de sa vie commence. Le désert commencera en 1950. Il se prépare dès 1946.

En 1944, Henri de Lubac a publié Corpus mysticum. L’Eucharistie et l’Église au Moyen âge, Drame de l’humanisme athée ; en 1945, Proudhon et le Christianisme et De la connaissance de Dieu ; en 1946, Surnaturel. Études historiques, Le fondement théologique des missions et Paradoxes. Sept livres en trois ans. Corpus mysticum traite de l’Eucharistie dans l’Église au Moyen Âge. Il y a trois corps du Seigneur Jésus : le corps physique, le corps eucharistique et le corps ecclésial. Le corps physique est né de la Vierge Marie, est ressuscité et est dans la gloire à la droite du Père. Le corps eucharistique est donné à l’Église qui le célèbre. Le corps ecclésial vient de l’union de l’humanité rachetée avec le Christ glorieux. Quels sont les liens de ce corps du Seigneur ? Le corps glorifié, né de Marie, est donné dans le corps eucharistique et, si le Seigneur donne son corps eucharistique, c’est pour former son Église, son corps ecclésial. Le corps glorieux, donné dans l’eucharistie, n’est pas mangé, il est donné de manière sacramentelle ; le corps eucharistique contient réellement le corps glorieux ; le corps ecclésial est la réalité ultime du corps eucharistique, car celui-ci est sacramentel. C’est sur ces liens qu’eurent lieu des controverses au IXe et au XIIe siècle. Certains des lecteurs modernes crurent que Henri de Lubac diminuait la présence réelle parce qu’il ne négligeait pas d’affirmer que la réalité ultime de l’Eucharistie est l’Église.

Surnaturel concerne la relation entre Dieu et l’homme. C’est pour Henri de Lubac un centre de l’exposé dogmatique. Il lui consacra huit autres publications : « Le Mystère du surnaturel »2, Augustinisme et théologie moderne3 et Le Mystère du surnaturel4, Petite catéchèse sur nature et grâce5, Pic de la Mirandole. Études et discussions6, l’« anthropologie tripartite » sous deux versions, l’une italienne7 et l’autre française8 et les Lettres de M. Étienne Gilson, adressées au P. Henri de Lubac et commentées par celui-ci9. Le premier ouvrage Surnaturel arrive en 1946 à la Curie généralice au moment de la Congrégation générale. C’est un livre nouveau pour la raison que j’ai indiquée plus haut. Sans entrer dans l’histoire de ce mot et de cette idée que Henri de Lubac suit à la trace du XVIe au XXe siècle, tâchons de saisir en quoi l’idée de surnaturel est centrale dans la dogmatique chrétienne. Selon l’Écriture sainte et l’enseignement constant de l’Église, Dieu est créateur, il n’est pas un démiurge. De toute éternité, il aime son Fils dans leur Esprit commun. Il aime en lui les créatures spirituelles qu’il crée pour leur donner cet amour. Ainsi sont gratuites la création et l’ouverture de l’homme à l’amour divin. Dieu et l’homme sont, comme du reste S. Ignace l’enseigne dans les Exercices spirituels, dans une relation immédiate : c’est la relation de la liberté du Créateur et de la liberté de la créature. La nature n’est pas pensée comme une réalité cosmologique, elle l’est dans sa relation au don gratuit de Dieu, au surnaturel. En termes bibliques, elle consiste pour l’homme à être créé à l’image de Dieu. Le surnaturel consiste à être appelé comme image à ressembler à Dieu lui-même. Ainsi en l’homme, à la différence de toutes les autres créatures terrestres, la nature est spirituelle. En d’autres termes, créé à l’image de Dieu, l’homme est une créature spirituelle : il reçoit dans sa nature (mondaine) l’esprit qui est en lui sans être de lui, puisqu’il est de Dieu. Il peut l’accepter, s’il veut être libre en vérité, dans le oui de la foi quand Dieu le lui communique, ou le refuser. Ainsi l’homme est lié à Dieu par l’esprit. Il n’y a pas d’autre lien entre Dieu et lui. Il n’existe aucune médiation entre Dieu et l’homme.

Or, la nature pure est une médiation, comme l’est « l’existential surnaturel » de Karl Rahner. Une telle médiation fut inventée pour affirmer la gratuité de la création face à Baius, puis à Jansénius, selon lesquels, de manières diverses, il y avait une exigence de l’homme créé sur Dieu. En réalité, comme le rappelle Henri de Lubac, c’est l’homme qui est l’objet d’une exigence venant de Dieu. Salutaire dans son intention, le concept de nature pure est inutile et même nuisible : comme médiation, il donne à l’homme une maîtrise sur Dieu. Aussi déséquilibre-t-il la pensée chrétienne entière. S. Thomas, malgré un rationalisme qui lui vient d’Aristote, n’a pas pensé ce concept de nature pure. Au contraire, il contredit sur ce point Aristote : parce qu’elle est spirituelle, la nature humaine n’est pas déterminée par sa fin comme les autres natures du monde. Elle a le désir de voir Dieu, ce qui est au-dessus de sa fin naturelle.

