Dialogue and Drama. Elements of Greek Tragedy in the Fourth Gospel

J.A. Brant
Écriture Sainte - Recenseur : Didier Luciani
J.A. Brant, professeur de Bible au Goshen College (Indiana - USA), s'intéresse depuis longtemps aux rapports, c'est-à-dire aux similitudes et aux différences qui existent entre le NT et les expressions littéraires de la culture hellénistique classique. La thèse de son ouvrage est simple: l'évangile de Jean, même s'il n'a pas été écrit pour la scène, ne doit pas être approché comme un récit à contenu doctrinal, mais comme une représentation théâtrale dont nous sommes «spectateurs» plutôt que «lecteurs».
Bien qu'elle ne soit pas la première à utiliser la catégorie du «drame» pour qualifier le quatrième évangile (F.R. Montgomery Hitchcock, H. Windisch, R. Strachan…), l'A. montre, souvent de manière très convaincante, que cet évangile se comprend mieux sur l'arrière fond de la tragédie grecque. Ce faisant, elle fait non seulement progresser de manière décisive la question du genre littéraire, mais plus largement encore, elle renouvelle les études johanniques.
Un premier chapitre traite de la structure dramatique de l'oeuvre, avec son prologue (comparaison entre Jn 1 et les prologues d'Euripide) et son épilogue (essai de justification au plan théâtral de la double finale de Jn) encadrant l'intrigue unifiante et ses différents éléments constitutifs: la peripateia (le «dualisme» de Jn n'est pas tant un message qu'une fonction au service de la construction dramatique des renversements), l'anagnorisis (Jn 20 éclairé par les scènes de reconnaissance dans Électre) et le pathos. In fine, la nature dramatique de la présentation évangélique rend mieux compte de la structure épisodique de l'évangile (entrée et sortie des personnages) que ne le ferait une quelconque théorie des sources.
Dans les chapitres suivants («Speech as action» et «Dramatis personae and the illusion of identity»), d'autres traits de l'écriture johannique sont éclairés par la dramaturgie sans jamais, toutefois, que cette dernière ne s'impose comme un carcan: la discrétion du narrateur dont le rôle s'apparente souvent à celui du choeur; l'importance et la longueur des discours qui constituent l'essentiel de l'action; leur forme dialogique (Jésus avec un seul interlocuteur, individuel ou collectif); le nombre restreint de protagonistes; ou encore la prédilection de Jn pour la forme verbale du présent historique (la plus appropriée pour marquer la continuité de l'action) et son emploi intensif des déictiques (pour conduire le lecteur d'une expression verbale vers une réalité extra-discursive).
Le dernier chapitre («Death becomes him») souligne le caractère ambigu et paradoxal de la mort de Jésus - une glorification plutôt qu'une victimisation - et compare celle-ci au héros grec qui triomphe de la mort en y faisant face et en rendant ainsi l'héroïsme immortel. Que l'on soit d'accord ou non avec toutes les conclusions de l'A., cet ouvrage fait preuve d'assez de pénétration et témoigne de trop de pertinence pour ne pas nous obliger à reconsidérer sensiblement notre manière d'aborder le quatrième évangile. - D. Luciani

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