L'herméneutique philosophique de Paul Ricoeur et son importance pour l'exégèse biblique. En débat avec la New Yale Theology School
François-Xavier AmherdtPhilosophie - Recenseur : Hubert Jacobs
La perspective de Fr.-X. Amherdt est toujours de mettre en lumière le contre-coup original pour l'herméneutique biblique de la théorie ricoeurienne du texte-récit et de son interprétation. On le voit, bien des domaines des recherches de P. Ricoeur restent donc ainsi dans l'ombre. Mais on sait l'importance qu'a aujourd'hui l'herméneutique biblique de Ricoeur. À travers la diversité conflictuelle qui secoue la quête herméneutique actuelle, P.R. tente une traversée qui doit nous mener vers une «seconde naïveté postcritique» à laquelle il aspire. Contre les critiques de Yale, l'A. montre que P.R. ne sacrifie nullement la portée référentielle des Écritures, respectant au contraire davantage leur plurivocité. Au surplus, l'A. montre le bien-fondé de ce que la déclaration de la Commission biblique pontificale dit de l'herméneutique de P.R. et le bénéfice que peut en retirer l'exégèse catholique. La perspective de R. ne restaure-t-elle pas l'espace d'interrogation où l'interprétation du kérygme biblique peut trouver sa pleine signification? L'auteur réserve, en conséquence, une grande attention aux catégories philosophiques mises en oeuvre par Ricoeur. Il montre comment le langage biblique, bien qu'il fonctionne selon le processus métaphorico-poétique, qui appartient à tout langage, fait signe vers son référent spécifique, qui est l'inouï de la Révélation. Sa réponse aux critiques de Yale peut alors s'élaborer. Ces derniers ne reprochent-ils pas à R. d'abandonner la notion de référence au profit d'une «refiguration» où l'histoire de Jésus se réduirait à une allégorie existentielle? L'A. montre que la plupart des critiques faites par l'école de Yale ne sont pas pertinentes. Ce qui ne veut pas dire qu'un certain nombre de questions ne demeurent pas posées, tant dans le registre philosophique que dans le registre théologique. Il reste néanmoins que le bilan des recherches de P.R. est extrêmement positif, et que l'exégèse catholique peut en tirer un énorme profit. Cette conclusion peut d'ailleurs se voir conforter à la suite du document de la Commission biblique pontificale. Cet effort positif consiste essentiellement en ce que l'agencement particulièrement heureux, opéré par R. entre les étapes du processus herméneutique, permet de rejoindre cette seconde innocence, postcritique, à laquelle nous aspirons, et qui dilate, en nous surprenant, la capacité de compréhension que nous avons de nous-mêmes et de notre monde. - H. Jacobs sj