On voit la force de l’argumentation de Henri de Lubac : c’est lui qui est fidèle à saint Thomas d’Aquin et à la tradition la plus ancienne de l’Église. Mais on peut deviner aussi sa faiblesse dans un contexte académique : la plupart des écoles de théologie croyaient être fidèles à saint Thomas et tenir la doctrine de l’Église. Ne tenant pas la position commune face à Baius et à Jansenius, Henri de Lubac ne mettait-il pas en cause la gratuité du surnaturel ? Pour ces deux raisons, il n’apparut pas comme sûr ou orthodoxe à bon nombre de ses collègues.

Comme l’idée du surnaturel appartient au noyau de la révélation et de la foi, cette controverse n’était pas pourtant une querelle d’érudits. Elle touchait au rapport entre philosophie et théologie et entre société et Église. Une fois posée l’idée d’une nature pure, on peut penser que l’homme est créé en vue d’une fin naturelle, précisément celle de la nature pure, séparée du surnaturel ; il pourrait, selon cette théorie, accomplir sa vie sur l’horizon terrestre. De fait, cependant, constatent les théologiens, en vertu d’un don gratuit, Dieu a ajouté une fin surnaturelle à cette fin naturelle et il appelle l’homme à participer à sa vie divine. Selon la logique de cette théorie, cette fin est considérée comme surajoutée ; elle est extérieure à la fin naturelle de l’homme ; elle est de l’ordre du miracle. Il devenait dès lors légitime de concevoir une société humaine qui se suffise à elle-même, tandis que l’Église rassemble ceux qui acceptent la vie divine. Selon cette logique, société et Église peuvent être traitées comme séparées. De même, la théologie peut se séparer de la philosophie en lui accordant tacitement son autonomie ; c’est ce que fit Descartes. Ainsi, une telle conception de la nature et du surnaturel, produite par la théologie catholique, sauvegarde la gratuité du surnaturel, mais c’est en séparant nature et surnaturel et en mettant en œuvre les moyens de séculariser l’esprit et la société. Elle empêche la théologie d’être fondée rationnellement (fidéisme) et la fait dépendre de la raison humaine sans critique de celle-ci (rationalisme) : au XIXe siècle, elle est tendue au moins en France entre fidéisme et rationalisme. C’est pour ces raisons que Henri de Lubac, sans rejeter ce dualisme introduit par l’idée de nature pure s’il n’y a pas d’autre moyen de sauvegarder la gratuité du surnaturel, la repousse, car elle ignore l’essentiel de la pensée chrétienne sur la relation immédiate entre Dieu et l’homme telle que l’Écriture sainte et la tradition unanime jusqu’au XVIe siècle la présente.

L’idée de surnaturel ainsi pensée rend à la philosophie et à la théologie leur unité et leur tradition. En philosophie, Dieu est de toujours présent à l’esprit humain. Il n’a pas d’autre origine que cette présence. Les preuves de l’existence de Dieu sont des voies que l’esprit élabore conceptuellement et qui aboutissent à Dieu, parce qu’elles s’originent en lui, en cette présence. La voie d’éminence montre que la négation des limites humaines dans le chemin vers Dieu n’est pas la dernière étape, mais qu’elle suppose cette présence au-delà de ce que l’homme est capable de concevoir. En théologie, cette idée du surnaturel ouvre trois orientations. Dans l’interprétation de l’Écriture, le sens historique n’est nullement rejeté, il est gardé par le sens spirituel, mais transfiguré en lui. Pour percevoir le Dieu de la révélation, il faut voir la descente de Dieu dans l’histoire humaine, c’est la voie catalogique comme dit Hans Urs von Balthasar, dont l’œuvre est incontournable.

