Jusqu'où ouvrir le livre ? Brève théologie des Écritures

Emmanuel Durand
Écriture Sainte - Recenseur : Marie-David Weill

Emmanuel Durand, dans un langage à la fois accessible et précis, revisite en premier lieu les questions abordées dans la constitution Dei Verbum de Vatican ii sur la Révélation divine : Qu’est-ce que la Révélation, l’Écriture, la Tradition ? Comment tenir que l’Écriture est Parole de Dieu en même temps que paroles humaines ? La richesse de la Constitution est explorée minutieusement, laissant apparaître du même coup les questions laissées en suspens par les Pères conciliaires (chap. 3, « Avec et au-delà de Dei Verbum ») et approfondies dans le magistère ultérieur (voir p. ex. Commission Biblique Pontificale, L’Interprétation de la Bible dans l’Église, 1993 ; Inspiration et vérité de l’Écriture Sainte, 2014 ; Benoît xvi, Exhortation post-synodale sur la Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l’Église, Verbum Domini, 2010).

Dans la seconde moitié de l’ouvrage, l’A. apporte sa contribution personnelle à trois dossiers complexes. Relevons notamment le chapitre dans lequel l’A. regarde « les Écritures comme kénose, conversation et incorporation du Verbe » (p. 135), trois motifs qui éclairent l’interprétation et la vérité du texte sacré, en particulier en ses passages obscurs ou scandaleux (dissonances, injonctions de violence, silences de Dieu face à la mort de l’innocent, etc.). L’A. déploie l’analogie traditionnelle entre la venue du Verbe dans la chair et sa venue dans les paroles humaines et leur mise par écrit. De même que la chair n’est pas seulement faiblesse ou voilement, mais aussi singulière capacité d’expression, de même « Fragilité, possible ambiguïté, expressivité sont aussi les trois caractéristiques de la parole humaine, des lettres et des mots, en lesquels la parole de Dieu s’est abaissée pour devenir Écritures » (p. 141). L’analogie jette une lumière singulière sur la vérité des Écritures au-delà des limites du langage humain, de son conditionnement et des inévitables approximations de sa mise par écrit et de sa transmission au fil des siècles.

Alors, « Jusqu’où ouvrir le livre et à quel prix ? » Laissons le mot de la fin à l’A. lui-même : « Si le Christ est le foyer de toutes les Écritures, ouvrir le livre en vérité suppose d’être plongé dans le mystère pascal. C’est au prix de la Croix que les Écritures deviennent moyen de salut. Pour qu’elles soient efficacement reçues comme salvifiques, il faut que les auditeurs consentent à être eux-mêmes entraînés dans la Pâque du Christ. C’est subjectivement onéreux. C’est aussi objectivement dangereux » (p. 196-197). Nous voilà prévenus ! — M.-D. Weill c.s.j.

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