Ainsi qu'il le précise dans l'Introduction, le P. Tillette s'est
engagé une nouvelle fois sur «le chemin de la philosophie à la
théologie», tel qu'on le voit tracé dans la plupart des
philosophies chrétiennes: celle de Malebranche, celle de Leibniz,
ainsi que les diverses philosophies chrétiennes du XIXe siècle, de
Bautain à Gratry, ou de Blondel et Gabriel Marcel, «dont la pensée
est amorcée et secrètement dirigée par le christianisme». L'idée
fondamentale de l'A. est que «la Révélation chrétienne a modifié
totalement les données du problème, que la pensée humaine s'en est
trouvée affectée au tréfonds». On trouve ainsi, constate-t-il, des
ébauches d'ecclésiologie concrète dans les grandes philosophies de
la religion des XVIIIe-XIXe siècles: Lessing, Kant, Fichte , Hegel,
Schelling. «La philosophie sociale et l'intersubjectivité rendent
également «indispensable, inéliminable, l'idée de l'Église, qui est
une société, un corps, justiciable d'un schéma organique et d'un
schéma juridique». C'est ce qu'illustrent chacun ces chapitres de
l'ouvrage: Nicolas de Cuse et la concordance catholique; Leibniz et
l'Église universelle (à l'occasion, notamment, de sa correspondance
avec Bossuet); l'Église invisible selon Kant, Église et État selon
Fichte et Hegel; l'Église romantique, puis Kierkegaard, Rosmini,
Moehler, Newman à la fin du XIXe siècle, pour aboutir à Soloviev,
Blondel, Maritain, Guardini, Fessard et Bruaire. L'ouvrage se
termine sur une appréciation nuancée, parfois critique, mais
globalement positive de l'encyclique Fides et Ratio. Et l'A. de
conclure, tout en reconnaissant les inévitables lacunes du parcours
d'une histoire aussi complexe, qu'une ecclésiologie philosophique
est possible, dans la mesure où elle ne néglige ni l'histoire, ni
la théologie. - P. Lebeau sj