La querelle théologique concernant le Surnaturel10, qui se poursuivit de 1946 à 1953-54, mais n’est pas close, comme l’a montré le colloque de Toulouse en 200011, s’aggrava du fait que pour une raison mal déterminée Pie XII critiqua la « théologie nouvelle » dans son discours adressé à la Congrégation générale en 1946. Le P. Général, après s’être informé, put assurer les provinciaux français et le P. de Lubac que l’auteur du Surnaturel n’était pas visé par ce discours. Fort de cette assurance, il nomma le P. de Lubac directeur des Recherches de science religieuse, la revue scientifique des provinces françaises. Mais progressivement, son attitude changea. Il imposa une super-censure romaine aux écrits du P. de Lubac et le silence de l’intéressé face aux critiques répétées contre lui. En 1950, il le déchargea de la direction des Recherches de science religieuse et de son enseignement à Lyon ; il lui interdit des publications théologiques et le fit résider à Paris ; il fit retirer du commerce Surnaturel et Corpus mysticum et retira de la bibliothèque des scolastiques dans le monde entier, outre ces deux livres, De la connaissance de Dieu et l’article Mystère du Surnaturel. C’était un proscrit, accusé de crypto-modernisme et d’hypocrisie, car il cacherait sa pensée véritable, dévoilée dans de petits groupes. Il semblait visé par l’encyclique de 1950 Humani generis. L’encyclique ne confirmait-elle la réputation de Lubac ? Beaucoup le crurent. Ils pensèrent aussi que Pie XII repoussait la non-gratuité du surnaturel que notre auteur aurait soutenue. Or après la promulgation d’Humani generis de Pie XII (1950), Lubac ne douta pas de l’orthodoxie de ses études sur le surnaturel. Dès qu’il lut l’encyclique, il éprouva, confie-t-il en 1951, « un mouvement de joie : car, dans mon article précité12, page 204 (sic)13, en haut, j’avais affirmé exactement ce que le Saint-Père demande »14. De fait, Lubac avait écrit à la page 104 : « Si Dieu l’avait voulu, il aurait pu ne pas nous donner l’être, et […] cet être qu’il nous a donné, il aurait pu ne point l’appeler à Le voir »15 et Pie XII affirmait dans son encyclique : « D’autres déforment la vraie notion de la “gratuité” de l’ordre surnaturel quand ils prétendent que Dieu ne peut créer des êtres doués d’intelligence, sans les ordonner et les appeler à la vision béatifique »16.

Contemporaine de ces mesures de 1950, Histoire et Esprit. L’intelligence de l’Écriture d’après Origène17. Ce livre renouvela l’étude d’Origène, ce théologien hors mesure. Le même principe organise de l’intérieur nature et surnaturel d’un côté et de l’autre histoire et esprit : entre ces deux séries de termes, il n’y a pas de médiation entre les deux termes opposés ; ce qui unit et distingue nature et surnaturel, histoire et esprit, c’est l’esprit, l’esprit qui est en l’homme sans être de lui, en ce qui concerne nature et surnaturel, l’Esprit saint qui transforme l’histoire humaine, en ce qui concerne histoire et esprit. C’est le même Esprit qui anime tant la création que la recréation. Il est bon de le souligner, car si l’on affirme à bon droit le rôle du Christ dans l’œuvre de notre théologien, celui de l’Esprit saint n’est pas moins moindre.

De 1951 à 1957, Henri de Lubac eut la grâce d’avoir un provincial de haute valeur, le P. André Ravier (1905-1999). Connaissant bien le P. de Lubac, ce savoyard intelligent se rendit compte que le P. de Lubac était l’objet d’une mesure « inique » (c’est le mot qu’il a employé pour la désigner). Il s’efforça dès lors de maintenir à la tâche le P. de Lubac et, d’autre part, d’obtenir un jugement plus juste, voire une réhabilitation. Il montra une entière confiance au P. de Lubac. C’est grâce à ce soutien que le P. de Lubac publia ses trois ouvrages sur le bouddhisme : Aspects du bouddhisme I (1951), La Rencontre du bouddhisme et de l’Occident (1952) et Amida. Aspects du bouddhisme II (1955). Le P. de Lubac considère le bouddhisme comme le phénomène le plus considérable de l’histoire humaine à côté du christianisme. Méditation sur l’Église (1953), empêché de paraître à cause des mesures de 1950, obtint la super-censure romaine par hasard, car les super-censeurs étaient absents quand le manuscrit arriva à Rome et les deux censeurs occasionnels, le P. Joseph Bonsirven (1880-1958) et le P. Galtier (1872-1961), connaissant la situation de leur confrère et la déplorant, rendirent un avis favorable. Ce fut un livre de chevet de Mgr Montini, qui le fit imprimer en italien et le distribua à ses prêtres. La sévérité se relâchant, Sur les chemins de Dieu, troisième édition de De la connaissance de Dieu, obtint un avis favorable du P. de Finance et sortit de presse en 1956. C’est aussi grâce au P. Ravier qu’en 1958 le P. de Lubac offrit à Pie XII quatre de ses volumes, dont Méditation sur l’Église, avec un témoignage d’attachement respectueux par l’intermédiaire du P. Augustin Bea (1881-1968), le confesseur du Pape. Celui-ci lui fit dire par le P. Bea sa confiance. Mais le P. Général ne voulut tenir aucun compte de cette lettre parce qu’elle n’était pas officielle. Le 10 novembre 1958, Henri de Lubac est élu à l’Académie de sciences morales et politiques au siège de Mgr G. Chevrot (1879-1958). Il fait ainsi partie de l’Institut. C’était une manière de lui rendre hommage.

