Si vous ne deviez lire qu'un livre en ce temps pascal, qui rende
compte du surgissement du Neuf tout en faisant mémoire du
difficile, d'une souffrance, appel à passer sans rechigner de la
déréliction du Vendredi à l'audace de savourer et fructifier la
fraîcheur du Premier matin, ce pourrait être celui-ci. Colette
N.-M. a déjà, sous des formes fragmentaires et variées, évoqué le
drame qui frappa leur vie d'enfants (la «perte» en quelques mois
d'un papa, d'une maman tant aimés et aimants, alors qu'alentour on
parlait de Libération…), sans omettre les chances qui ont surgi,
inattendues et heureuses, les visages et foyers qui se sont ouverts
à des orphelins pour leur offrir une reliance qui aide à croître,
non sans d'abord panser des plaies et sécher des larmes. Ici l'A.
relate - pour autant que ce soit possible - les émotions de
l'enfant, leur redonnant la parole en deçà de son expertise de
femme adulte, mère et grand-mère désormais multiple. Elle
re-suscite les mots et attitudes de l'entourage face au drame,
l'invitation persistante à devenir soi, petite personne de
sept-huit ans, sous le regard bienveillant de proches familiers,
telle Sr Marie-Tarcisius, qui lui furent bornes et tremplins vers
un rejet de la peur d'aimer, de se laisser aimer.Si la mémoire de
la blessure ne laisse pas le lecteur insensible - mais le plus sûr
visage de la mort n'est-il pas le désamour? - il en gardera
peut-être, Merci Madame!, l'invitation à devenir, être, se laisser
advenir vivant, dévot du Vivant de Pâques, frère toujours en avant
de nous, avec nous enfant bien-aimé de «Celui qu'on ne peut
nommer». - Ét. Rousseau.