D'emblée, la facture attire l'attention, qui tranche sur
l'austérité habituelle des publications bollandiennes: plus de 90
illustrations (manuscrits, documents d'archives, gravures,
portraits, etc.), en couleurs et souvent en pleine page, provenant
des fonds de la bibliothèque des Bollandistes et de la Bibliothèque
Royale de Belgique, font de cet ouvrage un véritable livre d'art.
Le sujet n'en était pas moins sérieux, puisqu'il ne s'agissait pas
moins que de relater l'histoire de la plus ancienne société savante
belge. Ses débuts furent modestes: un petit livret d'à peine 100
pages, les Fasti Sanctorum, dans lequel, en 1607, le jésuite
Héribert Rosweyde annonce l'édition critique de quelque 1300 Vies
de saints. Il ne peut toutefois mener à bien son projet qui, en
1630, est repris par Jean Bolland. Celui-ci donne à l'entreprise
une extension maximale: tous les saints de l'année feront l'objet
d'un dossier, où seront données les éditions critiques des textes
qui rapportent les hauts faits des héros de la foi, accompagnées de
notes explicatives et d'une synthèse préliminaire faisant le point
sur les connaissances acquises sur les personnages concernés. Mais
plus encore que Rosweyde, Bolland a vu grand et, très vite, son
entreprise s'est transformée en une institution durable qui a
fourni la célèbre collection des Acta Sanctorum (67 volumes parus
entre 1643 et 1940), relayée progressivement depuis la fin du 19e
siècle par une revue - les Analecta Bollandiana - et deux
collections - les Subsidia hagiographica et le Tabularium
hagiographicum. Certes, l'histoire de la Société ne fut pas qu'un
long fleuve tranquille: à différentes époque, les Bollandistes,
praticiens d'une critique historique rigoureuse, furent pris à
partie par des contradicteurs qui n'appréciaient guère leurs
conclusions, tels les Carmes furieux de voir contestée leur
prétention d'avoir été fondés par le prophète Élie. Elle n'en
méritait pas moins d'être écrite à l'occasion du 4e centenaire de
la publication de ce qui fut sa première pierre, non seulement à
cause de l'ampleur et de la qualité du travail accompli, mais aussi
à cause de la matière traitée par les hagiographes belges: les
sources hagiographiques sont primordiales non seulement pour la
connaissance des saints, mais aussi bien souvent pour quantité
d'autres réalités de l'histoire, et parce que l'hagiographie
critique est une discipline pratiquée par un nombre sans cesse
croissant de chercheurs. - N. Plumat