C’est durant cette période que Henri de Lubac dit l’essentiel de sa pensée concernant l’athéisme occidental (Le Drame de l’humanisme athée, Proudhon et Affrontements mystiques) et l’athéisme oriental (les trois livres sur le bouddhisme) avec au centre son livre sur Dieu lui-même. Sur les chemins de Dieu ne raisonne pas « sur » Dieu : il constate la présence de Dieu dans l’homme. Celle-ci est antérieure à tout ce que l’homme peut penser : l’homme ne peut pas penser sans penser Dieu. Une telle présence est active dans tout ce que l’homme pense et fait. Elle travaille en nous par notre propre vie d’homme et vient à nous par une révélation naturelle avant d’être surnaturelle. Selon Emmanuel Tourpe qui a présenté cet ouvrage, ce livre est « plus jeune, plus frais, plus vif et moins daté que les plus actuels des débats contemporains ». C’est en raison d’un tel Dieu que Henri de Lubac affronte le drame de l’humanisme athée, celui de Ludwig Feuerbach (1804-1872), de Frédéric Nietzsche (1844-1900), d’Auguste Comte (1798-1857) en écoutant aussi Sören Kierkegaard (1813-1855) et Fédor Dostoïevski (1821-1881). Il examine deux attitudes philosophiques face à Dieu : le positivisme, celui d’Auguste Comte (au XIXe siècle) et le « soupçon », celui de Feuerbach et de Nietzsche. Le positivisme élabore une genèse de l’histoire humaine face à Dieu en trois étapes : d’abord la religion, puis la métaphysique, enfin la science. Celle-ci dévoile la vérité que cachait la religion et que la métaphysique entrevoyait. Henri de Lubac suit positivement l’itinéraire de Comte et montre que Comte revient à une religion qui pour être scientifique n’en est pas moins une religion. L’attitude du soupçon consiste à recevoir la liberté que Dieu donne à l’homme de le connaître et de s’en servir pour retourner contre Dieu le don qu’il nous fait, soit en disant que la révélation est une illusion (Feuerbach), soit en prophétisant que Dieu est mort et que, libéré de Dieu, l’homme peut devenir Surhomme (Nietzsche). Face à cette double attitude, face aussi à celle de Marx (1818-1883), est appelé l’homme nouveau, celui que Dieu recrée. Les « affrontements » avec l’athéisme occidental sont « mystiques », même s’il se déroule sur le plan philosophique.

C’est en contemplant le même Dieu créateur et rédempteur que Henri de Lubac essaie de comprendre le bouddhisme et le fait avec une compétence qui étonne les orientalistes, car notre auteur ne connaît pas les langues orientales, lit les œuvres bouddhiques dans des traductions, n’a pas eu de contacts avec les cultures bouddhiques. Qu’il étudie la rencontre du bouddhisme et de l’Occident ou le bouddhisme, surtout chez Amida, il constate que la compassion bouddhique ne vient pas d’en haut et donc ne pénètre pas jusqu’aux plus intimes fibres de l’être humain. Il voit la lente patience qui est demandée aux chrétiens pour s’approprier la sagesse d’un Soi, qui est au-delà de la souffrance humaine ; il voit aussi l’exigence que le bouddhique devrait accepter pour se convertir à cet ordre nouveau qu’est le christianisme. C’est ce que le P. de Lubac rappellera durant et après le Concile dans le Secrétariat pour les non-chrétiens (1964-1974) auquel Paul VI l’avait nommé. Nous entrons ainsi dans la dernière période.

IV Le Concile Vatican II et l’après-concile (1960-1991)

