Le volume reprend un travail d'habilitation présenté à la faculté
de théologie évangélique de l'Université de Strasbourg en 2003. La
thèse défendue par M.B. ne manque pas d'originalité. À partir d'une
comparaison entre les ennemis mentionnés dans le Ps 22 et les amis
de Job, elle arrive à la conclusion qu'ils appartiennent tous à une
même catégorie, celles des amis déloyaux (treulose Freunde). C'est
pourquoi elle retrouve dans le Ps 22 un genre littéraire, présent
dans plusieurs autres psaumes, que F.-L. Hossfeld a défini comme
Freund-Klage, «Plainte contre les amis [déloyaux]». Elle traduit p.
ex., au v. 18, l'expression communément rendue par «bande de
malfaiteurs» par «bande de [faux] amis» au prix d'une très légère
correction (p. 18). La comparaison avec Job mène à une autre
conclusion: si le Ps 22 appartient clairement au genre littéraire
des plaintes individuelles, il contient cependant un certain nombre
d'éléments sapientiaux. La première partie analyse le Ps 22 selon
les méthodes classiques et moins classiques de l'exégèse
(philologie, critique textuelle, Literarkritik, étude de la forme
et de la composition). Une partie importante de l'étude est
consacrée au «changement d'atmosphère» (Stimmungsumschwung). La
conclusion est intéressante: les difficultés du texte qui ont
conduit à de nombreuses hypothèses sur la composition du psaume
sont résolues si l'on admet que celui-ci développe le thème
sapientiel de la passion du juste. Le salut du juste, par ailleurs,
n'est pas seulement une expérience individuelle, il devient
paradigme pour tout le peuple de Dieu et même pour toute
l'humanité. La deuxième partie traite de la fonction hostile des
amis dans Jb 3 et 30, et dans certains psaumes. Cette fonction peut
aller de l'indifférence ou de l'incompréhension à l'agressivité.
Dans l'étude des psaumes, M.B. analyse certains thèmes comme celui
du serviteur souffrant, du royaume de Dieu eschatologique ou la
théologie des pauvres. Elle analyse aussi quelques ajouts
messianiques post-exiliques. En gros, ses analyses confirment
l'impression que le Ps 22 suppose un arrière-fond sapientiel. La
rédaction ultérieure a enrichi le psaume d'éléments messianiques et
eschatologiques. Par ailleurs, la structure plainte individuelle -
louange collective est ancienne. La troisième partie aborde plus
spécifiquement le problème des «amis - ennemis». L'A. procède à une
comparaison avec la littérature mésopotamienne et avec d'autres
psaumes, puis elle décrit comment le juste est sauvé de ses amis
déloyaux. Elle analyse aussi les relectures du Ps 22, sa traduction
dans la LXX et dit quelques mots de son utilisation dans les récits
évangéliques de la passion. Le volume se termine par un résumé, une
liste des abréviations, une bibliographie et un index des textes
cités. La lecture est parfois ardue parce que l'analyse est très
fouillée, mais l'ouvrage en vaut certainement la peine. - J.-L. Ska
sj