Historicizing « Tradition » in the Study of Religion, éd. St. Engler & Gr.P. Grieve

Col.
Religions - Recenseur : Jacques Scheuer s.j.
La catégorie de tradition est d'usage fort courant là où il est question (d'histoire ou d'étude) des religions. Sa signification demeure cependant le plus souvent floue, en particulier lorsque traditions est employé comme un synonyme commode de religions. Le terme risque en outre de véhiculer pas mal de présupposés laissés implicites ou d'associations non vérifiées. Dans la bouche des acteurs religieux ou sous la plume de ceux qui les étudient, tradition suggère des références à un état stable voire immuable des sociétés et des cultures, à une reproduction passive et paresseuse du passé (bref, tout le contraire de la modernité), à quelque autorité soustraite à toute critique ou mise en question. Ce fut notamment le cas en contexte de (dé)colonisation. Un examen plus attentif et critique montre cependant que le recours à la tradition apparaît plus d'une fois à ses auteurs comme la meilleure tactique pour introduire et légitimer une nouveauté voire une rupture. Loin d'être intemporelles, les traditions ont une histoire. Loin d'être un pur donné qui s'impose d'évidence, elles comportent fréquemment une part significative d'inventivité et font l'objet de négociations. La question du rapport entre le neuf et l'ancien, entre le construit et le reçu, se pose inévitablement, même si l'historien et l'anthropologue hésiteront quant à eux à prendre position dans des débats sur l'authenticité d'une tradition ou sur son orthodoxie. On le voit, la catégorie de tradition n'offre des significations repérables et ne se prête à des analyses éclairantes qu'à la condition d'être mise en relation avec toute une série d'autres: pouvoir, autorité, mémoire, continuité, communauté, identité, innovation, modernité, rhétorique… (358).C'est ce que la bonne vingtaine d'auteurs de ce volume entreprennent de montrer, chacun à sa manière, dans des études où l'histoire, l'anthropologie ou la sociologie fournissent une riche moisson d'observations et d'analyses qui permettent de dégager ensuite des conclusions plus réflexives et théoriques (p. ex., 368-374, des observations originales à partir du parallèle entre tradition et échange de dons). Il n'est pas possible d'entrer ici dans le détail de ces contributions. Bornons-nous à énumérer les principaux domaines abordés: contes hassidiques, fête de l'ascension nocturne de Mohammed, image d'un âge d'or où l'harmonie interreligieuse régnait dans l'Espagne médiévale, médecine indienne, pensée néo-hindoue de S. Radhakrishnan, hindouisme népalais, bouddhisme birman, bouddhisme de tradition tibétaine au Brésil, confucianisme chinois, shintô japonais, pratiques religieuses hawaïennes, femmes congolaises entre tradition africaine et tradition chrétienne, thème de la prisca theologia dans des courants ésotériques en islam et dans l'Europe médiévale et moderne, débats entre catholiques et protestants sur Écriture et Tradition, statut des femmes dans de Nouveaux Mouvements Religieux… À la différence de beaucoup d'ouvrages collectifs, celui-ci est fortement unifié autour de son thème central. Ses analyses et ses réflexions plus théoriques ouvrent des voies nouvelles. - J. Scheuer sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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