Au mois d’août 1960, le pape choisit le P. de Lubac comme consulteur à la Commission théologique préparatoire au Concile. Ainsi réhabilité, Henri de Lubac était aussi l’otage de cette commission, présidée par le Cardinal Alfredo Ottaviani (1890-1979) qui voulait que le futur Concile entérine les condamnations contenues dans Humani generis et d’autres encore, notamment contre Teilhard de Chardin. Les théologiens n’avaient de rôle que celui que la Commission leur confiait éventuellement. Henri de Lubac dut faire un devoir sur la connaissance de Dieu. La présence de Henri de Lubac à la Commission préparatoire le fit « reconduire quasi automatiquement au Concile à titre d’expert (peritus), ce qui m’a permis d’assister régulièrement aux séances de la Commission théologique » (MOÉ 119). Expert, Henri de Lubac fut aussi le conseiller théologique de l’archevêque de Tananarive. Il nous a laissé des Carnets du Concile depuis 1960 jusqu’à 1965. Il recueille une quantité impressionnante d’informations, esquisse des portraits de personnes et des appréciations des textes conciliaires ou de leurs projets. Participant moins que Congar à des groupes de théologiens, limité par son ignorance de l’allemand parlé, il mit peu la main à la confection de textes, du moins d’après ce qu’il nous dit, mais nous savons qu’il explique peu ce qu’il fait lui-même. Lors de la préparation du chapitre de la future Constitution Gaudium et spes, il rencontra Karol Wojtyła, admira son intelligence et collabora avec lui à la rédaction des textes sur l’athéisme. À partir de 1964, au plus tard, le P. de Lubac observa une dérive dans l’interprétation des travaux conciliaires. Une aile dite marchante voulait aller au-delà des textes du Concile pour faire connaître son esprit ou demandait que les textes eux-mêmes soient plus prégnants d’un tel esprit. C’est pour ne pas donner son aval à un tel esprit qu’il se retire alors de la revue Concilium, dont il était membre fondateur : il y sentait en outre trop de mondanités et de richesses humaines. Il est un des fondateurs de la revue Communio en 1975, dont il fera partie jusqu’en mai 1977. Il a alors quitté Lyon-Fourvière, dont le théologat s’est transporté au Centre Sèvres, et habitera Paris jusqu’à sa mort.

Déjà avant le Concile, Henri de Lubac avait préparé son énorme travail sur l’Exégèse médiévale. Les quatre sens de l’Écriture, dont Paul Ricœur notera l’importance pour les développements de l’herméneutique et que Jean Greisch place en tête de son étude de la philosophie herméneutique18. Il en avait édité les deux premiers volumes en 1959. Il éditera le t. 3 en 1961 et le t. 4 en 1964. Les deux premiers volumes expliquent ce que sont les quatre sens de l’Écriture. Le premier sens est l’histoire. Il concerne l’histoire racontée. Celle-ci est le fondement de toute l’exégèse. Elle n’est jamais dépassée. C’est en quoi l’exégèse chrétienne n’est pas allégorique au sens grec du terme : pour expliquer Homère par exemple, on dépassait la lettre homérique et on voyait le sens caché sous cette lettre : c’est ce sens qui est allégorique ; comme le mot l’indique, il dit autre chose. Quand elle passe au sens spirituel, l’exégèse chrétienne ne dit donc jamais autre chose. Elle dit le sens spirituel de l’histoire. Pourquoi peut-elle le faire ? Parce que Dieu conduit l’histoire sainte du Peuple élu. Dans ce qu’il fait à tel moment, il y a plus que ce qui se passe à ce moment. Il annonce le projet d’amour qu’il mènera à sa fin. Car il a un dessein d’amour : avec son Peuple qu’il a choisi parmi les nations, il veut sauver tous les hommes grâce à un Messie. Aussi dans l’histoire annonce-t-il sa promesse : le salut et le Messie. Les prophètes sont les messagers de cette promesse. Les écrits de la Sagesse élargissent une telle histoire au contact de la culture hellénistique. Mais pour que le sens spirituel, déjà présent dans l’histoire ancienne, puisse apparaître, il faut que le Messie accomplisse cette histoire. Dans la Croix glorieuse éclate le sens spirituel. Ce qui était caché jusque là est dévoilé. L’histoire d’Israël, par rapport à ce dévoilement, apparaît ancienne ; c’est pourquoi nous parlons d’Ancien Testament. Mais en même temps, elle est accomplie. Elle a une profondeur qu’elle ne connaissait pas complètement. Elle a une merveille qu’on ne cesse pas de contempler. C’est le Nouveau Testament qui le lui révèle et en même temps il en est lui-même rempli. Il importe de noter ce double mouvement : par le premier, l’histoire d’Israël devient ancienne ; par le second, elle se renouvelle et apporte sa nouveauté au Nouveau Testament. Ainsi il y a deux raisons pour lesquelles l’Église lit dans sa liturgie l’Ancien Testament : c’est qu’il annonce le Nouveau et qu’il lui apporte une nouveauté merveilleuse. Il l’instruit et il participe à la louange. Nous avons parlé jusqu’à présent du sens spirituel. Or celui-ci se subdivise : il devient en lui-même sens allégorique, sens tropologique et sens anagogique. Le sens allégorique contient le mystère du Christ et de l’Église. L’histoire racontée d’Israël est remplie de ce mystère. Il faut avoir les yeux pour voir dans ces réalités racontées ce mystère nouveau et définitif. Il existe dans cette histoire ancienne des types ou des figures. Celles-ci annoncent des anti-types ou des réalités ou des vérités. Ainsi David ou Salomon sont des types ou des figures du Christ, qui est leur anti-type ou leur vérité. Le Christ est le vrai David, le vrai Salomon. Cela non par une correspondance entre le type et l’antitype, qui existe bien, mais en raison de l’accomplissement par le Christ de l’histoire d’Israël : en Lui, ce que fut David se manifeste pleinement. De la même manière, l’Église est le vrai Israël : cela ne signifie pas qu’Israël disparaît, mais au contraire que sa vérité est manifestée et qu’en raison du double mouvement que nous venons d’indiquer l’Église n’arrête pas de s’émerveiller de la nouveauté d’Israël en elle. Le mystère du Christ et de l’Église, chaque croyant en vit, il y participe, il la fait sienne et plus encore il est transformé en elle. C’est ce que le sens tropologique enseigne. Ce peut être aussi le sens moral. Mais dans l’organisation des quatre sens, c’est la vie chrétienne morale telle qu’elle jaillit du mystère du Christ et de l’Église. Or cette vie chrétienne est aspirée vers le haut et vers l’avant : c’est le sens anagogique. La vérité que manifestent le Christ ou l’Église, nous ne la voyons pas encore ; elle apparaîtra lors de la venue du Christ dans la gloire. Ainsi le sens allégorique contient d’emblée le sens anagogique. C’est pourquoi celui-ci peut être tantôt plus dogmatique tantôt plus mystique.

