Histoire du hassidisme. Trad. M. Mlynarski-Dalsace et préf. M.-A. Ouaknin
Simon DoubnovReligions - Recenseur : Jean Radermakers s.j.
Après le feu de paille de l'effervescence messianique de Sabbataï Tsvi (fin duxvie s.) dans une Europe en mal de repères, alors que les écoles talmudiques de Pologne déclinaient, surgit un Juif pieux (hassid) mais non point érudit. Il galvanisa ses frères simples et fervents en les entraînant dans la prière et l'humble service du Seigneur présent en tout homme et en toutes choses. Il se nommait Israël ben Eliézer, mieux connu comme « Baal Shém Tov » (maître du bon Nom) ou Besht, qui vécut de 1700 à 1760 en Podolie. Sa doctrine, basée sur le contact intime avec Dieu, se résumait dans la joie de vivre sous le regard divin au quotidien. Mal vu du rabbinisme officiel parce qu'il paraissait négliger l'étude de la Torah, il fut controversé et dut subir contestations et persécutions. Ses disciples continuèrent son oeuvre en fondant de nombreuses « maisons du juste (tsaddiq) » ou centres florissants de vie spirituelle, de guérisons et de célébrations. À trois reprises, le mouvement risqua la ruine, mais chaque fois le flambeau fut repris par une suite de guides (maggidîm) vivant dans l'esprit du fondateur, et toute une littérature vit le jour en Pologne, en Ukraine et jusqu'en Israël où avait pénétré le mouvement. Confronté à la modernité, au branle-bas européen avec ses conflits, à l'assimilation massive, puis aux pogroms organisés par les tsars, le mouvement perdit progressivement sa vigueur sans jamais totalement disparaître. L'A. divise son histoire en deux livres : le récit de la fondation du hassidisme jusqu'aux polémiques (1740-1781) et aux premiers successeurs du Besht, puis la période d'expansion (1782-1815) dans les régions de l'est, notamment en Lituanie, avec de nouvelles épreuves. Un 3e livre décrit de façon à la fois précise et émouvante la vie quotidienne des hassidîm : l'âme, l'esprit, la ferveur, le zèle religieux, la vie communautaire et le sens de la solidarité et surtout, la prière, l'humilité dans un esprit d'allégresse chantante et dansante sous le regard de Dieu.
L'A., qui a rassemblé une masse considérable de documents souvent inédits, nous conte cette histoire avec une précision remarquable et un plaisir non dissimulé. Nous connaissons fort peu cette période importante pour le judaïsme et pour l'Europe ; aussi, cette lecture contribuera à nous faire découvrir tout un pan mystique du judaïsme trop souvent méconnu, sauf peut-être dans des films comme Un violon sur le toit. - J. Radermakers s.j.