Cette exégèse chrétienne telle qu’elle fut pratiquée jusqu’à la réforme est-elle complètement dépassée ? Elle ne l’est pas dans la mesure où le mouvement même de l’esprit accueille la Parole de Dieu et en fait sa demeure. Henri de Lubac l’a expliqué : « Cet “acte complet” qu’est l’ancienne exégèse chrétienne est une très grande chose. À mesure qu’on l’étudie, on s’aperçoit de l’ampleur de son champ, de la complexité de ses implications, de la profondeur de ses soubassements, de l’originalité de sa structure. Avec des nuances variées, elle fait ressortir “la nouveauté prodigieuse du Fait chrétien”. Elle met en œuvre une dialectique, souvent subtile, de l’avant et de l’après ; elle définit les rapports de la réalité historique et de la réalité spirituelle, de la société et de l’individu, du temps et de l’éternité ; elle contient, comme on dirait aujourd’hui, toute une théologie de l’histoire, en connexion avec une théologie de l’Écriture. Elle organise toute la révélation autour d’un centre concret, marqué dans l’espace et dans le temps par la Croix de Jésus-Christ. Elle est elle-même une dogmatique et une spiritualité complètes, et complètement unifiées. Elle s’est exprimée non seulement dans la littérature mais dans l’art avec une force et une profusion merveilleuses. Bref, cette ancienne forme d’exégèse est bien autre chose encore qu’une ancienne forme d’exégèse »19.

En 1961, le P. de Lubac avait demandé à nouveau à ses supérieurs de pouvoir écrire sur la pensée du P. Pierre Teilhard de Chardin, parce que celle-ci était déformée depuis la publication des Œuvres par les Éditions du Seuil. Cela lui avait été refusé. « Brusquement, au début de l’été, tout changea » (MOÉ 104). Une demande positive lui parvint des « quatre provinciaux de France, approuvés par le P. Général » (Ibid.). Une des raisons de ce changement d’attitude vient de ce que le P. Général avait pu observer de quel esprit étaient plusieurs responsables des dicastères romains qu’il rencontrait lors de la préparation du Concile. Le 6 avril, La pensée religieuse du P. Teilhard de Chardin était achevé d’imprimer. Depuis 1922, Henri de Lubac avait lu les notes inédites de son confrère. Il avait été en correspondance avec lui20. « Entre 1946 et 1949, en compagnie de Mgr Bruno de Solages, [il] avait pu l’aider à revoir de près le texte du Phénomène humain pour satisfaire par quelques précisions à des exigences de la censure romaine ou à en prévenir d’autres » (MOÉ 104-105). Son étude diffère de la christologie de Teilhard selon le P. Gustave Martelet (1916-)21. Prenant en considération le Milieu divin et le Phénomène humain et s’appuyant sur l’ensemble des notes de Teilhard encore en partie inédites, elle contemple la « part la plus intime » de Teilhard et montre comment cette part s’est développée selon une voie qui lui est propre : si elle aborde des thèmes tels l’Évolution et la liberté, la Nature et la Grâce, le Cosmos, c’est toujours pour manifester selon quelle méthode pense le P. Pierre Teilhard, comment il pense la Révélation en raison de l’Évolution dans le prolongement de l’Écriture, non sans frôler parfois des malentendus ou même sans une « extrapolation risquée » en ce qui concerne le point Ômega. Depuis lors, Henri de Lubac, qui n’est pas teilhardien comme il aimait le répéter, se fait le compagnon de son confrère : il explique ce qu’est sa prière, ce que sont son apologétique et son élan missionnaire. Il publie aussi plusieurs de ses correspondances. Surtout, en 1968, il signe un admirable Éternel féminin, suivi de Teilhard et notre temps. Il manifeste dans une langue splendide l’inspiration poétique et théologique de Teilhard, il traite de l’amour, ce que ne faisait pas La Pensée religieuse et fait voir suivant quelle dialectique et quelle symbolique Teilhard a écrit ce poème.

Invité après le Concile à parler dans de nombreuses universités du monde, le P. de Lubac s’efforce d’éclairer les esprits sur le sens de la doctrine conciliaire. Il publie deux commentaires de Constitutions conciliaires : La Révélation divine, qui concerne le préambule et le chapitre I de la Constitution dogmatique Dei Verbum, et Athéisme et sens de l’homme, qui concerne l’exposé sur l’athéisme de la Constitution pastorale Gaudium et spes. Deux autres œuvres sont moins connues du public, mais sont de première importance : La postérité spirituelle de Joachim de Flore et Pic de la Mirandole. La postérité spirituelle suit depuis l’abbé calabrais Joachim de Flore (XIIe-XIIIe siècles) jusqu’à nos jours la manière dont fut reçue l’idée de cet abbé : l’Esprit Saint serait au-delà du Verbe incarné, nous dispensant tant de sa révélation que de l’Église institutionnelle. La majorité des héritiers veulent une Église purement spirituelle ou sécularisée ; d’autres retrouvent la grande tradition de l’Esprit qui révèle le Verbe lui-même dans l’Église. Pic de la Mirandole, qui concerne le grand humaniste italien du XVe siècle, achève les travaux sur le Surnaturel, en mettant en lumière l’ontologie sous-jacente, la Paix et la Liberté.

Son premier acte public de cardinal fut « de rendre hommage, dans une interview publié dans le journal La Croix, au cardinal Daniélou injustement calomnié. Sa dernière intervention au Sacré Collège, la veille de l’ouverture du Synode des évêques consacré au 25e anniversaire du concile Vatican II, eut pour objet la collégialité épiscopale et la primauté du successeur de Pierre »22. Le Cardinal Henri de Lubac s’éteint le 4 septembre 1991 chez les Petites Sœurs des Pauvres qui le soignèrent durant les deux dernières années de sa vie après un accident de santé qui lui rendit très difficile l’usage de la parole.

Cet homme qui se sentait fragile publia cinquante volumes. Depuis 1943, beaucoup de ses livres, devenus des ouvrages de référence, sont traduits en allemand, anglais, italien, espagnol, catalan, néerlandais, polonais, portugais, grec, slovaque, hongrois, danois, maltais et même chinois et japonais. Il fut également un impressionnant éditeur : on lui doit presque tous les ouvrages d’Yves de Montcheuil, ainsi que les correspondances, abondamment annotées, de Maurice Blondel avec Auguste Valensin et Johannès Wehrlé (1865-1938), de Gabriel Marcel (1889-1973) avec Gaston Fessard, de Pierre Teilhard de Chardin23 et d’Étienne Gilson.

Conclusion

Voilà une vue panoramique de la vie et de l’œuvre du Cardinal Henri de Lubac. Cet homme robuste se sentit fragilisé par les suites de sa blessure de l’oreille. D’une curiosité sans fin, c’est un lecteur infatigable. Il produisit une œuvre immense pour que la pensée chrétienne reflète au mieux la Révélation divine et pour qu’elle soit ainsi féconde apostoliquement. S’il est revenu aux Pères de l’Église, ce n’est pas en raison d’un goût pour le passé et pour les sources. C’est parce que les Pères appartiennent à la tradition de l’Église. Y appartiennent aussi les auteurs médiévaux et la tradition moderne, dont Blondel est le plus illustre à ses yeux. Henri de Lubac est aussi attentif à ce que les hommes pensent, tant en Occident qu’en Orient. Mais tout cela est lu, interrogé et compris à la lumière de la Révélation telle qu’elle nous atteint par l’un et l’autre Testament. Sa pensée pourrait avoir été menée selon deux axes principaux : Dieu, tel qu’il se révèle, tel qu’il se donne dans le Surnaturel, tel qu’il se manifeste dans l’évolution du Cosmos et tel qu’il fut pensé par l’humanisme athée et par le bouddhisme ; l’Église dans son ampleur et profondeur catholique avec son interprétation de l’Écriture sainte, qui permet de discerner tant une dialectique idéaliste, comme celle de Hegel, qu’une dialectique spirituelle, comme celle de Joachim de Flore24. Si le P. de Lubac ne le dit pas, Dieu est regardé par lui comme Père ; dans l’Église, c’est la mission du Fils incarné qui est contemplé et celle de l’Esprit Saint. La pensée et la vie de Henri sont ainsi marquées par la Trinité. C’est l’abîme dans lequel est plongée la créature en sa liberté. La foi obscure par laquelle Henri de Lubac y adhère est source de lumière et de douceur. Ce n’est pas un intellectuel ; c’est un serviteur de la Vérité.

Notes de bas de page

  • 1 de Lubac H., Mémoire sur l’occasion de mes écrits, dans Œuvres complètes, t. XXXIII, Paris, Cerf, 2006, p. 413 (cité désormais MOÉ).

  • 2 Dans Recherches de science religieuse 36 (1949) 80-121.

  • 3 Paris, Aubier-Montaigne, coll. Théologie 63, 1965, 339 p.

  • 4 Paris, Aubier-Montaigne, coll. Théologie 64, 1965, 302 p. ; Œuvres complètes, t. XII, Paris, Cerf, 2000, 369 p.

  • 5 Paris, Fayard, coll. Communio, 1980, 224 p.

  • 6 Paris, Aubier-Montaigne, 1974, 430 p.

  • 7 « Morale et Mistica. L’antropologia tripartita nella tradizione cristiana », dans de Lubac H., Opera omnia, t. 6, La fede cristiana, Milan, Jaca Book, 1979, p. 41-163.

  • 8 « Anthropologie tripartite », dans de Lubac H., Théologie dans l’histoire, t. I, La Lumière du Christ, Paris, DDB, coll. Théologie, 1991, p. 113-199.

  • 9 Paris, Cerf, 1986, 205 p.

  • 10 Sur la controverse, nous ne pouvons que suivre les documents que le P. Henri de Lubac a rassemblés sur le sujet. Les archives de la Compagnie et celles du Vatican sont fermées pour la période qui nous concerne.

  • 11 Surnaturel. Une controverse au cœur du thomisme au XXe siècle. Actes du colloque organisé par l’Institut Saint-Thomas-d’Aquin les 26-27 mai 2000 à Toulouse, dans Revue thomiste, 101/1-2 (janvier-juin 2001).

  • 12 Il s’agit de Mystère du surnaturel (MSU), cité plus haut.

  • 13 = page 104.

  • 14 Lettre de Henri de Lubac à Giovanni Benedetti, Enghien, 2 avril 1952, publiée en français et en traduction italienne dans de Lubac H.-Benedetti G., Mezzo secolo di teologia al servizio della Chiesa. Una corrispondenza teologica, présentation X. Tilliette, coll. Nuovi saggi teologici. Series maior 47, Bologna, Dehoniane, 1999, p. 71. Nous avons rendu compte de ce livre dans Bulletin de l’Association Internationale cardinal Henri de Lubac 2 (1999) 62-65.

  • 15 MSU, p. 104, reproduit dans de Lubac H., Théologie dans l’Histoire, Paris, DDB, coll. Théologie, t. II, p. 92.

  • 16 Textes doctrinaux du magistère de l’Église sur la foi catholique, éd. G. Dumeige, Paris, Orante, nouv. éd., 1975, p. 367, n° 654.

  • 17 Paris, Aubier-Montaigne, coll. Théologie 16, 1950.

  • 18 Greisch J., Le Buisson ardent et les lumières de la Raison. L’invention de la philosophie de la religion. t. III. Vers un paradigme herméneutique, Paris, Cerf, coll. Philosophie et théologie, 2004.

  • 19 de Lubac H., Exégèse médiévale. Les quatre sens de l’Écriture, Paris, Aubier-Montaigne, coll. Théologie 41, 1959, p. 16-17.

  • 20 Teilhard de Chardin P., Lettres intimes, Paris, Aubier-Montaigne, 2e éd., 1974.

  • 21 Martelet G., Teilhard de Chardin, prophète d’un Christ toujours plus grand : primauté du Christ et transcendance de l’homme, préf. Fr.-X. Dumortier, Bruxelles, Lessius, 2005.

  • 22 Sales M., dans France catholique le 13 septembre 1991, et revu le 30 novembre 1998.

  • 23 Teilhard de Chardin P., Lettres intimes à Auguste Valensin, Bruno de Solages, Henri de Lubac, André Ravier 1919-1955, Paris, Aubier-Montaigne, 2e éd., 1974 ; Id., Lettres d’Égypte 1905-1908, Paris, Aubier-Montaigne, 1963 ; Id., Lettres d’Hastings et de Paris 1908-1914, intr. H. de Lubac, annotation par A. Demoment et H. de Lubac, Paris, Aubier-Montaigne, 1965 ; Blondel et Teilhard de Chardin, Correspondance commentée par Henri de Lubac, Paris, Beauchesne, 1965.

  • 24 Les deux dialectiques se tiennent. La présentation de Joachim de Flore dans Exégèse médiévale, t. III est en même temps une réfutation de Hegel selon Josef Ratzinger.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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